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Covid-19 : l’occasion de continuer le business — derrière le paravent médiatique (où n’arrivent que les « bonnes questions »)

La question était simple, consistant à savoir « quelle légitimité démocratique il y a à prendre certaines décisions quand la plupart des membres qui décident et réfléchissent font partie des multinationales et du monde de la finance ». Nous étions le 15 avril, lors de la conférence de presse suivant le Conseil National de Sécurité, en pleine crise du Coronavirus. Si cette question ne nécessitait pas un talent particulier pour qu’on puisse la comprendre, nous n’attendions toutefois pas véritablement de réponse, sachant que celle-ci était pour eux impossible : on ne peut assurer conjointement le bien commun et les retours sur investissement, dans le domaine de la santé peut-être encore davantage. Il s’agissait donc de donner la preuve, à un moment où l’audience était à son comble – ce qui ne nous est jamais donné en tant que média libre –, que leur discours n’est que gesticulation spectaculaire, sorte de plan de com pour occulter ce qu’ils sont et qui ils servent réellement.

Quand on demande à une ministre diplômée de communication à l’IHECS, option pub, porteuse d’une licence spéciale en gestion financière, ministre du Budget dans le gouvernement Michel, ancienne conseillère d’un bureau d’avocats d’affaires, issue d’une famille proche du monde politico-financier[note], dont le père fut membre fondateur du Cercle de Lorraine[note], au cœur du pouvoir donc[note], quand on lui demande donc ce qu’elle pense de cet incestueux mélange entre mondes public et privé, on n’escompte évidemment pas qu’elle fasse pénitence et congédie sur-le-champ ses collègues pour conflit d’intérêts. Il ne peut y avoir de réponse, de motivation acceptable et de justifications, et cela explique que notre présence n’est plus désirée à une conférence de presse du gouvernement. Notre question du 15 avril a suffisamment bouleversé les lignes. La réaction aussi parle d’elle-même, alors que la ministre est surprise et décontenancée, un peu comme si on lui avait servi le dessert avant l’entrée. Vous conclurez vous-mêmes, après lecture de cet article, si ceux qui nous dirigent sont au service du bien commun ou ne représentent plus qu’eux-mêmes et leurs amis patrons et banquiers.

« Conflit d’intérêts » ? Ce concept est inexistant pour quelqu’un qui considère que la politique sert les intérêts du capital. Elle l’exprimera clairement, lorsqu’au cours de mon interpellation du 15 avril, Sophie Wilmès m’interrompra : « Monsieur, je n’ai pas l’intention de vous interrompre (sic), mais si vous avez l’intention de donner les CV de l’entièreté des gens qui travaillent et qui ont droit à un peu de privacy, je vous encourage à terminer votre question et j’y répondrai ». Un peu de privacy donc, entendez qu’elle considère que le fait de savoir quelles peuvent être les éventuelles motivations personnelles de ceux qui nous dirigent à prendre des décisions politiques, fait partie du domaine de la vie privée : fantastique retournement du concept d’intérêt général.

1. Médias et politique

Dans cette théâtralisation de la réalité, « les grands acteurs médiatiques du paysage belge[note] » sont les garde-fous qui protègent les politiques de toutes questions qui pourraient briser leur jeu de représentation. Il n’y eut donc qu’une tentative de notre part le 15 avril, et la recherche fébrile de Sophie Wilmès pour m’empêcher de tenter un deuxième coup, soit de poser une deuxième question[note], tendant le cou et tournant la tête pour trouver le « bon » journaliste et la question conforme, illustre parfaitement le processus d’adéquation entre la pensée politique et médiatique, qui s’inscrivent dans un cadre bien défini où l’on veut s’assurer que celui qui écoute et voit, le spectateur, ne bougera surtout pas – il ne faudrait pas qu’il sente ses chaînes. Évoqueront tout autant ces ententes tacites médias-politique : le refus du ministre-président Jeholet de répondre à ma question le soir du 24 avril[note], le silence du service de presse de la ministre Wilmès face à nos multiples mails et appels téléphoniques, le mutisme encore de celle-ci face aux courriers envoyés par des citoyens l’invitant à s’expliquer sur le refus de notre présence en conférence de presse. Pourtant, comme le dira une de nos lectrices : « Elle annonce sur son site “être à l’écoute”… ». Effets d’annonce justement… procédés de com, où l’on constate que plus on se dit à l’écoute, moins on entend.

Ils ne lâcheront donc rien[note], et surtout pas ce qui fonde leur pouvoir : que nous restions à genoux. Le zèle de la caste médiatico-politique pour se présenter en fonctionnaires patentés de la certification de l’authenticité de l’information, donc de décréter ce qui est et n’est pas fake news, fait partie de ce jeu. On pourrait peut-être en rire si la situation n’était pas si grave, alors que l’on sait que ceux qui se font les parangons de la vertu et de l’info estampillée d’origine contrôlée sont les mêmes qui dans leur canard censurent à tout va[note], oubliant de nous parler du poison qu’ils distillent quotidiennement dans nos esprits, et mordent quand on tente de donner aux gens une autre nourriture informative. Dorian de Meeûs, « l’inénarrable » rédacteur en chef de La Libre, sort donc les crocs et s’offusque quand on ne pose pas « les bonnes questions » ? Il passe sous silence l’épisode où sa rédaction avait considéré qu’« on ne peut pas accepter, notamment dans le courrier des lecteurs où on parle des inégalités, quelqu’un qui se dit écœuré de voir l’écart entre les revenus des patrons et ceux des travailleurs »[note] ? « Mauvaise question », direction poubelle. C’est en effet sans doute peu approprié de citer l’écœurement de citoyens face aux inégalités quand la famille qui possède le journal dans lequel on écrit, les Le Hodey, dispose d’un patrimoine de 41.071.000€ et est 431ème fortune belge[note]. Réalité et « bonnes questions » ne font donc pas toujours bon ménage, et ceux qui ont le bénéfice de nous dire ce qui est important ou non, auront aussi celui de se présenter en chasseur de fake news[note], ce qui leur assurera par effet miroir positif de ne pas en être les artisans. Comme le disait Guy Debord, à propos du concept de désinformation : « Il est toujours hautement employé par un pouvoir, ou corollairement par des gens qui détiennent un fragment d’autorité économique ou politique, pour maintenir ce qui est établi ; et toujours en attribuant à cet emploi une fonction contre-offensive »[note].

Certains rêveraient sans doute d’un peu plus d’autoritarisme politique pour me punir de mes péchés, et face à mon attitude journalistique « indigne d’une carte de presse », que l’on me l’enlevât plus aisément, afin que personne ne vienne plus perturber leur cirque. 

La contre-offensive médiatique

D’autres se sont lancés dans des rhétoriques alambiquées pour tenter de justifier que la question du 15 avril était bonne, mais non pertinente, donc mauvaise, puisque posée au mauvais endroit[note]. Un journaliste en est finalement venu à considérer dans un article inintelligible que j’étais « l’homme de paille » de Wilmès, lui permettant de « réfuter une thèse qui n’est soutenue par personne »[note]. Homme de paille, définition : « Prête nom. Responsable politique sans réel pouvoir, car manipulé dans l’ombre par d’autres ». Celui qui me voyait ainsi indirectement au service de la Première ministre écrivait pour Le Vif l’Express, « marque » du groupe Roularta, propriété de la famille De Nolf-Claeys. La première, qui gère le groupe De Nolf, possède notamment avec la seconde : Cennini Holding[note], 50% de Belgian Business Television, qui elle-même est propriétaire de RMG (Roularta Media Group, 100%) et Mediafin (50%). Mediafin, qui est notamment détentrice de 50% du groupe Rossel, qui édite notamment le quotidien Le Soir. Roularta a également des parts dans : Koinon (société à portefeuille), West Investement Holding S.A. (société anonyme basée au Luxembourg), Bestinver gestion (société d’investissement, Espagne). Ajoutons que le groupe Roularta est présidé par Xavier Bouckaert, membre du Cercle de Lorraine.

Sa proximité avec des fonds d’investissement et autres machines à faire du pognon nous indique avec évidence que la rédaction du Vif ne peut pas fourrer son nez partout. Certes, il y aura toujours des irréductibles pour nous dire que « ce n’est pas parce qu’un journal appartient à un groupe propriété d’une richissime famille qu’il ne peut pas dire ce qu’il veut ». Preuve de naïveté ou de mauvaise foi, tant on sait que ces familles ne sont pas là pour assurer le bien commun et l’équité, étant les premières à bénéficier de la misère structurelle de nos sociétés : plus il y a de pauvres, plus ils sont riches.

Plus paradoxal est le fait que certains de ces médias semblent les plus prompts à titiller le pouvoir. Mais ce n’est là qu’apparence : poil à gratter inoffensif, ils ne permettront pas au lecteur de tirer les conclusions en termes de fonctionnement structurel de nos sociétés, machines à produire les « scandales » qui feront le fonds de commerce de ce type de médias. Le reste : de la pub (beaucoup), du vent, du vide et de l’éloge des politiques. Exemple : dans Le Vif du 23 avril 2020, un dossier consacré à Sophie Wilmès, intitulé « Le syndrome de la première de classe », dont l’introduction à elle seule révèle dans quelle cour on joue : « Ambitieuse ? Personne ne dirige un pays sans l’être. Mais Sophie Wilmès est d’abord une première de classe. Une obsédée du détail et de la perfection, qui travaille à en épuiser ses équipes. Une bonne vivante, aussi, qui se réjouit de pouvoir boire à nouveau du vin blanc sur la plage de Knokke »… On est servi, merci, la pensée a fait un grand pas de plus dans la compréhension du monde. De là à vouloir lire la suite… À côté de cela, le journal évoquait « le journaliste agitateur du média Kairos »[note]. Deux poids, deux mesures.

Plusieurs médias, une seule pensée

D’autres parleront sans vergogne, en plein direct, d’une « question complotiste », à l’instar de RTL-TVI[note].

https://youtu.be/-2lu-h-QA7w

Se faisant les gardiens du pouvoir, leur posture anti-complotiste permet d’éluder les réelles tractations d’un État mafieux dont ils se font les ardents défenseurs. La RTBF ou le journal Le Soir, auront eu eux la réaction de ne pas en avoir. Les premiers, recevant la ministre juste après la conférence de presse, alors que les habitudes avaient été ébranlées par une question qui, dans un monde décent, aurait dû demeurer somme toute dans le domaine du banal, n’en diront pas un mot. Les autres n’écriront pas une ligne sur la « question biaisée politiquement ». Ces types de réponses à « l’événement » du 15 avril se révèlent à la lumière du fonctionnement général de ces différents médias : des manifestations différentes d’un mode de production médiatique identique. Les différences sont ici plus des détails qui occultent le fond commun qui les anime, à savoir la fonction sociale qu’ils remplissent dans leur ensemble : fabriquer le consentement, en feignant que ce sont les citoyens qui décident et qu’on se soucie de leur avis[note].

Depuis la conférence de presse du 15 avril et notre question qui généra « le malaise », les médias se sont donc principalement arrêtés sur des détails, des commentaires sans profondeur sur les lieux où l’on devrait pouvoir parler et les autres où on ne pose pas de questions, nous accusant de complotisme et balayant d’une main le sens de la question, celui des conflits d’intérêts. Tout cela pour éviter de parler du fond. Les chiens aboient, la caravane passe…

2. Wilmès et ses copains

Face à cette armée médiatique qui a en charge le contrôle du réel, quand on parvient à poser des questions importantes pour le collectif, on obtient donc la réponse de Sophie Wilmès du 15 avril : « Vous venez d’introduire dans cette salle de presse la question biaisée politiquement, ce qui en général n’est pas l’habitude des journalistes ». Tout est dit. Donc rien ne sera dit, puisqu’il ne faut pas savoir ce qui ne doit pas être su. La question du conflit d’intérêts avait pourtant tout son intérêt.

Le groupe d’experts en charge de préparer le déconfinement

Parmi les membres du GEES, le Groupe d’Experts en charge de l’Exit Strategy, le CV de la plupart donne la couleur générale et l’orientation de cet organe chargé de prendre des décisions nationales qui auront un effet décisif sur la vie de 11 millions de Belges. Après le Covid-19, rien de neuf, ou la même chose en pire, comme Sophie Wilmès nous le dira au Parlement le 7 mai : « Faire semblant que la loi de l’offre et de la demande n’existe pas (sur les masques), c’est mentir à la population. » Simple rhétorique, car lui mentir vraiment, ce serait lui faire croire que l’État n’est là que pour assurer le fonctionnement du marché, là où il aurait pu faire primer l’intérêt collectif. Exit ce dernier, le ministre des Affaires étrangères achètera ainsi des masques à deux sociétés, dont l’une, Avrox, est une société anonyme basée au Luxembourg, dont on ne sait rien ou presque.

Erika Vlieghe

Désignée comme directrice du groupe d’experts qui doit préparer le déconfinement, elle a été formée à l’Universtité de Leuven, comme la plupart de ses confrères qui conseillent les politiques. Elle dirige le département de médecine générale interne, maladies infectieuses et médecine tropicale à Anvers. L’Institut des maladies tropicales (Institute of Tropical Medicine, ITM) est notamment financé par la Fondation Bill & Mélinda Gates[note]. Le 2 mai, dans Le soir, Erika Vlieghe anticipe : « On travaille déjà sur un plan de reconfinement »[note] ; le 4 mai dans La DH : « Erika Vlieghe met les Belges en garde : «Il ne faut pas faire preuve de trop d’enthousiasme» »[note]. Travaillant pour un organisme en partie financé par une fondation privée qui encourage la vaccination dans des intérêts pécuniaires évidents, les certitudes et recommandations d’Erika Vlieghe sonnent curieusement quand elle annonce « nos vies seront différentes jusqu’à la découverte d’un vaccin ».[note]

Emmanuel André

Désigné porte-parole interfédéral de la crise du Covid-19, il est avec Marc Van Ranst médecin et responsable du laboratoire de diagnostic au Pôle des maladies infectieuses de l’hôpital UZ Leuven. L’hôpital UZ Leuven bénéficie de larges donations de la Fondation Bill & Mélinda Gates. La dernière connue, 713.372$ pour « filtrer la librairie Reframe contre le Covid-19 »[note]. L’équipe, sous la direction de Marc Van Ranst et Johan Neyts, travaille main dans la main avec la Fondation privée : « Au nom de la Fondation Bill & Mélinda Gates, l’équipe du professeur Neyts testera également 15.000 ingrédients actifs dans les médicaments existants et en développement pour leur efficacité contre le SRAS-CoV‑2. CD3 (Center for Drug, Design & Development) et Johnson & Johnson mettent également des milliers de ces composants à la disposition du laboratoire »[note].

