Quel enseignement pour le futur puis-je tirer des 20 ans de la décroissance ?
À la suite de la lecture du livre de Nicholas Georgescu, Demain la décroissance : entropie-écologie-économie (1979), nous avons imaginé, Bruno Clémentin et moi, le concept de « décroissance soutenable ». C’était en juillet 2001. Nous ne reviendrons pas ici sur la suite. Si les débats au sein du mouvement de la décroissance sont vitaux, en revanche, ressasser le passé m’exaspère autant que ceux qui passent leur temps à réécrire l’histoire ou ceux qui se passionnent pour les querelles des micros-chapelles de décroissants. Ce qui nous a toujours intéressés est d’être tournés vers tous. C’est la raison d’être du journal La Décroissance et de sa diffusion en kiosque. Qu’en est-il 20 ans plus tard ? Ma première observation est que le mot décroissance n’a plus aujourd’hui la même force d’interpellation dans la société. S’il reste le « mot épouvantail » par excellence, une insulte dont s’accusent mutuellement tous les politicards, les coups de ce « mot bélier » pour faire une brèche dans la forteresse où s’est claquemurée la société de la croissance sont moins percutants. En 2 décennies, le mot s’est répandu, aidé par la réalité des crises. C’est aussi le signe paradoxal de sa victoire : son imprégnation se mesure à l’aune de son affaiblissement « perforatif » ! Cruelle conclusion pour les décroissants qui s’illusionnent en voyant dans l’effondrement l’occasion de réaliser leur fantasme de domination, aux misanthropes et vaniteux qui ânonnent : « Bien fait on vous l’avait bien dit ! »
Mais c’est bien le propre de la décroissance que de reposer sur une série de paradoxes. Le premier d’entre eux est de réaffirmer à la suite d’Ivan Illich que le seul sentiment de toute puissance infantile peut nous laisser penser que nous avons une prise totale sur la marche de l’histoire humaine. Que « tout est politique ». Et que c’est justement cette toute-puissance qui nous a en grande partie conduits à l’effondrement écologique et humain. Au contraire, la décroissance invite à une certaine humilité. Sans cette dernière, impossible de transformer au mieux le monde. C’est en comprenant ma faiblesse que je deviens fort. Il faudrait être fou pour penser qu’en écrivant ces lignes derrière mon écran je puisse sauver le monde. Seulement puis-je peut-être lutter contre ceux qui croient véritablement pouvoir le sauver comme le directeur du WWF France qui au nom de l’écologie, la fin justifiant les moyens, légitime l’instauration d’un pass climatique sur le modèle du pass vaccinal[note].
Pour répondre à l’invitation de nos amis de Kairos, je voudrais saisir cette opportunité pour évoquer ce qui constitue pour moi LE grand « non-dit » de la décroissance. Il est des choses tellement énormes qu’on ne les voit plus. Pour l’exprimer, je vais m’appuyer sur une sortie de Thierry Ardisson. Nous n’insisterons jamais assez sur l’idée, surtout en ces temps de submersion par la propagande, que la vérité d’où qu’elle vienne reste la vérité. « Même au Diable il arrive de dire des vérités. Il ne faut pas sottement condamner des paroles à cause de celui qui les prononce » soulignait Saint Clément d’Alexandrie[note]. L’animateur de télé poubelle affirmait donc : « Fondamentalement, l’écologie et le capitalisme sont antinomiques. Le premier est synonyme de décroissance, et l’autre de croissance[note]. » Cet éclair de lucidité (lié à la cocaïne ?) exprime à mon sens le cœur de la problématique écologique, et plus profondément celle de la condition humaine. Elle sera la clé de voûte de ma réflexion.