Emmanuel André est à l’origine d’un groupe, Bacteriology Axis[note], qui entretient des liens étroits avec l’OMS et est à l’origine de la formation d’une Start-up dénommée Savics. Il y est présenté sur le site internet comme « conseiller ». Le directeur et co-fondateur de Savics, également actionnaire de celle-ci, est Xavier Morelle. Intéressant que cette SPRL domiciliée à Uccle, explique sur son site internet qu’elle possède « 3 outils qui peuvent aider dans la lutte contre le virus Covid-19. Nos applications sont utilisées dans de nombreux pays depuis plusieurs années pour la surveillance et la gestion des maladies infectieuses, comme la tuberculose, le VIH, Ebola et maintenant nous avons adapté notre technologie pour répondre également à la situation actuelle du Covid-19. Nous pouvons aider les pays à gérer les défis concernant la surveillance et le suivi du Covid-19 en ces temps exigeants, afin que les travailleurs de la santé, les laboratoires et les spécialistes puissent se concentrer sur les endroits où ils sont le plus nécessaires, en traitant les patients ».

En résumé, Emmanuel André est conseiller d’une société privée, Savics, fondée par son groupe de recherche associé à l’Université de Louvain, Bacteriology Axis, qui propose des outils pour « gérer les défis concernant la surveillance et le suivi du Covid-19 »… Un peu de privacy.

Inge Bernaerts

Elle est titulaire d’un diplôme en droit de la Katholieke Universiteit Leuven et d’un Master en droit européen de l’Universität des Saarlandes, avocate au barreau de Bruxelles, et a exercé le droit européen de la concurrence dans des cabinets d’avocats internationaux de premier plan comme Stibbe et Freshfields Bruckhaus Deringer. Inge Bernaerts a travaillé pour la Commission européenne à la direction générale de la concurrence, dans le domaine des télécommunications et de la radiodiffusion, puis comme assistante du directeur général de la concurrence. Elle a rejoint la direction générale de l’énergie en juillet 2010 en tant que chef d’unité du marché intérieur II : marchés de gros, électricité et gaz, et était en charge de la mise en œuvre de la législation relative au marché intérieur de l’énergie dans l’UE[note]. Concurrence, marché, compétitivité. Amen.

Pierre Wunsch

Gouverneur de la Banque Nationale de Belgique, où le père de Sophie Wilmès, Philippe Wilmès, fut également régent, Pierre Wunsch, proche du MR, a été directeur de la cellule stratégique du cabinet du ministre des finances Didier Reynders (de 2008 à 2011). Bien intégré dans les différentes structures financières nationales, mais aussi internationales (BCE, FMI, BRI…), il a eu des fonctions chez Electrabel, Tractebel, au Bureau fédéral du Plan, a notamment été administrateur chez Fluxys, au conseil d’administration de KBC, et enseigne à l’UCL.

Mathias Dewatripont

Comme Pierre Wunsch, il débarque également de la Banque Nationale de Belgique où il a notamment occupé le poste de directeur exécutif. Il est spécialisé dans les domaines de la théorie des contrats, de l’économie des organisations, de l’innovation, de la banque et de la finance. Il est membre exécutif de I3H, une organisation qui travaille dans le domaine de la santé « pour contribuer efficacement au développement de technologies et de stratégies innovantes ».

Johnny Thijs

Sur le site de la ministre, on le présente comme « administrateur et président d’entreprises comme Electrabel, de Recticel et de Golazo », oubliant de dire qu’il est aussi président du conseil d’administration de Corealis et d’Hospital Logistics, conseiller de Lazard Benelux et CVC. Quelques intérêts dans la finance et la santé… Johnny Thijs a été CEO de Bpost entre 2002 et 2014.

Marius Gilbert

À côté de ces hommes et femmes « d’affaires », Gilbert Marius n’aura qu’à bien se tenir. Quand un journaliste lui demande « Ne craignez-vous pas qu’à force de fréquenter le GEES, ce groupe d’experts dont un certain nombre sont plus proches de la Bourse que de l’hôpital, vous soyez finalement victime d’une forme de syndrome de Stockholm ? », il répond : « Je trouve que la question est un peu orientée ! ». Pourtant, face à Johnny, Mathias ou Pierre – le pouvoir économique –, on voit difficilement le bien commun gagner la partie.

Marc Van Ranst, GSK, etc.

À l’époque Président du Commissariat interministériel « Influenza », le Professeur Marc Van Ranst, qui publiera un rapport favorable à la vaccination des nourrissons contre la gastro-entérite à rotavirus, reconnaîtra un conflit d’intérêts: il percevait une rémunération de GlaxoSmithKline (GSK). Peu après, « il cosigne, avec notamment Patrick Goubau, virologue à l’UCL et membre du Comité scientifique «Influenza», un article cofinancé par GSK. Dans le comité, quatre autres membres ont des liens avec le privé: subvention de centres de recherche, conférence et consultance rémunérée, bourse… GSK et les lobbies des vaccins sont partout »[note]. À l’époque, un tiers des scientifiques qui avaient recommandé que le gouvernement achète le vaccin anti-H1N1 avaient des liens avec GSK, multinationale pharmaceutique qui a bénéficié du contrat avec le gouvernement. Celui-ci mettra au point 12,6 millions de doses, pour un marché de 110 millions €, sur conseil de groupes d’experts.

Lors de la formation du groupe de travail pour l’élaboration d’une vision stratégique de déconfinement, ou GEES, Marc Van Ranst est de nouveau là parmi les 9 élus. Oubliées ses anciennes amours, il n’œuvrerait désormais que pour le bien public.

C’est que GSK est partout. En février 2020, le PTB demandera la démission de Pascal Lizin, à la fois Président de la Société fédérale de participations et d’investissement (SFPI) et directeur chez GSK comme principal responsable du lobbying. SFPI, qui prit ce nom alors que la Société fédérale d’investissement (SFI), au sein de laquelle Philippe Wilmès a été administrateur, absorbait la Société fédérale de participations (SFP). Que fait la SFPI, organisme public ? Principalement deux choses : elle est à la fois une société d’investissement et un holding public. Particulièrement intéressant : la SFPI élargit ses « priorités stratégiques », en 2012. Parmi les « opportunités d’investissement que recherche la SFPI » : « Vesalius Biocapital I (fonds d’investissement — innovations médicales) », où a travaillé Philippe de Backer.

CV de Philippe De Backer: « just privacy »…

Étrange coïncidence, n’est-ce pas ? Pascal Lizin est encore et toujours à l’heure d’aujourd’hui directeur du SFPI[note]. Comprenez donc bien que c’est un lobbyiste haut gradé de GSK qui dirige une structure publique en charge de décider de l’orientation des investissements tirés de l’argent du contribuable, et ceci en pleine crise du Coronavirus et avec un gouvernement doté de pouvoirs spéciaux. Pascal Lizin avait déjà auparavant indiqué où étaient ses intérêts quand il avait appuyé la loi de déduction fiscale sur les revenus des brevets, qui permettra à GSK de ne payer que 0,1% d’impôt.

De Backer et le privé

Un lien relie donc Philippe de Backer, que la Première ministre Sophie Wilmès nommera responsable de la task force en charge de la recherche de matériaux indispensables à la lutte contre le Corona[note], et le SFPI. Celui-ci a travaillé chez Vesalius Bio Capital[note] qui se définit comme une société qui investit « dans des sociétés attrayantes, en phase de développement, dans le développement de médicaments, de dispositifs médicaux et de diagnostics et dans la santé en ligne et la santé mentale, principalement en Europe. Les sociétés de notre portefeuille répondent à des besoins médicaux et commerciaux non satisfaits et opèrent sur la base d’une forte protection de la propriété intellectuelle ». Avant de rejoindre le Parlement européen, Philippe De Backer a travaillé comme responsable du transfert de technologie et comme analyste commercial, dans différentes sociétés de capital-risque spécialisées dans les sciences de la vie[note], notamment le Centre de Recherche Public de la Santé (CRP-Santé). Le CRP-Santé s’occupe notamment de la sécurisation des droits de propriété intellectuelle, y compris les brevets et les droits d’auteur, de la commercialisation des droits de propriété intellectuelle et de la négociation de contrats avec des sociétés pharmaceutiques. Il n’est dès lors pas étonnant que Patrick Florent, administrateur de GSK Vaccines en Belgique, partage avec enthousiasme les articles de presse évoquant les accords du gouvernement belge avec GSK, et le zèle que Philippe De Backer a mis pour que cela soit mené bon train.

3. Mêmes « erreurs »,ou même stratégie

Dans la situation, on ne voit pas bien les garde-fous qui permettraient d’éviter les « erreurs » de 2009, alors que l’État belge avait signé un accord secret avec GSK, sur recommandations du Comité scientifique Influenza (CSI), dont Mark Van Ranst était président. À l’époque, la déclaration des conflits d’intérêts avait été refusée sous l’argument du « respect de la vie privée ». Cela rappelle les propos de la ministre Wilmès, lors de la conférence de presse du 15 avril : « Je rappelle que les gens sont libres de travailler, de changer de carrière et de s’engager pour le bien commun, peu importe ce qu’ils ont fait avant. Je peux vous garantir que ce n’est pas la société pour laquelle vous travaillez qui fait de vous l’homme ou la femme que vous êtes. C’est en tout cas la liberté fondamentale à laquelle on croit encore dans notre pays, fort heureusement ». 

Vesalius Biocapital Arkiv (VBA), étroitement lié à De Backer, est affiliée à ING, la Région flamande et Parthoens. Ses actionnaires sont Vesalius Biocapital I SA Sicar (50,09%, Luxembourg), Arkimedes-Fonds (49,9%) et Vesalius Biocapital Partners SARL (0,01%).[note] VBA a des participations dans Biotechnological Enzymatic Catalyse, Ncardia (dont l’État belge et la province de Liège sont actionnaires) et dans Promethera Biosciences dont la Région wallonne et la société d’investissement et de financement du Brabant wallon sont actionnaires (SOWALFIN); la Sowalfin, elle-même affiliée au groupe Ackermans & Van Haaren (AVH). Pour info, Denis Pierrard patron d’IPM, quittera à une époque le groupe qui édite le quotidien La Libre Belgique, pour rejoindre Ackermans et Van Haaren (AvH) qui se définit comme créatrice de « valeur pour l’actionnaire en investissant à long terme dans un nombre limité de participations stratégiques avec un potentiel de croissance internationale ». Luc Bertrand, membre fondateur du Cercle de Lorraine, est Président de AvH et sa fille, Alexia Bertrand, en est une des administratrices, mais aussi ancienne cheffe de cabinet du vice-premier ministre Didier Reynders. À l’époque, des conflits d’intérêts avaient été dénoncés.

Le groupe Parthoens est une structure trouble dont Alain Pathoens est notamment actionnaire. Cet ancien de Nestlé, Monsanto/Searle, PWC, est co-fondateur de Newton Biocapital[note], société belge de venture-capital. Dans l’équipe de cette société qui investit dans des sociétés thérapeutiques, de diagnostic, de dispositifs médicaux, de nutrition clinique et de biotechnologie numérique, des « anciens » de chez Johnson & Johnson, Janssen, Monsanto, Pfizer, ATB Therapeutics, Bioxodes, Synergia Medical, des fonds d’investissement et de capital-risque (KBCPE, Capricorn Venture Partners, QBIC Venture Partners). Alain Parthoens travaille également chez Vesalius Bio Capital, mais a aussi été directeur d’investissement chez ING à Bruxelles, elle aussi affiliée à Vesalius.

La SFPI, société publique belge, avait mis, comme on l’a vu, via Pascal Lizin, Vesalius dans ses investissements stratégiques. Il a aussi placé ses billes dans Newton Biocapital qui « dispose déjà d’engagements pour des dizaines de millions d’euros en actions de la part de Belfius Insurance, de la Société Fédérale de Participations et d’Investissement (SFPI, Belgique) et de Sambrinvest (la société de participation wallonne). »[note] Si ça ce n’est pas du détournement d’argent public, ou comment un lobbyiste de GSK favorise le privé via une structure publique, le SFPI, qu’il dirige.

Le plus extraordinaire est que Vesalius Biocapitale Arkiv est situé au 67 de la rue Ducale, en face de la chancellerie de la Première ministre et du bunker où l’on nous empêche d’entrer pour poser nos questions depuis le 24 avril. 

« Merci, Madame Wilmès », vivent les pouvoirs spéciaux !

« Le gouvernement fédéral et l’industrie pharmaceutique belge ont décidé d’intensifier leurs efforts dans la lutte contre le Covid-19 »[note]. C’était le 26 mars. Ils n’auront pas traîné. Dans la plénière du Parlement le même jour, la Première ministre tient le discours habituel, « avec au centre des préoccupations l’humain ». Pendant qu’elle nous parle d’humains, elle négocie avec le patronat de l’industrie pharmaceutique : c’est que le coronavirus promet de gros sous, autre chose que le H1N1. Une perspective de vaccin planétaire, ce n’est pas tous les jours que ça tombe.

Sur le site de la Première ministre, les CEO des entreprises pharmaceutiques remercient le gouvernement fédéral, qui a notamment accepté de ramener à 4 jours le délai requis avant le lancement d’essais cliniques sur les vaccins et les nouveaux médicaments[note]. Cette décision a été prise « dans le cadre de la plateforme R&D Biopharma : « Concrètement, il s’agira d’accélérer les procédures afin de lancer des essais cliniques dans notre pays pour de nouveaux vaccins et traitements contre le Covid-19 et d’augmenter la capacité de dépistage en permettant que les tests des patients atteints du virus puissent avoir lieu dans les laboratoires des sociétés pharmaceutiques ».

« Nous nous félicitons de la décision de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) d’autoriser le lancement des essais cliniques ultra rapidement, en 4 jours seulement (!). C’est essentiel pour les entreprises pharmaceutiques ». Celle qui parle, Catherine Rutten, est depuis 2013, CEO de pharma.be, « l’association des entreprises biopharmaceutiques innovantes en Belgique ». Elle a été membre du Conseil de l’Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT) jusqu’en 2013, organisme qui, en plein coronavirus, déclarait : « concernant l’introduction de la nouvelle technologie 5G, l’IBPT propose, en l’attente d’un accord politique entre le gouvernement fédéral et les entités fédérées, d’octroyer des droits d’utilisation provisoire »[note]. Intéressant quand on sait qu’elle intègre le Conseil d’administration de Proximus en 2013, rejoignant notamment Stefaan De Clerck et Karel De Gucht[note]. Membre de Women on board, sponsorisé par Proximus, Axa, Belfius, Delhaize, BNP Paribas, Capgemini, Banque de Luxembourg, Alstom…, association qui « promeut l’accès des femmes à des rôles de direction au sein des entreprises belges (public et privé) » ; soit, une plateforme où l’on échange de bons procédés, qui masque l’inégalité sociale profonde sous le manteau d’une illusoire égalité des sexes. Exit la femme de ménage.

Karel Van De Sompel, Directeur général de Pfizer Belgique et Président de pharma.be : « À l’heure actuelle, Pfizer s’investit pleinement pour trouver un antiviral et un vaccin contre le Covid-19. Nous espérons obtenir des résultats cette année encore. Nous mettons tout en œuvre pour que les patients belges puissent en bénéficier dans les plus brefs délais ». Quelle sollicitude… Karel Van De Sompel est Président du conseil d’administration de Pharma.be[note], succédant à Sonja Willems (voir ci-dessous), directrice générale de Janssen Belgique et Pays-Bas ; lors de sa nomination, avec sa collègue Vice-présidente, ils ont déclaré : « En collaboration avec le conseil d’administration, nous allons travailler sans relâche au renforcement de la position de l’industrie avec l’objectif de faire du secteur innovant de la santé un pilier stratégique de l’économie belge. » Suite à cette intronisation, Catherine Rutten remerciera les nouveaux arrivants. Un petit cercle entre amis.

Sonja Willems, Directrice générale de Janssen Belgique et Pays-Bas : « Grâce à une coopération poussée et unique en son genre entre les autorités fédérales, les administrations et notre personnel, nous préparons – en partant de rien – un laboratoire de biologie moléculaire de haute technologie opérationnel et entièrement automatisé; et cela, en 10 jours seulement. Ce laboratoire nous permettra d’augmenter considérablement notre capacité de dépistage du Coronavirus en Belgique. C’est du jamais-vu dans l’histoire de Janssen » Du « jamais vu ». Le coronavirus a du bon pour Janssen. Prédécesseure de Karel Van De Sompel comme président du Conseil d’administration de Pharma.be, elle est aussi membre de Women on Boards.

Patrick Florent, Administrateur Délégué de GSK Vaccins, n’est pas moins enthousiaste sur le site internet de la Ministre : « Ces dernières semaines, GSK a collaboré de manière approfondie avec les autorités fédérales afin d’augmenter considérablement la capacité de dépistage du Covid-19. Nous avons été agréablement surpris par la manière dont le gouvernement fédéral gère cette situation. L’augmentation du nombre de dépistages de 2.500 à 10.000 par jour nous amènerait au même niveau que l’Allemagne per capita, généralement considérée comme étant le meilleur élève de la classe. En outre, GSK continue d’étudier la possibilité d’élargir encore la capacité de dépistage si nécessaire ».

Philippe De Backer, ministre et ancien de chez Vesalius Biocapital, s’en félicite : « C’est un avantage énorme que nous avons en Belgique de pouvoir compter sur GSK en tant que leader mondial de la santé basé chez nous. Nous sommes extrêmement reconnaissants de cette aide gratuite (sic) et cruciale qui nous aidera, tous ensemble, à faire face à la pandémie. »[note] Patrick Florent, formé à L’Université catholique de Louvain, ancien Président de European Vaccin Manufacturer, actuellement membre du conseil d’administration de Qualivax et Japan Vaccine Company, Président du Conseil d’administration de Tianyuan… partage sur Linkedin les articles et déclarations de Philippe De Backer ou de Sophie Wilmès.

Le baron Jean Stéphenne, bien implanté dans les milieux universitaires et politiques, comme ses autres acolytes, ancien vice-président et manager général de la multinationale pharmaceutique GSK, mais aussi président du CA de Nanocyl, spin off des universités de Liège et Namur, envoyait le 9 avril un mail intitulé « Soutenez la recherche menée à l’UCLouvain ». Il avait l’indécence de demander aux citoyens de soutenir financièrement l’UCL : « Afin d’amplifier encore l’impact de ces projets, l’UCLouvain a besoin de vous. Merci de soutenir les recherches menées par les chercheurs dans notre université ! ». Ou comment demander de l’argent au citoyen pour pouvoir s’en faire encore plus.

Didier Malherbe, administrateur délégué d’UCB Belgique dira : « Grâce à l’excellente collaboration entre les entreprises et les autorités, l’initiative de ses employés et sa force de partenariat scientifique, UCB multiplie les initiatives de lutte contre le coronavirus et ses conséquences ». La collaboration est excellente en effet, d’autant plus quand on sait que Bart Vermeulen, ancien d’UCB, propriété des trois richissimes familles Boël-Janssen-Solvay, travaille au cabinet de Maggie De Block comme responsable de la politique des médicaments. Bart Vermeulen, qui a aussi été économiste en chef chez Pharma.be, économiste à l’autorité belge de la concurrence est, comme la plupart, issu de l’Université Catholique de Leuven.

Le vers est dans le fruit

Cela ne semble jamais pouvoir s’arrêter… Alors que l’on citait sans cesse l’Organisation mondiale de la Santé ces dernières semaines, on oubliait de signaler que cette dernière était infestée de lobbyistes dont les financements provenaient principalement de donateurs privés, dont Bill Gates et les industries pharmaceutiques représentent les principaux. Dans les années 80, l’OMS, soumise à la pression des industriels, déclara le glyphosate « sans danger ». En 1994, l’organisation accepta de multiplier par 200 la teneur en résidus chimiques autorisée dans le soja génétiquement modifié, ce qui permit à Monsanto de gagner énormément d’argent.

Lors de l’épisode de la grippe H1N1, les laboratoires pharmaceutiques ont gagné des millions d’euros[note]. Chez nous, en plein Covid-19, l’Union professionnelle belge des médecins s’offusquait du fait que le gouvernement belge décida « que les tests SARS-CoV‑2 seraient effectués non pas par les laboratoires de biologie clinique agréés, mais par les laboratoires de l’industrie pharmaceutique, sous prétexte d’élargissement des capacités (…) Ces laboratoires agréés sont aujourd’hui écartés sans préavis par des firmes industrielles et des collaborateurs qui ne satisfont pas aux exigences à remplir pour effectuer ces tests »[note]. Est-ce étonnant au vu de la composition des équipes politiques censées travailler pour nous ?

Bill Gates déclara 2010 la décennie des vaccins, lui qui dira en 2011 devant l’Assemblée nationale de la santé : « Pays donateurs, vous devez accroître vos investissements dans les vaccins et l’immunisation, même si vous faites par ailleurs face à des crises budgétaires. (…) Vous, les 193 États membres, devez faire des vaccins le point central de votre système de santé. »[note] Au détriment de quoi ? Découvrant qu’une plante, l’artemisia, avait de meilleurs effets contre le paludisme que les médicaments industriels et coûteux, un médecin chercheur français qui a réalisé sa thèse sur l’artemisia, « raconte la réaction de ses supérieurs au moment des résultats de son travail : constatant que les tisanes avaient un meilleur résultat que les médicaments habituels, le jury a expliqué au thésard que les firmes pharmaceutiques risquaient de couper leur soutien financier aux chercheurs »[note]. Le chercheur a été remercié.

Le 30 mars 2020, on trouve sur la page de la Fondation Bill et Mélinda Gates, un article qui annonce que « The Therapeutics Accelerator, une initiative développée par la Fondation Bill & Mélinda Gates, Wellcome, et Mastercard pour accélérer la réponse à l’épidémie de Covid-19 en identifiant, évaluant, développant et élargissant les traitements », octroie 20 millions de dollars en subventions initiales pour financer des essais cliniques. Cet argent ira officiellement à trois institutions – l’Université de Washington, l’Université d’Oxford et l’Institut La Jolla pour l’immunologie – « pour financer des essais cliniques afin d’identifier des immunothérapies très puissantes contre la pandémie de Covid-19 »[note]. La Fondation Bill et Mélinda Gates, située à Seattle, est dirigée par le PDG Mark Suzman et le co-Président William H. Gates Sr., sous la direction de Bill and Mélinda Gates et le milliardaire Warren Buffett. Avec le Covid-19, la Fondation demande explicitement « un effort de financement collaboratif du secteur privé, des organisations philanthropiques et des gouvernements », tout en admettant que le privé ne pourra rien faire sans les États.

En avril 2020, Le Vif/L’express s’associait à l’UCLouvain pour nous informer. Le premier, propriété du groupe Roularta, avec Xavier Bouckaert à sa tête, licencié en droit notarial de… l’UCL, membre du Cercle de Lorraine, se liait donc avec l’université bénéficiaire habituée des dons de l’OMS et de la Fondation Bill et Mélinda Gates, cette dernière ayant versé 713.372$ à l’UCL en mars 2020, lui ayant par ailleurs commandé une grande étude sur le Coronavirus.[note] Alors que « la Fondation du milliardaire philanthrope entend accélérer la mise sur le marché massive de vaccins contre le coronavirus »[note], nous nous demandons quelles seront les choix éditoriaux de ceux qui se lient avec les financiers pour nous informer…

Ne plus espérer. Agir

Les politiques, ceux-là mêmes qui créèrent en Belgique un « comité stratégique » composé du seul milieu patronal, censé « préparer notre pays à la prochaine décennie », en réalisant « une série d’investissements urgents au cours des prochaines années » lors d’un Pacte national pour les investissements stratégiques, vont-ils répondre aux défis qui se posent devant nous, demandant justice sociale et une indispensable sortie d’un système productiviste mortifère, dont dépend l’avenir de l’humanité ? Les médias mainstream, ceux que le porte-parole de la ministre appelle « les grands acteurs médiatiques du paysage belge », propriétés des plus grosses fortunes, auront-ils intérêt à informer les gens dans le sens du bien commun ou dans celui des actionnaires ? Au vu des éléments qui précèdent, nous pouvons répondre avec certitude que non. Les instances politiques éviteront à tout prix que la vérité soit révélée et masqueront leurs censures sous les oripeaux de spécieuses « règles démocratiques », comme celle des pools[note]. Il est dès lors nécessaire de traiter de complotistes ceux qui dénoncent les collusions politiques avec le privé, plutôt que de donner les informations qui nous permettraient  d’agir et de reprendre en main la maîtrise collective de notre destin.[note]

Patrons et politiciens, préparant notre avenir…

Cela ne semble donc jamais pouvoir s’arrêter. À moins que nous en décidions autrement…

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Kairos 45

La question était simple, consistant à savoir « quelle légitimité démocratique il y a à prendre certaines décisions quand la plupart des membres qui décident et réfléchissent font partie des multinationales et du monde de la finance ». Nous étions le 15 avril, lors de la conférence de presse suivant le Conseil National de Sécurité, en pleine crise du Coronavirus. Si cette question ne nécessitait pas un talent particulier pour qu’on puisse la comprendre, nous n’attendions toutefois pas véritablement de réponse, sachant que celle-ci était pour eux impossible : on ne peut assurer conjointement le bien commun et les retours sur investissement, dans le domaine de la santé peut-être encore davantage. Il s’agissait donc de donner la preuve, à un moment où l’audience était à son comble – ce qui ne nous est jamais donné en tant que média libre –, que leur discours n’est que gesticulation spectaculaire, sorte de plan de com pour occulter ce qu’ils sont et qui ils servent réellement. 

Quand on demande à une ministre diplômée de communication à l’IHECS, option pub, porteuse d’une licence spéciale en gestion financière, ministre du Budget dans le gouvernement Michel, ancienne conseillère d’un bureau d’avocats d’affaires, issue d’une famille proche du monde politico-financier[note], dont le père fut membre fondateur du Cercle de Lorraine[note], au cœur du pouvoir donc[note], quand on lui demande donc ce qu’elle pense de cet incestueux mélange entre mondes public et privé, on n’escompte évidemment pas qu’elle fasse pénitence et congédie sur-le-champ ses collègues pour conflit d’intérêts. Il ne peut y avoir de réponse, de motivation acceptable et de justifications, et cela explique que notre présence n’est plus désirée à une conférence de presse du gouvernement. Notre question du 15 avril a suffisamment bouleversé les lignes. La réaction aussi parle d’elle-même, alors que la ministre est surprise et décontenancée, un peu comme si on lui avait servi le dessert avant l’entrée. Vous conclurez vous-mêmes, après lecture de cet article, si ceux qui nous dirigent sont au service du bien commun ou ne représentent plus qu’eux-mêmes et leurs amis patrons et banquiers. 

« Conflit d’intérêts » ? Ce concept est inexistant pour quelqu’un qui considère que la politique sert les intérêts du capital. Elle l’exprimera clairement, lorsqu’au cours de mon interpellation du 15 avril, Sophie Wilmès m’interrompra : « Monsieur, je n’ai pas l’intention de vous interrompre (sic), mais si vous avez l’intention de donner les CV de l’entièreté des gens qui travaillent et qui ont droit à un peu de privacy, je vous encourage à terminer votre question et j’y répondrai ». Un peu de privacy donc, entendez qu’elle considère que le fait de savoir quelles peuvent être les éventuelles motivations personnelles de ceux qui nous dirigent à prendre des décisions politiques, fait partie du domaine de la vie privée : fantastique retournement du concept d’intérêt général. 

1. MÉDIAS ET POLITIQUE 

Dans cette théâtralisation de la réalité, « les grands acteurs médiatiques du paysage belge[note] » sont les garde-fous qui protègent les politiques de toutes questions qui pourraient briser leur jeu de représentation. Il n’y eut donc qu’une tentative de notre part le 15 avril, et la recherche fébrile de Sophie Wilmès pour m’empêcher de tenter un deuxième coup, soit de poser une deuxième question[note], tendant le cou et tournant la tête pour trouver le « bon » journaliste et la question conforme, illustre parfaitement le processus d’adéquation entre la pensée politique et médiatique, qui s’inscrivent dans un cadre bien défini où l’on veut s’assurer que celui qui écoute et voit, le spectateur, ne bougera surtout pas – il ne faudrait pas qu’il sente ses chaînes. Évoqueront tout autant ces ententes tacites médias-politique : le refus du ministre-président Jeholet de répondre à ma question le soir du 24 avril[note], le silence du service de presse de la ministre Wilmès face à nos multiples mails et appels téléphoniques, le mutisme encore de celle-ci face aux courriers envoyés par des citoyens l’invitant à s’expliquer sur le refus de notre présence en conférence de presse. Pourtant, comme le dira une de nos lectrices : « Elle annonce sur son site “être à l’écoute”… ». Effets d’annonce justement… procédés de com, où l’on constate que plus on se dit à l’écoute, moins on entend. 