Giorgio Pratolongo
DISPERSER UN MAXIMUM D’ÉNERGIE
Pour survivre, comme individu et comme société, nous devons « disperser un maximum d’énergie ». Je renvoie pour une explication scientifique aux travaux de l’astrophysicien François Roddier[note]. Pour l’exprimer simplement, à titre individuel, pour avoir le maximum de chance de se reproduire, l’homme doit montrer sa capacité à disperser de l’énergie. L’argent, une Porsche ou un diamant ont cette fonction symbolique. Face à ses concurrents, l’homme démontre à la femme qu’il est « plein d’énergie », et qu’avec lui, elle sera en sécurité pour se reproduire. Ce qui est parfaitement légitime de la part de cette dernière alors qu’elle est, face à lui, en situation de faiblesse dans la nature ; c’est elle qui porte le bébé et les seins pour l’allaiter. Je vois ton sourire cher lecteur. Car, bien entendu, cette réflexion simplissime, qui semble tirée de la sociologie désespérée d’un ado, ne peut que déclencher une réflexion gênée de la part de la majeure partie d’un auditoire. Mais il est des évidences tellement énormes qu’il est quasiment impossible pour toute une partie d’entre nous de les entendre énoncer. D’où les réactions de parler sur le locuteur pour qu’il arrête le supplice, la récusation moqueuse… Ce renvoi aux fonctions archaïques de notre condition ne peut en effet qu’atteindre l’image magnifiée que nous avons de nous-mêmes. Il n’empêche que ces réactions peuvent être parfois utiles, voire salutaires. Toutes les vérités ne sont pas toujours bonnes à dire ; le vrai ne se confond pas toujours avec le bien.
Cette contrainte à la dispersion d’un maximum d’énergie est tout autant valable comme groupe humain : pour survivre dans la guerre économique, comme dans les guerres tout court d’ailleurs, il faut disperser un maximum d’énergie, c’est-à-dire… mener des politiques de croissance c’est-à-dire accroître sans cesse la production de biens et de services. À cette fin, il faut faire tomber tout ce qui l’entrave. L’application politique en est l’idéologie libérale et son double mouvement bien mis en lumière par Jean-Claude Michéa : « Le libéralisme économique intégral (officiellement défendu par la droite) porte en lui la révolution permanente des mœurs (officiellement défendue par la gauche), tout comme cette dernière exige, à son tour, la libération totale du marché. » Nous sommes ainsi progressivement plongés dans des sociétés dont le fondement devient le refoulement, la transgression et la destruction de toute limite. Bien évidemment les idéologues du libéralisme-libertaire pensent développer une philosophie alors qu’ils ne font que prêcher l’application des lois de la biophysique au politique ; en gros la loi du plus fort ; « struggle for life » ; la loi de la jungle. Ce discours trouve sa légitimité selon lequel son refus ne peut conduire qu’à se faire dévorer. Et les quelques niches qui seront invariablement citées en contre-exemple n’invalident bien sûr pas ce principe général.
On ne lit jamais ses contradicteurs, même ceux qui semblent les plus claquemurés dans un esprit de système qui les conduit à ne pas supporter la moindre contradiction. Ainsi le chantage des techno-prophètes du transhumanisme est invariable : si nous n’acceptons pas de franchir certaines barrières éthiques, d’autres, moins à cheval que nous sur les principes, s’y livreront allègrement et nous dévoreront. Dans ma jeunesse, c’était déjà la moquerie adressée au ministre de la défense mitterrandien, Charles Hernu (1923–1990). Pour légitimer les exportations d’armes d’un gouvernement de gauche, il rétorquait par la sentence : « Si ce n’est pas moi qui le fais, ce sera alors un salaud de droite ». C’est tout le sens du chantage permanent de Messieurs Luc Ferry ou Laurent Alexandre : « Les progrès en neurosciences, explique ce dernier, posent la question philosophique de ce qui fait la spécificité de l’humanité en abolissant deux limites réputées infranchissables : celle qui nous sépare des animaux, avec le neuroenhancement, c’est-à-dire l’amélioration cognitive, et celle qui nous distingue des machines, avec l’IA [l’intelligence artificielle]. (…) Peut-on laisser les Chinois fabriquer des chimères homme-singe ou faut-il protester vigoureusement ? En réalité, les transhumanistes chinois hausseront les épaules si nous réagissons[note]. »L’idée que la liberté de conscience nous oblige à discerner le bien du mal, le vrai du faux et le beau du laid, fait sourire notre esprit utilitariste. Selon sa formule, le cerveau n’est qu’un « ordinateur fait de chair ». La menace de tous les Laurent Alexandre est donc claire : « Si nous ne réagissons pas, nous allons finir comme une colonie technologique dans les mains des géants du numérique sino-américains[note] ». Leur conclusion est implacable ; abolir le reste des vieilles barrières morales qui entravent notre marche vers le Progrès est une urgence pour survivre dans la compétition mondiale. Ce chantage des transhumanistes peut nous paraître odieux, mais il contient sa part de vérité. Car l’enjeu essentiel, essentialiste, est bien là : jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour survivre dans la compétition mondiale ?