(…)

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Articles

Combattre le virus à la matraque

Police, violence et confinement : des récits différents

« A Paris, si tu respectes pas le confinement on te met une amende, en banlieue on te coupe la jambe »Lyna Malandro[note]

Pendant le
confinement, nous avons tous ressenti l’augmentation de la pression
policière. Les patrouilles incessantes des voitures de police, le
bruit assourdissant des sirènes à longueur de journées, les
messages d’avertissement diffusés dans les haut-parleurs, et en
France, les contrôles réguliers pour vérifier les attestations
… À
l’heure du déconfinement, ce renforcement de la présence
policière est toujours une réalité, et paradoxalement, il en
découle un fort sentiment d’insécurité, ainsi qu’une méfiance
accrue à l’égard des agents de police. Il faut dire que cette
situation a quelque chose de kafkaïen :
qui aurait-pu un jour imaginer que s’asseoir sur un banc serait
passible d’une amende de 150 euros ? Qu’il faudrait une
attestation pour sortir acheter son pain ? Comme le personnage
du Procès,
on finit par avoir l’impression d’être coupable
d’exister, et les rencontres avec la maréchaussée prennent des
proportions démesurées. Le plus pervers est probablement la
rhétorique culpabilisante mobilisée pour justifier l’infraction,
comme si en nous asseyant sur ce banc, nous portions sur les épaules
le poids de tous les morts des derniers jours.

L’éthique de
la responsabilité individuelle

Il n’est nullement
question ici de remettre en cause le bien-fondé ou la nécessité
des mesures de confinement, mais la distribution d’amendes pour
non-respect de ces mesures a quelque chose d’invariablement
grotesque,
à partir du moment où l’on considère qu’il s’agit d’un
moyen de transférer la responsabilité politique vers celle de
l’individu, confié à la surveillance des forces de l’ordre afin
que personne ne nuise au reste de la société en bravant le
confinement. Autrement dit, l’omniprésence policière est devenue
le moyen de faire peser la responsabilité sur les citoyens plutôt
que sur les mauvaises décisions de la classe politique, et de
véhiculer le dogme d’une responsabilité individuelle plutôt que
d’une responsabilité collective
(mais
après tout,
qu’est-ce que le collectif, puisque ce n’est pas la somme
de toutes les individualités ?). En parallèle de la peur de la
contamination, nous avons donc développé une forme de culpabilité
exacerbée qui nous prend à la gorge dès que nous sortons ou que
nous croisons des amis : nous nous sentons coupables, et ce
sentiment est très largement renforcé par l’omniprésence des
uniformes. 

Des récits
différents

Néanmoins, il ne faudrait pas croire que nous sommes tous logés à la même enseigne : même s’il se fait plus souvent contrôler par les « flics » depuis le début du confinement, un blanc ne sera jamais un noir ou un arabe aux yeux de la police. Et vice-versa. « Je suis d’origine étrangère, mais j’ai la chance d’être blanche et de vivre dans un quartier assez calme, donc je ne me fait pas contrôler par la police tant que je n’ouvre pas la bouche », me confiait récemment une amie d’origine portugaise. Ces propos illustrent ceux de la journaliste et militante Rokhaya Diallo au micro de l’émission politique la Perm du média Parole d’honneur[note], lorsqu’elle évoque la narration différenciée du confinement entre les quartiers aisés et les quartier populaires : «  Il y a une différence à la fois de traitement mais aussi de narratif, on a pu le voir au tout début du confinement lorsqu’on décrivait les habitants des quartiers populaires comme étant indisciplinés, alors qu’on parlait d’autres personnes qui avaient simplement envie de prendre l’air. »

Crédit photo: RTL-TVI 

Les médias participent largement à créer et à véhiculer le récit selon lequel les habitants des quartiers populaires seraient « indisciplinés » et incapables de respecter les consignes de confinement qu’ils seraient, de toute façon, dans l’incapacité de comprendre. Ainsi, dans un article du Monde intitulé « Coronavirus : dans les quartiers populaires, l’incompréhension face aux mesures de confinement », un journaliste rapporte :

« «  « La chose a du mal à être prise au sérieux, il y a beaucoup d’incompréhension, observe Larbi Liferki, président de Parkour59, à Roubaix (Nord). Il va falloir déborder d’imagination pour les faire rentrer chez eux. » [on relèvera au passage le lapsus révélateur … ] Même constat dans lesquartiers nord d’Asnières (Hauts-de-Seine) où Zouhair Ech Chetouani, leader associatif qui se dit « très inquiet » du non-respect des consignes et décrit des situations qui « partent en vrille ». »[note]

Blancheur,
traitement de faveur

Outre le fait qu’elle témoigne d’un mépris de classe et de race, cette rhétorique condescendante véhicule une représentation biaisée des freins qui empêchent les habitants des quartiers populaires de se plier aux mesures de confinement. En effet, l’article du Monde met l’accent sur les « habitudes qui ont la peau dure » (« grappes de jeunes dans les stades de foot municipaux, adolescents qui fument la chicha aux pieds des immeubles, mères avec de jeunes enfants aux agrès… » ), s’attarde sur la fracture du numérique, évoque brièvement la situation des familles nombreuses dans des logements exigus (trois lignes seulement)… mais oublie de dire que si les habitants des quartiers populaires ne respectent pas les mesures de confinement, ce n’est pas par incompréhension ou par manque de discipline, mais avant tout parce qu’ils sont nombreux à devoir continuer de travailler pour nourrir leur famille, et ne peuvent pas se payer le luxe du confinement. Comme l’exprime clairement le sociologue Saïd Bouamama, auteur d’un travail sur le traitement médiatique du confinement dans les médias[note] : « Le discours sur « l’incivilité » et « l’irresponsabilité », c’est-à-dire la logique de moralisation, permet de masquer les réalités économiques et matérielles. Ils attribuent à des comportements individuels ce qui est le résultat de contraintes liées aux conditions d’existence. » Bien que ces contrevenues aux mesures de confinement soient pourtant plus légitimes dans les quartiers populaires, elles ne sont pas interprétées de la même manière dans les quartiers privilégiés, où lorsque des promeneurs bravent le confinement, on conviendra qu’ils « n’ont pas pu résister à l’appel du soleil »[note] , tandis que les premiers seront taxés de délinquants. Selon le philosophe Norman Ajari, l’exemple de l’évacuation de la messe de Pâques clandestine à St Nicolas du Chardonnet[note], sans que personne ne soit verbalisé à l’exception du prêtre, est tout à fait révélateur de ce différentiel narratif en faveur des populations privilégiées (de religion chrétienne qui plus est !).

Les violences
policières ne se confinent jamais

Au regard de la logique de responsabilisation individuelle évoquée au début de cet article, le danger de cette narration différenciée, c’est qu’elle fait passer certains comportements des personnes qui vivent dans les quartiers défavorisés pour une atteinte à la santé collective, ce qui permet ainsi de dé-responsabiliser les politiques de la situation dans ces quartiers et de légitimer la présence policière. Autrement dit, comme l’explique Patrick Simon[note], directeur de recherche à l’INED et spécialiste des questions de la socio-démographie des minorités : « On avait ainsi déduit que la sur-mortalité en Seine Denis n’était pas liée à tous les critères évoqués [d’ordre socio-économique] indépendants du comportement exact des personnes, mais était liée au fait que ces personnes ne respectaient pas le confinement […] donc ils ne pouvaient s’en prendre qu’à eux-mêmes. Or ce discours prépare le terrain de couverture et de répression policière bien plus importantes. » En effet, ces récits différenciés entraînent inévitablement des traitements différenciés, et c’est notamment ce qu’illustre le cas du jeune Adil, 19 ans, qui a perdu la vie le 10 avril dernier à Anderlecht, percuté par un véhicule de police dans le cadre d’une course-poursuite : « Nous pensons que ce confinement n’a fait qu’exacerber et légitimer des inégalités de traitement à travers des comportements de la part de certains policiers envers les personnes racisées et issues de quartier populaires »[note], se voit-on expliquer dans une vidéo intitulée « Justice pour Adil ». Pour Rokhaya Diallo et Grace Ly du podcast Kiffe ta Race[note], l’histoire d’Adil est loin d’être un cas isolé et ressemble à s’y méprendre à celle d’un jeune nommé Sofiane en France, dans l’Essone : ayant pris la fuite devant la police, il s’est fait rattraper puis a été violemment tabassé sans aucune justification. Plus récemment, un homme d’origine Égyptienne poursuivi par la police s’est jeté dans la Seine[note] et a fait l’objet de violences policières agrémentées de propos racistes proférés par les policiers qui l’ont repêché : « Un bicot comme toi, ça nage pas ! », « Tu aurais dû t’attacher un boulet au pied ». Selon la militante Amal Bentoussi du collectif Urgence Notre Police Assassine « depuis le début du confinement on assiste à une recrudescence des violences policière, à un acharnement et à un défoulement des populations qui vivent en banlieues alors que rien ne justifie cette violence ».

Un héritage
colonial

Ces bavures policières, qui suivent toujours le même schéma, sont révélatrices d’un système d’oppression que les personnes racisées ont intégré au plus profond d’elles-mêmes et qui explique que l’omniprésence policière liée au covid-19 soit encore plus difficile à vivre dans les quartiers populaires, où la vision des uniformes suscite la crainte et la méfiance, étant donné le recours systématique à la violence. Autrement dit : si les plus privilégiés d’entre nous commencent à ne plus supporter le va et vient incessant des fourgonnettes blanches et bleues, alors quid des personnes issues de minorités ou habitants des quartiers populaires ? Et quand bien même il ne s’agirait que d’une présence passive, celle-ci ne prend pas la même signification dans les quartiers favorisés, où la police est synonyme de sécurité, que dans les banlieues, où les traumatismes liés aux forces de l’ordre se superposent par couches, et se transmettent de génération en génération. En creusant plus loin dans cette sédimentation des traumatismes, on remonte jusqu’à l’époque coloniale où les relations entre l’armée et les colonisés étaient très violentes. Selon la psychologue Malika Mansouri, « les révoltes urbaines prennent racine dans le passé colonial »[note]. Dans la même logique, on pourrait dire que le rapport aux forces de l’ordre est lui-même un héritage du passé colonial et relève, lui aussi, d’une narration différenciée… et douloureuse. Commencer par admettre ce passé colonial et reconnaître leur responsabilité dans les violences infligées aux peuples colonisés pourrait ainsi constituer l’ébauche d’une solution pour aborder la question des violences policières dans les pays comme la France ou la Belgique. Peut-être une piste pour « l’après » ?

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« Il faut refuser le traçage numérique »

Nous relayons ici une lettre ouverte envoyée aux parlementaires fédéraux, wallons et bruxellois, datée du 12 mai 2020.

Alors que se met en place un déconfinement progressif attendu par tous, nous tenons à attirer votre attention sur les risques inhérents à une mesure préconisée par certains pour limiter la diffusion du coronavirus et éviter un rebond de l’épidémie.

Il s’agit bien sûr du traçage numérique, lequel permet d’identifier les relations interpersonnelles des individus grâce à leur smartphone et à une application faisant appel au système Bluetooth. Si le traçage numérique ne semble pas avoir les faveurs des autorités régionales pour le moment, il reste bien présent dans la tête de certains experts et responsables politiques. 

L’adoption
d’un cadre légal pour son utilisation éventuelle confirme bien
que cette « solution » reste d’actualité. Or, il faut insister
sur le caractère intrinsèquement dangereux de cette technologie,
dangereux pour nos libertés individuelles, le respect de la vie
privée et l’utilisation de nos données personnelles à notre
insu.

Certes,
tout le monde s’accorde à dire que le système serait basé sur le
volontariat ; mais dans la mesure où son fonctionnement est présenté
comme nécessitant un taux de participation élevé pour être
efficace, la pression sociale exercée sur les récalcitrants risque
vite d’être insupportable. Dès lors qu’on s’installe dans un
climat de peur d’une nouvelle vague de contamination, la tendance à
la soumission l’emportera sur toute autre considération. Rien ne
permet de garantir dans ce contexte que le système ne deviendra pas
à terme obligatoire.

L’atteinte
à la vie privée par le traçage numérique est manifeste puisque
non seulement les relations interpersonnelles mais les déplacements
de toute personne participante sont connus au travers des échanges
continus entre son smartphone et les objets connectés rencontrés.

Est tout aussi manifeste le transfert de la responsabilité citoyenne à un outillage technique contrôlé par une bureaucratie sanitaire. En cas de déplacements interdits, la voie est ouverte pour un système de sanctions automatiques. On nous objectera que les balises juridiques et les garde-fous techniques sont aptes à éviter ou, à tout le moins, à limiter les « inconvénients » précités. Nous nous permettons de faire remarquer que, aux dires même de chercheurs et experts non suspects de technophobie, les garde-fous techniques s’avèrent très fragiles.

Selon Maarten Van Steen, professeur en réseaux informatiques à grande échelle à l’Université de Twente (Pays-Bas), le Bluetooth est d’une grande imprécision et inapte à évaluer la distance réelle entre deux utilisateurs[note]. En outre, comme tous les systèmes, le Bluetooth est piratable et de nombreuses failles de sécurité sont régulièrement découvertes. La dernière est très récente. En février 2020, Google a publié un correctif pour une faille critique qui touche le sous-système Bluetooth d’Android et permet de prendre le contrôle de tout appareil vulnérable à portée. Les spécialistes ont alors conseillé aux utilisateurs d’Android de désactiver le Bluetooth en attendant de recevoir la mise à jour[note].

Par ailleurs, en ce qui concerne l’anonymisation des données collectées, elle est considérée par certains experts comme une protection illusoire[note]. Quant aux balises juridiques, l’Histoire nous apprend qu’elles sont souvent « adaptées » face à la marée du progrès technique « conçu pour nous protéger ».

Enfin,
un autre risque préoccupant est celui de la discrimination instaurée
par le système : toute personne ne disposant pas d’un smartphone
ou n’acceptant pas l’application pourrait se voir refuser
l’accès au travail ou à certains lieux publics.

On
entre tout droit dans le totalitarisme technologiste, d’autant plus
insidieux qu’il se dissimule derrière l’objectif respectable de
protection de la santé publique alors que l’efficacité du système
est loin d’être garantie.

En
conclusion, nous prétendons que le traçage numérique est une
technologie virulente pour une société démocratique, respectueuse
des droits fondamentaux et de la dignité humaine. Ses avantages
prétendus sont très hypothétiques et reposent avant tout sur la
soumission de tous et l’abandon de toute responsabilité
individuelle.

Nous
demandons en conséquence de refuser cette prétendue réponse
sanitaire et de vous prononcer contre toute proposition visant à la
faire adopter.

Signataires

Paul Lannoye, député européen honoraire, docteur en sciences physiques Marie-Christine Coene, citoyenne Martine Dardenne, sénatrice honoraire, romaniste Michèle Gilkinet, ancienne parlementaire fédérale. Michèle Goedert, architecte Geneviève Hilgers, historienne Armel Job, écrivain Gérard Lambert, économiste Nathalie Lannoye, juriste Viviane Lardinois, biologiste Francis Leboutte, ingénieur civil Bernard Legros, enseignant Jean-Marie Martin, économiste Sylviane Roncins, thérapeute familiale Pierre Stein, sociologue du développement. Inès Trépant, politologue Catherine Uyttenhove, docteur en biologie Daniel Zink, philosophe

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Journalisme et responsabilités gouvernementales

L’interpellation de la Première ministre par le rédacteur en chef de Kairos a entraîné des réactions variant entre l’indifférence, le mépris ou les critiques sur la forme[note]. Sur le fond très peu de réactions. Aucune solidarité n’a été apportée de la part des autres médias.

La question posée n’était pas diffamatoire, déplacée ou agressive pour le gouvernement. Nous assistons actuellement à une crise sanitaire, sociale, économique et politique d’importance majeure. Or, le gouvernement a des devoirs et des obligations envers la population. Des violences policières sont perpétuées en toute impunité dans les rues par des policiers (aboutissant notamment au décès du jeune Adil[note]), les personnes âgées sont délaissées dans les maisons de repos ainsi que dans les hôpitaux lorsque la capacité d’accueil est atteinte. Pourtant, lorsque des questions qui remettent en cause la responsabilité du gouvernement sont posées, celui-ci ne juge pas utile d’y répondre sérieusement et préfère éviter toute remise en cause.

Cette
semaine Kairos,
par l’entremise de son rédacteur en chef, a tenté de participer à
la
conférence
de presse du 24 avril. Il a été tout simplement écarté
par le service de presse, usant de raisons non valables. L’avocate de
Kairos
a procédé à une mise en demeure à laquelle la chancellerie n’a
pas répondu, comme la loi l’exige. Il était d’ailleurs étonnant
de constater hier une présence policière absente les semaines
précédentes… 

Vous
avez dit quatrième pouvoir ?

Ne dit-on pas que la presse est le quatrième pouvoir ? De très nombreux citoyens et citoyennes en doutent et ces inquiétudes ne participent pas vraiment à renforcer des « démocraties » bien fragiles. Si les médias constituent réellement ce contre-pouvoir, comment expliquer qu’un non-événement – une question politique sur les choix du gouvernement en pleine crise sanitaire – soit vu par tant de personnes comme un exploit [note].

Que publiaient les « grands » médias, ou plus spécifiquement sur RTL TVI en cette soirée du vendredi 24 avril, suite à la fameuse conférence de presse? : https://www.rtl.be/info/belgique/societe/coronavirus-en-belgique-dernieres-infos–1213763.aspx : « Vous retrouverez dans cet article les décisions du Conseil national de sécurité, réuni ce vendredi à partir de 14h30, et les dernières informations liées à la pandémie ». Parmi d’autres titres, « Déconfinement : voici les mesures décidées lors du Conseil national de sécurité », « Déconfinement: voici les changements pour la pratique du sport », « Déconfinement: « Quand pourra-t-on rendre visite à notre famille ? » », « Réouverture des écoles à partir du 18 mai: voici les détails pratiques ». Une série d’informations disponibles d’abord sur le site du gouvernement fédéral, sont relayées sur le site d’une des grandes chaînes de télé avec une mise en forme plus attirante.

Finalement
un premier
article légèrement critique sur la manière d’organiser le
déconfinement pointe le bout de son nez samedi matin, mettant en
doute notamment le nombre de tests quotidiens4.

Du
côté de la RTBF, à part un communiqué
de la Ligue des familles sur l’inquiétude pour les parents de
jeunes enfants face à ce plan de déconfinement, hier soir on
pouvait lire des articles « pratiques » similaires à
ceux de RTL.

Béatrice
Delvaux était heureuse d’annoncer sur La Première ce samedi matin
que le journal Le
Soir
sortait un numéro « Spécial guide du déconfinement »…
Au même moment, un article
relatant la satisfaction du patronat est publié sur le site du
Soir.
Notons que l’on peut consulter également sur le site internet du
journal des articles narrant
une journée de la première ministre. 

Bien sûr, la pratique journalistique requière également du recul et il vaut mieux éviter les réactions à chaud afin de proposer des analyses critiques savamment réfléchies. Néanmoins après 6 semaines de crise, les différents enjeux de la situation et surtout l’amateurisme de ce gouvernement sont connus. Si critiques il y a elles sont la plupart du temps convenues ou ciblées sur des personnes ou des affaires ponctuelles mais rarement touchant à un système, à des politiques (anti)sociales et économiques que l’on peut aisément qualifier d’irresponsables. Il ne devrait pas être interdit de sortir du cadre… Pourtant, si l’on prend en compte la manière dont est traité un journaliste remettant en cause les choix majeurs pris par le gouvernement, c’est à l’évidence le cas. 

Il
semble y avoir une confusion entre le travail des communicants des
services du gouvernement et le travail de certains journalistes. Qui
questionne les enjeux et les perspectives de la situation sanitaire,
économique et politique présente
si les journalistes ne le font pas, ou en tout cas à la marge ?

Quelles
priorités?

Alexandre
Penasse
est décrit comme un complotiste pour avoir uniquement osé émettre
des doutes sur l’impartialité de conseillers du gouvernement du fait
de leur lien avec des entreprises commerciales. Tous les soirs à
20h00, les JT diffusent des images de la population qui applaudit aux
fenêtres et balcons, pour remercier le courage du personnel
hospitalier qui se démène sans moyens… Le confinement est vécu
très différemment selon les classes sociales, les quartiers, le
travail, les origines et les situations de vie. Alors que des gens
meurent principalement du fait de l’incurie de l’État, la question
essentielle, est-elle quand peut-on aller faire du sport, aller au
magasin, ou que Walibi réouvrira ?

La question principale ne serait-elle pas plutôt, comment organiser une reprise de l’activité économique s’il n’est pas prévu antérieurement un refinancement complet du secteur de la santé? Marius Gilbert, épidémiologiste et membre du groupe d’experts auprès du gouvernement l’a exprimé lui-même à la rtbf, la pression économique a été priorisée au détriment de la santé. Les politiques ont été à l’encontre des avis des experts scientifiques. 

Les deux questions qui étaient prévues et qu’Alexandre Penasse n’a pas pu poser:

1)
« Vous
dites qu’il faut se serrer la ceinture et qu’il va falloir faire des
efforts, or il existe des alternatives aux politiques d’austérité
imposées
aux populations. Il s’agit de suspendre le remboursement de la dette
en utilisant l’argument d’état de nécessité5.
Pourquoi ne pas envisager cette solution ? »

2) « Allez-vous mettre des moyens humains et techniques pour stopper l’évasion fiscale ? Car empêcher la fuite fiscale permettrait de ramener l’argent des paradis fiscaux et de réinvestir dans le secteur de la santé ? »6

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Kairos 44

LE COVID-19 ET
SON (IM)MONDE

Si la situation actuelle devait nous enseigner une vérité, c’est sans doute celle que c’est à la mesure d’une modification obligée de nos « habitudes » que nous pouvons prendre le temps de nous arrêter et de penser. Mais a‑t-on vraiment modifié toutes nos habitudes, sachant que celle qui consiste à s’informer, par le biais des mêmes médias qu’avant, a crû davantage ? Il est donc également probable que des chocs comme celui que nous vivons, puissent avoir l’effet inverse. 

Le coronavirus n’est-il pas une forme d’apothéose de tout ce qu’il se passe depuis longtemps, qui s’inscrit cyniquement et « normalement » dans les productions d’une société qui a fait primer l’hybris (la démesure) sur le bien commun. Selon d’où l’on se situe, on pourra donc dire que rien ne va dans notre société, mais d’un autre point de vue, que tout fonctionne très bien. Dans le premier cas, on nommera les écarts indécents entre riches et pauvres qui se creusent irrémédiablement, les catastrophes naturelles qui augmentent de par leur nombre et leur ampleur, la disparition de la flore, la dramatique sujétion de la vie humaine aux algorithmes et aux écrans, la sixième crise d’extinction des espèces, etc. Dans le second, on constatera que les multinationales n’ont jamais été aussi puissantes, les médias concentrés aux mains des élites financières et autres grosses fortunes, que les dividendes pleuvent sur des riches de plus en plus riches, que la destruction est créative de richesses, concentrées, avant tout. Et que malgré tout cela, nombreux croient encore en la théorie du ruissellement. 

De cette situation, ceux qui ont intérêt à ce que rien ne change tireront profit. La réussite de leurs affaires dépendra de la réaction de la classe moyenne prise en étau entre les « premiers de cordée » et ce qu’il reste des classes populaires. Quel en sera l’épilogue, nous n’en savons rien. Mais l’apathie générale et l’ambivalence d’une petite bourgeoisie qui se contente de ce qu’on lui propose, troquant toute velléité de révolte contre un city-trip ou le dernier gadget made-inFoxconn, ne présage rien de bon. Pessimiste vous direz ? Il est trop tard pour penser en ces termes, établissant seulement que tout n’a mené à rien ; que les exigences étaient trop pauvres ; que l’espoir était trop présent et opportun. À l’heure qu’il est, on fait fi de l’espoir, prétexte à ne rien faire. On agit. 

Il est dont utile ici de procéder à une forme de synthèse, qui fera grincer les thuriféraires de « l’appel aux gouvernants », qui ne gouvernent plus rien du bien commun depuis des décennies, mais se contentent juste d’assurer leur plan de carrière, et donc de façon subséquente et logique, de garantir la pérennité du capitalisme, dont la fin n’est qu’une accumulation, qui ne peut prendre fin, si nous y participons, que sur la dévastation de la Terre qui nous accueille. 

Les propos raviront toutefois ceux qui luttent bien seuls depuis longtemps pour faire entendre autre chose que les psaumes de l’église de la croissance, relayés par leurs diocèses médiatiques. Ces derniers ont tous les âges, mais la tendance à considérer les pensées hétérodoxes comme désuètes leur accole fréquemment l’épithète de « vieux ». Certes, il peut y avoir quelque chose de valorisant à se voir qualifier de la sorte par des fidèles qui assurent la fin de l’humanité par leurs certitudes quotidiennes. 

Il faudra donc débuter par la fin qui éclaire le commencement : si Coronavirus il y a et si réactions médiatisées de ce type se font jour, elles ne sont que l’aboutissement de ce que nous sommes, de ce que nous avons fait, et de où nous en sommes. Rien de plus, et c’est même assez simple en fin de compte. Les élites occidentales ont toujours pu compter sur une classe moyenne qui ne voulait en rien perdre de ses prérogatives. Celle-ci a donc toujours fulminé de manière affectée, laissant l’illusion de la confrontation tout en assurant en off sa propre perpétuation. Les syndicats, l’aide au développement, les ONG et associations diverses, les Parlements, ne sont que les reliquats d’une lutte qui a perdu de sa radicalité, devenus même iindispensables tant ils servaient de faire-valoir au système dominant. Il fallait feindre l’opposition, en ne s’opposant toutefois plus aucunement aux fondements du système qui leur permettait même d’exister. Les autres, révoltés, avaient prouvé, dans les zones qui constituaient nos réservoirs de matières premières et de mains‑d’œuvre, que la réelle opposition n’avait qu’une seule issue : létale. Biko, Allende, Sankara, Lumumba…, en sont le témoignage. Pendant ce temps, la généralisation du vote illusionnait le peuple qu’il participait du collectif, surtout dupe de ce tour de prestidigitation qui avait fait accepter cet oxymore d’une « démocratie participative », parce qu’il pouvait désormais jouir des fruits de la consommation marchande. 

Soit, les révolutions abouties n’ont toujours été que bourgeoises. Pourquoi en changerait-il ? Nous débuterons par là, en commençant par un préliminaire toutefois, qui tentera de montrer que quelle qu’ait été la volonté d’aboutir à la crise coronovarienne présente, l’intention importe au fond peu, et c’est peut-être cela le pire : l’orgiaque est ce qui nous organise depuis longtemps, peu importe qu’il soit voulu ou non, il fait partie intrinsèque d’un mode d’organisation sociale, il en est donc sa création, toujours sa forme aboutie. L’occasion fait le larron, et tout choc fait stratégie. Le seul problème présent est que la conflagration touche ceux qui, habituellement, sont à l’abri. Avant, hier, il ne nous gênait pas trop de consommer les objets et les vêtements montés et cousus par des esclaves asiatiques, ou d’envoyer nos restes électroniques en Afrique. On le savait, l’important n’était et n’est toujours pas l’information, mais la volonté d’être libre, qui implique celle de penser. Elle se meurt, et la génération « smartphone » en signe peut-être la fin. 

La suite sera une tentative d’explication non-exhaustive de ce fait pérenne que, toujours et encore, rien ne change vraiment, donc que tout s’aggrave, et que se perpétue sans fin, et c’est là sa pure logique, le « changement dans la continuité ». Nous nous arrêterons sur cette pratique à l’innocuité estampillée pour l’ordre en place, que sont ces applaudissements quotidiens pour le corps médical. Cela nous offrira une transition idéale, nous permettant de questionner la médecine bureaucratique que ne peut interroger un simple claquement de mains, fourre-tout bruyant bien sympathique « positif » dans la novlangue. Donc inoffensif. 

Il faudra terminer en rappelant que le neuf n’a rien de nouveau et que l’inédit ne se pare de ces habits que pour nous faire oublier qui nous sommes et pourquoi nous y sommes. Aujourd’hui, « nous sommes tous Covid-19 ». Saurons-nous en tirer les conclusions, ou, comme le disait le lucide Jaime Semprun, s’évertuer encore et toujours à « ne pas conclure » ? 