DISPERSER UN MINIMUM D’ÉNERGIE
De l’autre côté, pour sauvegarder son environnement, l’humain doit donc faire exactement l’inverse, c’est-à-dire « disperser un minimum d’énergie ». Même quand on se défonce dans un champ avec une bêche pour ne pas avoir recours à un motoculteur, c’en est bien le sens. Il s’agit bien ici de se poser des limites. À tel point qu’une des formules les plus célèbres de Freud est que « la conscience est la conséquence du renoncement aux pulsions. » Selon le père de la psychanalyse, plus le niveau de société est élevé, plus l’individu accepte de contraintes. Mais la conséquence en est l’augmentation des névroses. Nous l’observons tous : les individus très cérébraux que nous croisons dans le monde intellectuel ont la tendance naturelle à négliger ce qui relève de la matérialité, de vivre « dans leur nuage ». Comme la tendance inverse existe au moins autant.
LA DÉCROISSANCE, UNE SYNTHÈSE
Même si nous ne le théorisons pas, nous sommes bien plongés dans ce dilemme, peinant à tenir les deux bouts. Nous observons de manière aiguë actuellement cette contradiction : pour faire face à la pénurie énergétique et « sauver le climat », des instances gouvernementales nous enjoignent à réduire d’urgence notre consommation[note], mais d’un autre côté, le Gouvernement est totalement effrayé par cette perspective. Il s’agit au contraire pour lui que la consommation énergie (donc sa dissipation) soit maximale pour survivre dans la guerre économique. Dans sa Lettre aux Français du 3 mars 2022, le Président de la République indiquait : « Pour ne pas nous laisser imposer par d’autres les technologies qui rythmeront demain notre quotidien, il nous faudra aussi continuer d’investir dans notre innovation et notre recherche afin de placer la France en tête dans les secteurs qui, comme les énergies renouvelables, le nucléaire, les batteries, l’agriculture, le numérique, ou le spatial feront le futur et nous permettront de devenir une grande Nation écologique, celle qui la première sera sortie de la dépendance au gaz, au pétrole et au charbon. » Ici, bien paradoxalement encore, l’écologie sert de prétexte de relance à l’expansion maximale.
D’où la contradiction qui s’exprime quand l’État tente de nous rassurer en affirmant, à travers son Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), que « la sobriété n’est pas synonyme de décroissance » (22 mars 2022). On aboutit ici à une « double injonction matrice de la folie alors qu’au contraire nous devrions intégrer raisonnablement le principe de cette tension contradictoire. Cette dialectique est à l’image de notre condition humaine : sans réponse définitive. Nous sommes donc condamnés à chercher perpétuellement un équilibre. Face à cette difficulté la tentation permanente est l’« esprit de système ». Il consiste à refuser l’altérité du monde ; à ne juger que la thèse recevable et en diaboliser parallèlement l’antithèse. La première est assimilée au Bien comme la seconde au Mal. L’argumentaire récurrent pour défendre cette idée fermée, à nouveau bien paradoxal, est le refus du « dualisme ». Mais cet esprit de système conduit inéluctablement au monisme, c’est-à-dire à un monde indifférencié.
Face à l’esprit du temps, soyons punk et tendons le bâton pour nous faire battre : citons la Bible. Dans la Lettre de Saint-Paul aux Corinthiens, l’apôtre dit : « Frères, j’aimerais vous voir libres de tout souci. Celui qui n’est pas marié a le souci des affaires du Seigneur, il cherche comment plaire au Seigneur. Celui qui est marié a le souci des affaires de ce monde, il cherche comment plaire à sa femme et il se trouve divisé. La femme sans mari, ou celle qui reste vierge, a le souci des affaires du Seigneur, afin d’être sanctifiée dans son corps et son esprit. Celle qui est mariée a le souci des affaires de ce monde, elle cherche comment plaire à son mari. C’est dans votre intérêt que je dis cela ; ce n’est pas pour vous tendre un piège, mais pour vous proposer ce qui est bien, afin que vous soyez attachés au Seigneur sans partage. » C’est bien ce dilemme premier qui est exprimé ; celui entre la nature et la liberté. La liberté entendue, non pas comme droit de faire n’importe quoi, mais responsabilité de discerner et choisir. La nature entendue ici, elle, comme le « capitalisme », c’est-à-dire dans le sens de la compétition pour la survie[note]. Nul n’échappe à la compétition entre les êtres humains et les plus dupes sont ceux qui le nient selon la loi psychologique de base selon laquelle on mesure le degré d’aliénation d’un individu à son illusion de liberté. Même dans les groupes les plus collaboratifs les hommes sont en concurrence pour s’attribuer les belles femmes. C’est la loi archaïque fondamentale de notre condition humaine. Pour nous reproduire, nous sommes en compétition, quel que soit le régime politique. Cette compétition archaïque, je vais l’assimiler ici à une forme de capitalisme anthropologique. Je la distinguerais de l’autre signification du capitalisme, que je combats naturellement : celui d’une société inversée où la loi de l’argent est première. C’est là le combat premier de la décroissance qui motive tout mon engagement.
Toute l’œuvre de Bernard Charbonneau est traversée par l’intégration de cette dialectique : « D’un côté le constat de la nécessité, de l’autre l’idéal de liberté qui pousse à la refuser pour s’humaniser. Pourtant, à elle seule, la réalité n’a aucun sens, de même que l’idéal s’il est irréalisable. » Je recommande particulièrement sur ce sujet son chef‑d’œuvre littéraire Je fus (1950) : « Donc, en tous domaines, le devoir fondamental est de supporter la déchirure qui nous travaille. Si en nous l’esprit s’est enfin distingué de la matière, c’est parce qu’il tend à s’y incarner. L’idéal et le réel ne sont que les deux termes d’un seul ensemble dont chacun est l’arbitre. » Je fais totalement mienne la conclusion de ce géant précurseur de la décroissance : « L’écologie […] ne défend pas la nature ou la liberté, comme serait tenté de le faire sa droite naturaliste ou sa gauche gauchiste, mais la nature et la liberté. Ce paradoxe qui fait sa richesse et sa vie lui interdit de se fixer en idéologie[note]. »
C’est ce que j’aimerais transmettre aux jeunes qui prennent la suite et le relais pour défendre la décroissance. Le pire serait qu’elle devienne une forme d’obscurantisme, comme l’est actuellement l’idéologie de la croissance, le scientisme, le libéralisme ; la société de l’illimité dans tous les domaines, l’économie, la culture ou les mœurs. C’est-à-dire un fondamentalisme qui n’accepte pas sa contradiction.
Avant d’être une philosophie politique reposant sur l’idée de « moins mais mieux », de « Lentius, suavis, profondius », la décroissance est donc une invitation au débat, à la dialectique, à penser que si des fois nous avons besoin de « plus », le moins est tout aussi légitime à rappeler, a priori dans notre contexte de pays riche surdéveloppé. Rien ne m’effraye davantage que d’entendre la décroissance instrumentalisée par des démagogues promettant le beurre, l’argent du revenu inconditionnel et le sourire du dealer de cannabis. La démagogie est toujours le masque aguichant du séducteur pervers qui cherche la domination. Aussi, avant de promouvoir la décroissance, nous devrions commencer par nous forcer à trouver et défendre les bons arguments en faveur de la croissance. Et le jour où la décroissance sera aussi omniprésente que la croissance dans les médias, imaginer monter un journal au nom de cette dernière. On a encore de la marge !
Je vais faire de la publicité au roman (excellent) de mon frère Denis, Tu crèveras comme les autres[note]. Dans son Road book apocalyptique, il y décrit un héros qui abandonne petit à petit tous ses principes pour survivre. Il délaisse progressivement sa liberté au profit de la nature. Il perd son âme au fur et à mesure qu’il sauve sa peau. Il renonce à ce qui spécifie son humanité pour se transformer en fauve. Il choisit d’être un mort-vivant plutôt qu’un vivant mort.