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Quand la Commission européenne se fie … au diable

Black Rock : c’est quoi ? Rien à voir avec la musique. C’est une compagnie. Comme cette appellation est usurpée ! La compagnie, c’est manger le pain ensemble, c’est se côtoyer, c’est le groupe, la réunion, le cercle. Mais le mot désigne aussi un opérateur économique, une réunion de capitaux, et même une troupe militaire, un bataillon, une unité d’assaut.

J’ai déjà évoqué dans ce journal[note] l’existence de groupements financiers puissants. Après tout, il en faut bien un qui soit le plus grand. Ce doit être Black Rock. Dans l’actualité récente, il s’est fait remarquer en inspirant le plan Macron de réforme des retraites (ouvrir plus large la porte de la capitalisation en serrant à la gorge les « bénéficiaires » de la répartition). Le Fonds vise à optimiser le rendement de votre investissement, en combinant croissance du capital et revenus des actifs du Fonds. Normal. Le Fonds investit au moins 70% du total de son actif dans des titres de créances. Ils comprennent les obligations et les instruments du marché monétaire. Les titres de créances peuvent être émis par des États, des organismes d’État des marchés émergents, ainsi que des sociétés et des entités supranationales (telles que la Banque asiatique de développement) domiciliées, ou exerçant la majeure partie de leurs activités, dans des marchés émergents. Normal.

Mais, mais, j’ai dû me pincer quand j’ai appris que la multinationale financière américaine a remporté un contrat avec la Commission européenne pour étudier comment l’UE pourrait intégrer au mieux les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans sa supervision bancaire. « Cette proposition était la meilleure offre techniquement et financièrement, en regard de l’appel d’offres », explique le porte-parole de l’UE.

Pour
éclairer la politique sur la finance durable, la Commission a donc
porté son choix sur le plus gros investisseur mondial en énergies
fossiles ! BlackRock est l’un des principaux investisseurs
dans le pétrole. La multinationale détient des parts énormes dans
des entreprises d’énergies fossiles. Il s’est opposé ou abstenu
à l’issue de 82% des résolutions concernant le climat dans les
entreprises dont il possède des actions.

Positionnement
en France

Ce sont des stratèges redoutables qui s’imposent comme prestataires pour les investisseurs institutionnels. La crise financière de 2008 a été l’occasion pour Black Rock de ratisser des portefeuilles en perdition, puis de faire le tri entre les actifs toxiques et les potentiels. Black Rock possède un outil de décision capable de « bouger » sans délai par rapport à n’importe quelle action. Ils s’y connaissent donc en sortie de crise. Mais que la Commission européenne les choisisse pour trouver une nouvelle perspective chez les opérateurs financiers européens… ça m’en bouche un coin. C’est comme si l’entraîneur du Standard demandait à celui d’Anderlecht de lui donner la stratégie à adopter durant le derby.

La
Commission Européenne, ça te fait un Green Deal dans un bureau et
ça te fait un Kill Dream dans le bureau d’à côté. Ça pousse le
glyphosate et le bio, le nucléaire et le solaire, la voiture propre
et
les moteurs menteurs, la coopération avec l’Afrique et les traités
d’exploitation de l’Afrique, et à la fin, ce sont les opérateurs
de très grande taille qui gagnent.

Pour
les amateurs de tourisme des sites lobbyistes (ça existe), Black
Rock a un bureau à Bruxelles, Square de Meeus, 35, entre Luxembourg
et Trône.

Mais
pourquoi je m’affole ? Charles Michel est là, il a de grande
mains, le crâne libre et la confiance des grands. Pas confiné pour
deux sous, le voilà qui promet : « Avec
la présidente de la Commission, je travaille à une feuille de route
et un plan d’action pour assurer le bien-être de tous les Européens
et le retour d’une Union à la croissance forte, durable et inclusive
basée sur une stratégie verte et digitale ».
Madré le bougre !

Addendum 

Pour situer l’influence mondiale de Black Rock, on signalera que cette « compagnie » vient d’obtenir un contrat avec la FED (Réserve fédérale monétaire américaine) pour l’examen des dettes de différents opérateurs, dettes qui doivent être rachetées par la Réserve dans le cadre de la relance US suite à la crise du coronavirus. Le fonds sera donc en première ligne pour conseiller et… opérer. C’est un cas relativement inédit de privatisation (mondiale) de la politique monétaire et de la définition de l’intérêt général.

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Lettre ouverte à la Ministre Sophie Wilmès

par Initiative citoyenne

Questions au gouvernement belge sur le coronavirus, le confinement et les futurs vaccins.

A Madame Sophie Wilmès, Première Ministre

Copie à : Mesdames et Messieurs les Ministres de la Santé en Belgique

Madame la 1ère Ministre, nous essayons de comprendre les mesures contradictoires et souvent contraignantes qui sont prises depuis quelques semaines, notamment par votre Gouvernement. Certes, nous n’ignorons pas les difficultés auxquelles les dirigeants du monde entier, sont confrontés. Aussi, modestement, nous espérons que nos questions participeront à trouver les meilleures solutions pour sortir démocratiquement de la crise dans laquelle nous sommes plongés. 

Nous souhaitons recevoir de votre part des réponses claires et concrètes à nos préoccupations, convaincus qu’elles sont aussi partagées par bon nombre de personnes, que ce soit le personnel soignant soumis à rude épreuve ou le simple citoyen.Constitué en 2009, à l’occasion de la grippe AH1N1, notre collectif citoyen Initiative Citoyenne, avait déjà posé une série de questions sur l’adoption d’une loi d’exception, les contours de la notion de « pandémie », ainsi que sur les implications en termes de libertés et d’information en matière de santé, que ce soit sur la maladie ou les traitements et vaccins.La publication, en 2010, du contrat secret d’achat de vaccins H1N1 entre l’Etat belge et GSK[note], ainsi que la mise en cause du rôle de l’OMS par le Conseil de l’Europe[note] avaient démontré la pertinence initiale de nos questions, de même, hélas, que les nombreux effets secondaires du vaccin H1N1 reconnus dans la littérature médicale, comme la narcolepsie[note].

Avec la crise du coronavirus, nous assistons à une panique sans précédent à l’échelle du monde et aussi à des mesures inédites de restriction des libertés publiques, comme celles de déplacement et de rassemblement, pourtant garanties par notre Constitution.

1. Pouvez-vous Madame la 1ère Ministre définir pour nous tous ce qu’est une « pandémie » ?

En effet, en 2009 déjà, l’OMS avait gommé de sa définition la nécessité d’un grand nombre de morts pour le déclenchement de l’alerte maximale[note] et en 2013, le Quotidien du Médecin nous informait que l’Organisation changeait une nouvelle fois sa façon de procéder et qu’elle « simplifiait son système d’alerte » (avec 4 phases : interpandémie, alerte, pandémie, transition, interpandémie,…)[note] Qu’en est-il donc à l’heure actuelle? 

2. Pouvez-vous nous préciser « qui est l’OMS » ?

a) Quelle est la part de financement du secteur privé dans le financement de l’OMS ?

b) Qui décide précisément, au sein de l’OMS, de déclarer une « pandémie », à qui revient ultimement cette décision en cas de désaccord ? Et quelle est la marge de manœuvre des Etats dès lors que cette décision est prise ? 

c) Quel est d’après vous le rôle des experts ? L’OMS tient-elle compte des conflits d’intérêts potentiels dans sa sélection d’experts, et comment concrètement ? 

d) Que pensez-vous de la suggestion récente qu’aurait lancée un directeur de l’OMS de voir des professionnels de santé commencer à aller faire du porte-à-porte pour aller débusquer les personnes infectées à leur domicile et les placer en isolement[note] ?

e) Malgré le rôle de « coordination » de l’OMS, il faut constater qu’il n’y a pas d’uniformité des mesures prises par les différents Etats européens[note]. Par conséquent, que vous inspirent ces mesures en sens divers pour une politique dans notre pays ? 

3. Quelques points de la « gestion belge » de cette crise : 

a) Qui décide quoi, vu les différentes structures et comités dans un pays comme le nôtre où on dénombre 9 ministres responsables de la Santé ? (Centre National de Sécurité ? Sciensano ? Risk Management Group ? GEES ? autre ?) Pouvez-vous rendre publiques les activités ou occupations de chacun des experts belges en charge de ce dossier et nous dire sur quelle base vous évaluez leurs éventuels conflits d’intérêts ?

b) Plusieurs acteurs de renommée internationale ont émis des avis moins alarmistes sur la crise du coronavirus. Pourriez-vous nous dire si vous avez tenu compte de l’avis de tels experts et médecins de terrain et sinon, sur quelle base les avez-vous écartés ? Tels : La Société française de médecine générale : « une dramatisation qui n’a pas lieu d’être »[note]; Le Pr François Bricaire, infectiologue, membre de l’Académie française de Médecine : « une inquiétude exagérée »[note]; Le Pr Didier Raoult, infectiologue spécialiste des coronavirus : « une hystérie mondiale »[note]; Le Dr Eric Cua, infectiologue au CHU de Nice : « 99% des patients guérissent. Ce n’est pas un virus qui va décimer la population, on connait ce virus »[note]; Le Dr Wolfgang Wodarg, pneumologue et épidémiologiste allemand, ancien expert auprès du Conseil de l’Europe : « Il faut une commission d’enquête dans ce dossier du coronavirus »[note]

c) Nous sommes confrontés à une véritable « guerre » des chiffres, avec des projections et des décomptes journaliers sur lesquels les pouvoirs publics se basent pour décider du confinement et de l’évolution des mesures à prendre. Ces chiffres sont pourtant sujets à caution et évolution, comme l’a, par exemple, montré le « rétropédalage » récent de l’épidémiologiste Neil Ferguson (Imperial College of London) dont le modèle d’évolution du coronavirus a été pris comme référence par la plupart des États[note]. Pourriez- vous dès lors nous expliquer la façon dont vous établissez ou jaugez la fiabilité des chiffres de malades et de mortalité en Belgique ( ?) alors que :- l’ensemble de la population n’est pas testée — jusqu’à 80% des infections pourraient être asymptomatiques selon les données chinoises ![note] — 20 à 40% des décès attribués au Covid-19 en Belgique n’ont même pas fait l’objet de tests[note] — il est difficile de départager précisément ceux qui meurent avec le Covid-19 de ceux qui meurent du Covid-19[note]

d) Pourriez-vous nous rappeler en temps normal le nombre de gens qui décèdent en Belgique chaque jour(toutes causes confondues), et par exemple à cette saison ?N’a‑t-on jamais connu, avant cet épisode de coronavirus, de pics de mortalité (par exemple liés à des infections respiratoires, ou à d’autres causes)? 

e) Quelles mesures avez-vous prises pour éviter pareille incurie, à propos de l’absence de masques ? Pour rappel, un stock de 6 millions de masques (FFP2), a été détruit en février 2019[note], sans être remplacé.

f) Pouvez-vous nous expliquer les raisons de l’Arrêté royal du 17 mars 2020 par lequel un membre de votre gouvernement interdit explicitement le recours aux tests de détection rapide du coronavirus pour une durée de 6 mois et ce, alors même qu’à cette date, il était déjà connu que les pays qui avaient le plus procédé aux tests avaient les taux de mortalité les plus bas (Corée du Sud, Allemagne, etc.)[note] ? En l’absence de tels tests, des hôpitaux comme l’AZ VUB (Brussel) recourent systématiquement à des scanners thoraciques (irradiants) pour tester et « trier » les patients, exposant ainsi plus de 9 patients sur 10 inutilement aux radiations[note] ! Pouvez-vous nous décrire les différents tests présents, à venir, et leur degré de fiabilité respectifs ? Et nous dire également pourquoi avoir écarté les laboratoires de biologie clinique agréés au profit des firmes industrielles[note] ?

g) S’agissant des traitements, des moyens de prévention et des facteurs de risque, pourquoi votre gouvernement ne met-il pas à disposition des patients et des médecins une information suffisamment plurielle et indépendante alors que 70% des patients sont en faveur d’un remboursement standard des médecines complémentaires[note] ? Pourquoi par exemple ne pas dire à la population (dont 70% est carencée en vitamine D) que le risque d’hospitalisation pour Covid-19 est majoré chez les gens manquant de cette vitamine[note] ? Pourquoi ne pas mettre à disposition des hôpitaux et des médecins/patients de la vitamine C pour perfusions intraveineuses alors que ce traitement remarquablement sûr a déjà démontré son efficacité et est utilisé dans des hôpitaux chinois et américains[note] ? Pourquoi ne pas signaler aux patients vaccinés contre la grippe saisonnière que selon une étude de l’armée américaine, leur vulnérabilité au coronavirus est ainsi accrue de 36%[note] et dès lors, décider de modifier les futures recommandations vaccinales contre la grippe avant l’hiver prochain ? 

4 . Pouvez-vous nous dire ce qu’est, pour votre gouvernement, « le confinement » ?

a)Cela consiste-t-il à museler les libertés, empêcher l’accès aux soins, autres que ceux prévus pour le coronavirus, empêcher la justice de fonctionner, les écoles d’enseigner, les familles de se retrouver ? 

b)Comment expliquez-vous que certains pays « survivent » sans confinement (Suède, Biélorussie, Taïwan, Corée du Sud, etc…)[note]?

c)Comment votre gouvernement prend-t-il en compte l’impact psychologique du confinement sur les populations (un Belge sur deux serait en difficulté psychologique[note] !), lequel constitue une source de morbidité sérieuse pesant sur la population générale, mais aussi l’abandon de soins vis-à-vis de toute une partie déjà fragilisée de la population (malades chroniques, personnes atteintes de maladies rares et de handicaps divers) dont les consultations sont annulées, et les opérations reportées, au péril de leur santé et au nom de la seule obsession du coronavirus[note] ?

d)Comment expliquez-vous toutes les mesures impopulaires et préoccupantes qui sont en train de passer à la va-vite et de façon beaucoup plus commode à présent que les gens sont confinés et moins à même de protester (installation de la 5G dont les dangers sont pourtant dénoncés par des milliers de scientifiques dans le monde[note]et ce alors qu’une large partie de la population y est catégoriquement opposée[note] ; appels à la fin du cash[note] voire interdiction pure et simple du liquide dans plusieurs magasins de première nécessité ; perspective d’un tracking de plus en plus serré des personnes au nom de leur « sécurité »[note]…) ?