Voilà le questionnement auquel nous renvoie la véritable décroissance, pas à celui de promettre aux gogos de sauver le monde contre leur vote. Le destin de la décroissance donc est bien celui-là : accepter d’être du « parti des perdants », c’est-à-dire de ceux qui ne sont pas prêts à renoncer à la morale pour survivre. Faut-il s’en décevoir ? Non. D’abord ce serait une preuve de folie que de promettre de sauver le monde, même si bien évidemment toutes les améliorations sont essentielles à mettre en œuvre. Ensuite, et à condition d’appliquer cette volonté, tenter de sauver la liberté est un but plus sage donc plus grand que celui de sauver la nature. « Un homme n’est libre, écrit Alexandra Laignel-Lavastine, debout et donc Vivant, au sens fort du terme, que s’il consent à se demander pourquoi – pour quels principes, quels idéaux, quel bien supérieur – il serait prêt, le cas échéant, à engager sa vie et à risquer un peu sa sacro-sainte santé. À moins, nous sommes déjà morts. N’est sacré, en cela, que ce pour quoi on serait éventuellement prêt à sacrifier et à se sacrifier, donc à surmonter notre asservissement au vivre pour vivre. Tout ce qui est grand en l’homme dérive de cette disposition d’âme[note] ».
Vincent Cheynet, fondateur du journal La Décroissance
Refaire la Cité, sans eux…
C’est Jaime Semprun qui avait inversé la phrase « Quel monde allons-nous laisser à nos enfants » par « Quels enfants allonsnous laisser à notre monde ». Il avait au fond raison. À demeurer à genoux, nous demeurons des esclaves, laissant les puissants debout. Ce n’est pas nouveau, nous avons troqué depuis longtemps notre liberté contre centres commerciaux et vacances en avion et accepté de sacrifier nos vies dans des bullshit job dans l’illusoire attente d’une pension à 67 ans. À ceux qui me disent d’aller voir en Corée du Nord lorsque je leur dis que nous ne sommes pas en démocratie, je rétorque qu’il y a différents niveaux de dictature, dépendant de la longueur de laisse que le pouvoir daigne nous accorder pour autant que nous le laissions tranquille. La répression féroce des Gilets Jaunes en constitue la preuve : ceux qui remettront en cause le pouvoir central seront réprimés sans vergogne. De même, ceux qui nous demandent d’aller voir en Corée du Nord acceptent sans broncher que, dans leur pays, on suspende des soignants qui refusent de se faire injecter un produit expérimental. D’autres se font piquer pour aller au cinéma ou une semaine en All inclusive, alors qu’ils n’avaient aucun risque de mourir du Covid. Soit, ce monde était malade bien avant mars 2020 et ses sujets atomisés prêts à accepter tout ce que l’État central allait leur demander. Soumission à l’autorité et conformisme constituaient déjà les attitudes principales de nos sociétés désunies. Il faudra donc se ré-unir, mais à certaines conditions, dont les deux plus importantes sont de sortir du spectacle dans lequel on a été plongé, et de ne plus croire que ceux qui nous dirigent nous veulent du bien. Les politiques ont laissé la misère se répandre, favorisé des écarts de richesse ignobles, détruit la nature. Peut-on alors s’étonner qu’ils aient unanimement appliqué les règles du Forum de Davos et de Mc Kinsey ? Ils n’ont donc aucune légitimité. Parler d’eux et jouer dans le spectacle médiatique de leur fausse différence, c’est déjà leur donner du crédit. Attendre que le changement vienne d’eux nous assure la continuité du pire. Comme disait Coluche avec intelligence, si voter changeait quelque chose, cela fait longtemps que ce serait interdit. Il ne nous reste donc qu’à désobéir, dire non, ne pas se laisser hypnotiser par les fausses luttes, ces palliatifs qui nous endorment en accompagnant le système , s’unir au-delà de désaccords de surface, accepter que l’on perdra en confort matériel pour mieux nous retrouver. C’est sans doute la dernière chance. *
Alexandre Penasse
* Allocation faite dans le cadre du Mégathon.