5. Quelle politique en matière de « vaccins » ? 

La plupart des gouvernements attendent « comme un messie » le vaccin qui sauvera le MONDE ! C’est ainsi que le Ministre des Finances Alexander De Croo a récemment justifié le versement par la Belgique de 5 millions d’euros au CEPI, la Coalition pour les innovations en matière de préparation pandémique. Mr De Croo a en effet déclaré que la CEPI va commencer les essais cliniques d’ici 4 mois et « qu’il n’y a pas de temps à perdre » car ça pourra sauver des vies[note]. Eu égard à la « mortalité modérée » (cf. propos du Dr Charlotte Martin, CHU St Pierre[note]) du Covid-19, comment pouvez-vous être d’emblée si sûrs qu’un vaccin élaboré dans un délai aussi rapide ne créera pas plus de décès et de maladies comme cela s’est déjà vu avec d’autres vaccins (H1N1, dengue, etc.)[note] ? Sur quelle base avez-vous choisi d’investir 5 millions d’argent public alors que le virus mute[note], qu’il y aurait 8 souches différentes du virus[note], que la question de la réinfection possible des patients n’est toujours pas résolue[note], et que plusieurs experts ont d’ores et déjà pointé des préoccupations majeures : 

Le fait que des étapes essentielles d’évaluation de la sécurité (sur animaux) seront court-circuitées au motif de l’urgence[note], celles permettant notamment de vérifier si les vaccins ne peuvent pas donner lieu à des flambées de la maladie, ce qui est parfois possible.

Le fait que le vaccin peut créer une sensibilisation des patients vaccinés les rendant beaucoup plus à risque de complications et de réactions mortelles en cas de rencontre ultérieure avec le virus[note] (comme cela s’est vu par exemple aux Philippines, avec le vaccin de Sanofi contre la dengue qui avait aussi été recommandé par l’OMS mais qui a créé un scandale d’Etat[note]).

Le fait que des publications scientifiques antérieures sur des vaccins anti-coronavirus aient fait état de dégâts immunologiques au niveau pulmonaire[note].

Le fait que plusieurs projets de vaccins (Moderna, CureVac, etc.) recourent à une technologie inédite,impliquant l’ usage d’ARN ou d’ADN, méthode aux risques inconnus qui pourrait donner lieu à des risques d’auto-immunité et de mutations génétiques irréversibles dont l’importance ne pourra être jaugée qu’après une expérimentation à large échelle sur des populations-cobayes[note]…Cautionnez-vous le futur chantage vaccinal qui se profile avec les propos récents de Madame Ursula vonder Leyen, selon lesquels il faudra limiter les contacts avec nos seniors tant que le vaccin n’est pas disponible[note] ? Pouvez-vous déjà nous garantir le respect de la loi du 22 août 2002, c’est-à-dire le droit au consentement libre et éclairé des patients ? Art.8. § 1er. Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable. […] § 2. Les informations fournies au patient, en vue de la manifestation de son consentement visé au § 1er, concernent l’objectif, la nature, le degré d’urgence, la durée, la fréquence, les contre-indications, effets secondaires et risques inhérents à l’intervention et pertinents pour le patient, les soins de suivi, les alternatives possibles et les répercussions financières. Elles concernent en outre les conséquences possibles en cas de refus ou de retrait du consentement, et les autres précisions jugées souhaitables par le patient ou le praticien professionnel, le cas échéant en ce compris les dispositions légales devant être respectées en ce qui concerne une intervention.

6. Comment concevez-vous la notion de démocratie sanitaire ? 

Cette notion importante de « démocratie sanitaire » vous paraît-elle encore possible dans un contexte où on retrouve, par exemple, un même intervenant comme Bill Gates à autant d’étages et de niveaux différents ?Vous paraît-il sain et admissible qu’une personne, fût-elle très riche, soit en mesure d’avoir une telle influence sur les politiques de « santé » du monde, alors qu’il n’a eu de cesse, lui-même, de nous annoncer des pandémies imminentes ? Ainsi, Bill Gates n’est-il pas à la fois : 

un proche de l’actuel Directeur général de l’OMS, bien avant sa nomination en 2017[note] le second plus gros donateur de l’OMS depuis des années[note] un contributeur financier de la CEPI, déjà mentionnée plus haut (créée en 2017)[note] un des partenaires-clés, avec sa fondation, de l’ « Event 201 », exercice sur table de préparation à une pandémie mondiale de coronavirus organisé en partenariat avec le Forum de Davos et l’Université John Hopkins le 18 octobre 2019, quelques semaines avant que la pandémie ne soit annoncée[note]… un investisseur important dans des firmes comme CureVac, Moderna et Innovio qui travaillent sur un vaccin anti-coronavirus avec différentes technologies génétiques ADN/ARN[note] celui qui annonce que le vaccin contre le coronavirus ira d’abord aux professionnels de santé[note] celui qui décrète qu’il n’y aura plus de grands rassemblements tant que les gens ne seront pas vaccinés[note] – le Lancet plaidant à présent dans le même sens[note] celui qui évoque la perspective de certificats digitaux destinés à savoir qui est naturellement immunisé ou vacciné[note] (cf. projet ID 2020 parrainé par l’ONU et soutenu par sa fondation, via le GAVI[note]) — celui qui finance le dispositif du MIT de « carnet de vaccination » invisible et injectable par vaccin, recourant aux nanotechnologies et en mesure de différencier les vaccinés des autres[note] celui qui apporte son soutien à un plan d’un milliard de dollars (sic) pour couvrir la terre de satellites de vidéosurveillance[note] celui qui nous annonce à présent qu’il va investir massivement pour faire construire à la hâte 7 usines qui produiront les 2 vaccins anti-coronavirus ultimement les plus prometteurs[note] celui qui finance aussi une étude sur le coronavirus à la KUL[note] Madame la 1èreMinistre, vos réponses à nos préoccupations sont primordiales, dans le contexte de ladite pandémie qui permet de mettre en place et ce pour tout un chacun, la réduction de nos libertés fondamentales. 

Nous souhaitons vous exposer une dernière réflexion. En 1945, Georges Bernanos écrivait : « Le jour n’est pas loin peut-être, où il nous semblera aussi naturel de laisser notre clé dans la serrure, afin que la police puisse entrer chez nous, nuit et jour, qu’ouvrir notre portefeuille à toutes réquisitions »[note]. Aurait-il vu juste ? Un tout grand merci de prendre en compte ce courrier, nous attendons des réponses pertinentes, des éclaircissements justifiés d’un point de vue médical et démocratique.

Pour Initiative Citoyenne, Marie-Rose Cavalier, Sophie Meulemans, Muriel Desclée de Maredsous (initiative.citoyenne@live.be) Dr Eric Beeth, médecin généraliste, Dr Pascal Sacré, médecin anesthésiste-intensiviste, Dr Kris Gaublomme, médecin généraliste et président de l’association Preventie Vaccinatieschade 

Pour tout contact : Me Georges Henri Beauthier, rue Berckmans, 89, 1060 Bruxelles gh@beauthier.be

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Ils ont peur que vous n’ayez pas peur

Agiter le peuple avant de s’en servir(Talleyrand)

Le coronavirus, un bouc émissaire servi sur un plateau… en or (conjoncture économique oblige). Ce qu’ils n’auront pas pu obtenir du fait de nos réticences, ils l’obtiendront par la peur du coronavirus, et vous en redemanderez:

Management par la peur, tester la docilité du peuple, fermer les frontières, ficher les réfractaires;Musellement des révoltes sociales;Impulsion des écoles numériques;5g sous prétexte d’urgence sanitaire et de saturation réseau;Suppression de l’argent liquide;Surveillance généralisée à l’aide de géolocalisation, de drones, etc…;Automatisation et IA;Vaccination;Chômage de masse —> transfert du coût salarial des grandes entreprises vers la collectivité;Bouc émissaire pour le krach boursier;Verrouiller l’Europe avec des armements américains (Otan) sous commandement américain[note]; Encensement du modèle politique chinois ultra centralisé;etc…

Pour couronner le tout, si on s’en sort, un bon syndrome de Stockholm ! Alors que les responsables de cette situation sanitaire (entre autres), ceux-là même qui nous gouvernent, via leurs canaux de propagandes. Ils nous diront quoi faire avec une « guerre » de retard, dénigrant les conseils du DR Raoult à ce propos, qui datent de quelques semaines déjà, qui préconisait un dépistage généralisé[note]. Mais avec cela, pas de confinement, donc pas de choc… Ce sont les mêmes qui feignent d’être en opposition[note].

Pendant ce temps :

Le monde est sous domination du système bancaire, malgré ceux qui croient encore à l’indépendance des banques centrales et des politiques monétaires ;l’Europe sombre de plus en plus dans « un jeu de guerre » sous domination étasunienne dirigé contre la Russie et bien plus dangereuse qu’un coronavirus; Les états instrumentalisent et financent le terrorisme international.[note];Les infrastructures de base sont au bord de l’effondrement (ponts, écoles, centrales nucléaires, barrages)[note];Risque de guerre civile aux EU et ses répercussions au niveau mondial[note];Continuité de la crise de 2008 et dont le Krach imminent marquerait le point de rupture[note].

Pour les théoriciens de la coïncidence, voici un petit message visionnaire de notre cher Attali, l’homme de « l’ombre » des présidents, en 2009: « une petite pandémie permettra d’instaurer un gouvernement mondial[note] ! ».

On ne s’étalera pas sur les mondialistes tel Bill Gates, possédant la quasi-totalité des richesses de la planète (si pas la planète), et leurs vues eugénistes et leur volonté de dépopulation… leurs liens avec les entreprises pharmaceutiques[note]; des alliances de partenaires public-privé[note]; les programmes militaires (révélés)[note].

on passera aussi : 

Le risque de pollution aux armes chimiques en mer du Nord[note];les centrales nucléaires[note]; Les dangers des armes nucléaires[note];Le trafic d’organes ;Réseaux pédocriminels(dans les plus hautes sphères du pouvoir);L’état mafieux messianique sioniste;Les risques d’embrasement du Moyen-Orient ;L’épuisement et la pollution des ressources ;La mainmise du complexe pharmaceutique, du complexe militaro-industriel etc… sur le monde politique[note];La 6e extinction de masse ;Développement de l’Intelligence artificielle (à défaut d’encore en trouver de la naturellement humaine). 

Notre volonté de domination sur les autres peuples, la nature, l’univers (qui sait si on avait eu plus de temps), nous aura permis de mourir dans un hara-kiri sans le moindre honneur. On m’a souvent demandé pourquoi je lisais des articles anxiogènes. Mieux vaut vivre un cauchemar éveillé. La dose fera le poison psychique. Le confinement acte la réunification du corps et de l’esprit.

Esprit confiné dans une télévision, travestissant le cauchemar en rêve jusqu’aux derniers récalcitrants à l’aide de camisoles chimiques. On aurait pu espérer un éveil, le réveil ayant déjà sonné il y a fort longtemps, mais confiné à la maison la propagande sera administrée par gavage. Jacky et Michel y veilleront…

Pour les écolos de la dernière heure, opportunisme ne trahissant que leurs propres angoisses de mort dues au retour du réel, qui voient dans le confinement un début de ralentissement du capitalisme; qu’ils ne se réjouissent pas trop vite. Beaucoup d’entre eux finiront en compost pour la pacha mama

Virus naturel? Récupération opportuniste d’un virus? Fabrication militaire ? Dans un monde où la réalité à été pulvérisée[note]. Magnifique mise en scène, magnifique mise en chaîne.

Vous me permettrez donc de remettre en doute les discours officiels[note]. Servis par la caste politique et journalistique au vu de leurs CV des plus funestes. Ceux-là même qui ont participé, justifié, financé les guerres impérialistes sous couvert de mission humanitaire (à l’aide d’ingénierie sociale,entre autres, hautement sophistiquée[note]).

Sans parler des paradis fiscaux, de l’instrumentalisation du climat, des famines, des crises économiques, de la mise en esclavage de l’humanité… Nous sommes victimes d’un braquage démocratique! Ils n’ont aucune légitimité! Leur place est en prison!

Aller voter sert uniquement à valider leur simulacre démocratique et ne correspond qu’à la signature de votre acte de décès! Vous me permettrez d’être joyeux et de ne pas avaler votre sinistrose, vos leçons terrorisées et terrorisantes! Car cet effondrement en cours est salvateur.

Plus de la moitié de l’humanité crève de faim, rejoignons-la!

N’oubliez pas : « Celui qui craint de souffrir, souffre déjà de ce qu’il craint » (Michel de Montaigne).

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Articles

Les « rédactions autorisées » Ou comment empêcher que certaines questions arrivent jusqu’à leurs oreilles…

Le « travail» des médias se résume à une longue énumération des morts, des intubés, des cercueils qui s’amoncellent en Lombardie. Prosélytes de l’angoisse, ils se font surtout les architectes du confinement de la pensée. Aucune distance critique sur ce qu’il se passe, aucune réflexion sur le monde qui a produit cela. 40.000 personnes sont mortes dans le monde depuis le début de la pandémie; chaque année 7 millions de décès dans le monde sont imputés à la pollution de l’air… vous voyez nos gouvernements nous affoler? Certes, la bagnole, les pesticides et les avions, c’est la croissance. Et cela, ça ne s’arrête pas. 

Dans le quotidien Le Soir pourtant (à l’instar des autres porte-voix du système), ce 1er avril, derrière le rideau du Covid-19, on sent qui dirige: « Proximus met le turbo sur la fibre et donne un avant-goût de 5G » (p.17). Mais aussi une interview d’Étienne Davignon (p.11), ancien Vice-Président de la Commission européenne, qui « « officialisera » la fusion de la communauté avec le monde des affaires »[note], un des fondateurs et directeur du puissant lobby qu’est la Table Ronde des Industriels, ancien Président de la Société Générale de Belgique, j’en passe, soit : l’architecte du désastre qui va maintenant nous dire « comment faire pour s’en sortir ». 

Les mêmes recettes donc, pour le même empoisonnement. Les apprentis sorciers qui vont nous donner les remèdes aux maux qu’ils ont créés. Qui nous propose notamment « un plan européen pour la survie du secteur aérien qui a été un moteur de croissance économique ces dernières années ». Pour nous, croissance économique est synonyme de mort, et l’épisode coronovarien nous prouve encore que pour vivre, nous n’avons pas besoin d’avions. Enfin, saurez-vous vous passer du prochain city-trip à Milan ou de la semaine all-inclusive en Thaïlande, sans avoir l’impression de « perdre» quelque chose? Nous faisons aussi partie du problème. 

On a donc demandé au Ministère de l’information de Sophie Wilmès de pouvoir assister à la prochaine conférence de presse, qui nous annoncera certainement la prolongation de notre confinement. 

Voilà l’échange qui en résulte. On attend la suite. 

Subject: Conférence de presse S. Wilmès

From: Alexandre
Penasse <info@kairospresse.be>

Sent:
lundi 30 mars 2020 16:04
To:
Detry Steve <Steve.Detry@premier.fed.be>
Subject:
Conférence de presse S. Wilmès

Bonjour,

En tant que journaliste, je souhaiterais assister aux prochaines
conférences de presse du gouvernement qui auront lieu. Pourriez-vous
m’indiquer les dispositions à suivre s’il vous plaît? 

En vous remerciant d’avance. 

Cordialement,

Alexandre
Penasse

Journaliste accrédité (F08882)

Bonjour,

En raison des consignes strictes liées au Coronavirus, l’accès à
la salle de presse est strictement limité à certaines rédactions
en pool.

Vous pouvez néanmoins suivre en streaming les conférences de presse
sur nos sites officiels. 

Cette configuration sera réévaluée lorsque les mesures de social
distancing seront levées.

Merci de votre compréhension.

Bien cordialement,

Steve

Steve
DETRY

Porte-parole
– Woordvoerder – Sprecher

Spokesman

Bonjour,

Merci de votre réponse. 

Que voulez-vous dire par « certaines rédactions en pool ».
Pourrions-nous les connaître pour faire savoir aux personnes qui
nous suivent quelles sont les rédactions autorisées? 

Faisant partie d’un autre type de média que ceux de type
conventionnel, il serait intéressant de pouvoir nous rendre à ces
conférences de presse. D’autant plus que le « social distancing »
ne justifie nullement que certains médias aient des laissez-passer
et pas d’autres. Sur quels critères établissez-vous la distinction?

Cordialement,

Alexandre
Penasse

Bonjour,

L’accès physique est autorisé aux rédactions qui sont
répertoriées par l’Association Générale des Journalistes
Professionnels de Belgique. Celles-ci s’organisent afin de former
des « pool » entre elles. Cela se passe sans encombre.

Ceci étant dit, toutes les conférences de presse et leur contenu
sont accessibles à tout un chacun, dans leur entièreté, en
streaming live. 

Bien cordialement,

Steve
DETRY

Porte-parole
– Woordvoerder – Sprecher

Spokesman

Bonjour,

Je suis reconnu
comme journaliste professionnel (F07882) et le journal dont je suis
rédacteur en chef (Kairos) enregistré comme presse périodique
auprès de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Je ne vois pas ce qui
nous empêcherait d’envoyer un de nos journalistes à une conférence
de presse du gouvernement? 

Je viens de prendre
contact avec l’AJP, dont je suis bien évidemment membre, afin de
connaître mes droits. 

Cordialement,

Alexandre
Penasse

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Articles

Nous sommes en guerre contre la 5G

« Toute société fétichiste est une société dont les membres suivent des règles qui sont le résultat inconscient de leurs propres actions, mais qui se présentent comme des puissances extérieures et supérieures aux hommes, et où le sujet n’est que le simple exécuteur de lois fétichistes ». Anselm Jappe, La société autophage[note].

Le déploiement progressif dans l’espace social d’innovations technologiques pensées par et pour l’industrie, qui ont des influences, économiques, sociales, sanitaires, écologiques, donc un impact évident sur la société et le vivant, n’a le plus souvent jamais été décidé démocratiquement. Rappelons-le donc : voter pour un candidat n’a jamais indiqué un transfert de souveraineté et un accord tacite sur la liberté de ne pas nous consulter entre deux scrutins pour des questions essentielles. Quand ils ne s’embarrassent pas des circonvolutions habituelles, les journalistes aux ordres révèlent la réalité de la démocratie de façade dans laquelle nous vivons, comme Yves Calvi qui, lors d’un « débat » sur la réforme des retraites en France, énonçait : « Pourquoi fait-on semblant qu’il y a des choix à faire alors qu’il n’y en a pas ? »[note]. La décision du Premier ministre français d’engager le 49.3 lui donnera raison quelques semaines plus tard[note]. C’est bien cela qui se passe : le vote est un blanc-seing, prétexte à tout faire pour satisfaire les intérêts des industriels et de la finance. Concernant l’invasion technologique de nos vies, l’opposition politique n’est que de surface, tous les partis s’accordant peu ou prou sur la fameuse « transition », laissant les TIC envahir l’école, les objets connectés se généraliser et les ondes s’amplifier, sans que le peuple n’ait jamais pu donner son avis à leur sujet[note].

On travestit toutefois nécessairement ces coups de force en bienfaits au seul service de l’individu et de la société[note], mais ceux qui ont un intérêt financier à la voir se mettre en œuvre sont les mêmes qui disposent des canaux pour nous informer[note]. S’ajoute donc au fait de ne pas pouvoir nous prononcer collectivement sur ce que nous voulons ou non, celui de ne pas disposer d’une information largement diffusée qui nous permettrait de construire une opposition à ce qu’on nous impose. Cette stratégie qui prend la forme d’une décision de l’oligarchie, prise en amont de toute vie démocratique dans un contexte de privatisation de l’information, est propre à nos « libérales-démocraties » qui, pour nous donner l’illusion qu’on choisit soi-même ce qu’on a choisi pour nous, passent par plusieurs phases qui peuvent se chevaucher :

1. Les choix technologiques qui sont proposés à un moment donné ont, avant même d’être rendus public, été pris antérieurement dans les Conseils d’administration des entreprises, les dîners d’affaires et réunions politiques, les forums internationaux et autres institutions supranationales non-démocratiques comme la Commission européenne. Ce qui dérange l’ordre établi n’atteint pas le stade du débat médiatique, mais est étouffé par toutes sortes de pressions, avant (on n’en parle alors pas du tout) ou après (on en parle mais peu et mal). Les transfuges du monde de l’industrie vers la politique et vice versa étant la norme, où que l’on soit on demeure au service des mêmes. Un exemple parmi d’autres : Luc Windmolders, directeur du service juridique chez l’opérateur Base, a quitté sa fonction pour devenir directeur de la cellule stratégique Agenda numérique, Télécoms et Poste au cabinet du ministre Alexander De Croo. Pas étonnant dès lors que ce dernier nous réponde, lorsque le collectif stop5G.be interpellera le cabinet pour demander une rencontre : « Nous n’allons pas arrêter la 5G. Nous poursuivons une politique qui veut stimuler au maximum le développement de la 5G. Si vous souhaitez une réunion sur les effets – à mon avis inexistants – des rayonnements, vous devez vous adresser à l’autorité compétente. Le gouvernement fédéral n’a aucune autorité sur les normes de rayonnement ». Luc Windmolders a également travaillé pour l’opérateur de télécommunications néerlandais KPN et a siégé au Conseil d’administration de l’association européenne de l’industrie des télécoms ECTA, association internationale sans but lucratif enregistrée au Moniteur belge. L’ex vice-premier ministre britannique, Nick Clegg, n’avait-il pas lui été embauché par Facebook, pour « adoucir les relations avec les autorités européennes »[note]? José Manuel Barroso n’est-il pas passé directement chez Goldman Sachs après sa fonction comme Président de la Commission ? Jean-Claude Juncker n’a‑t-il pas œuvré à faire du Luxembourg un paradis fiscal avant de prendre la relève de Barrosso ? Tout est à l’avenant : la fonction politique, si l’on sait parler aux lobbies, mais surtout leur répondre, fera office de strapontin propulsant vers les mêmes entreprises que l’on aura aidées en répercutant efficacement la pression industrielle sur les textes de lois et facilitant les décisions favorables à leur business. 

2.
Lorsque certains choix industriels sont économiquement trop
importants pour les entreprises, c’est-à-dire qu’ils promettent
des marges de profit dont ils ne peuvent se passer dans un
environnement concurrentiel, ces choix ne doivent surtout pas faire
l’objet d’une contestation populaire qui risquerait de les voir
échouer. Le débat médiatique ne peut donc avoir lieu et les titres
de presse et de télévision sont performatifs, c’est-à-dire
qu’ils parlent déjà au présent de ce qui n’est pas encore là.
Télévisions, radios et journaux suivent et font exister dans la
réalité ce qui n’existe pas, préparant les esprits à
l’acceptation. Se crée alors naturellement dans la conscience du
sujet l’impression que la chose est en quelque sorte déjà
« implémentée ». 

Deux
exemples. Le magazine Le Vif l’Express publie en février
2020 un dossier sur la 5G, couverture pleine page : « 5G.
Une révolution et des craintes ». Le titre à l’intérieur
du journal a oublié les craintes : « Comment la 5 G va
changer nos vies ». Illustration de couverture : un
grand 5G en rouge, la lettre et le chiffre remplis de lignes qui
s’entrecroisent, symbolisant un réseau ; en arrière-plan la
Terre vue de l’espace, et des petits icônes représentant un
ordinateur, une manette de console de jeu, une tête avec casque
virtuel… Le titre annonce ce qui n’est pas encore là,
prophétise, et, par sa seule énonciation, génère un effet sur les
consciences, car il faut imaginer que davantage de gens verront le
titre que ceux qui consulteront le dossier. Dès lors, sous forme de
perspective future inévitable, la couverture remplit une fonction
publicitaire. Mais peu de craintes toutefois que celui qui se
plongerait dans la lecture de ce dernier, trouve quelques arguments
fondés qui lui permettraient de s’opposer. Arrêtons-nous plus
longuement sur l’introduction de l’article, sorte de conte de fée
futuriste : « Au loin, le balai des grues du port,
entièrement robotisé, ressemble à une immense fourmilière
téléguidée. Le son d’une notification vous sort de vos pensées,
pendant que votre voiture autonome vous emmène au bureau. L’agenda
de la matinée s’affiche sur le pare-brise, à côté de la météo.
Pour commencer, une téléconférence avec un partenaire japonais.
L’appli de traduction simultanée se chargera de faciliter vos
échanges. Le week-end s’annonce plus sympa : vous aviez promis
au fiston d’assister à un Real-Barça plus vrai que nature, depuis
la maison, casques de réalité virtuelle vissés sur la tête. Un
billet « VR 360 », c’est plus cher, mais ça vaut le coup. A
tout moment, vous pouvez passer de la projection tribune à la vue
joueur, comme si vous étiez sur la pelouse. Un nouveau bip met fin à
vos songes. Un drone rouge et jaune de réanimation file à toute
vitesse au-dessus de la voiture, qui s’écarte un peu plus tard
pour laisser passer l’ambulance. Encore 8 minutes avant d’arriver.
Juste le temps de vérifier que tout va bien à la maison :
votre Home Companion a fini de passer l’aspirateur et vient de
laisser sortir le chat ». 

La
vie après le Corona ?

On
aurait pu attendre du service public une autre fonction que celle de
porte-parole de la Silicon Valley, mais non. « A quoi
ressembleront nos villes de demain ? », interroge la
présentatrice de La Première (RTBF) ce matin du 20 janvier 2020.
« C’est la question que nous nous posons dans cet épisode.
Avec la révolution technologique, on parle souvent de la smart
city pour répondre aux défis urbains du futur. On vous emmène
cette semaine pour une promenade en ville, direction 2060, c’est
parti » (Musique, fond de piano, voix féminine qui
raconte la vie en 2060)

« Il
est déjà 7h22, son bol connecté vient de trembler, si elle n’a
pas terminé son petit déjeuner dans 2minutes21, le trajet qui lui a
été attribué devra être recalculé. C’est déjà arrivé trois
fois depuis le début du mois, ça commence à faire un peu trop et
elle pourrait prendre des pénalités. 7h24, elle jette les restes de
ses céréales dans un trou au milieu de la table, la nourriture est
directement aspirée dans les conduits du réseau de gestion des
déchets. Une voix annonce : « 56 grammes ». C’est
bon, elle n’a pas encore utilisé son quota poubelle. 7h26, elle
passe la porte, pile dans les temps. Le bracelet qu’elle porte
vient de vibrer, le trajet a commencé. Elle ne sait exactement quel
véhicule va arriver, où elle va passer, quel itinéraire, quels
seront les moyens de transport : voiture autonome pour 4
personnes, capsule suspendue qui glisse sur un rail magnétique pour
25, train pour 300…, il y a plusieurs combinaisons possibles. Pas
besoin de faire de requête particulière pour le voyage, une fois
son horaire encodé au travail, le système sait qu’elle devra s’y
rendre pour 8h00. Son trajet est recalculé en permanence en fonction
des milliers d’autres trajets qui ont lieu en ce moment dans la
ville, mais une fois que l’itinéraire est fixé, il faut s’y
tenir. C’est le meilleur moyen pour que les trajets soient rapides,
sécurisés, et qu’il y ait toujours une place assise. 7h26, c’est
un deux roues qui arrive, avec chauffeur, c’est plutôt rare, il
l’emmène à la gare, ce sera donc un trajet en train. 7h35, elle
est assise dans le wagon, le trajet est rapide, fluide, calme. 7h56,
elle passe la, porte du centre de commandement, son bracelet vibre,
signal que sa présence au travail est enregistré. La porte du
bureau s’ouvre, les écrans sont là, partout sur les murs, sa
place l’attend. Une journée entière à regarder les images de
caméras de surveillance, la foule, les déplacements, une journée à
surveiller que l’activité de la ville glisse, sans accroc ».
Un rêve de vie pour cette jeune fille, n’est-ce pas ? 

Nous
sommes sur une radio publique belge, qui participe à sa manière de
la folie collective. « Pour bien comprendre de quoi il
s’agit », après cette petite promenade dans le futur
qu’on prépare dans le présent, la journaliste reçoit Carine
Basile, directrice du Smart City Institute… sponsorisé par
Proximus, Total, Vinci Energies, la Région wallone et Digital
Wallonia. A la radio publique, on ne vous aide pas à penser mais à
vous habituer au monde que ces derniers nous préparent. 

Ces
deux passages, étrangement proches dans leur manière d’aborder
l’avenir et de penser le monde, n’ont rien à envier à Orwell ou
Huxley. Se projetant dans l’avenir, ces récits journalistiques
permettent de mieux saisir une des caractéristiques des médias
dominants, à savoir de feindre continuellement qu’ils ne font que
représenter la réalité, la répercuter après-coups en quelque
sorte, alors qu’ils en sont les créateurs. Ils ne sont rien
d’autre que ceux qui donnent à la réalité la représentation
qu’ils veulent, et qui en ont le monopole, permettant à la
prophétie de s’auto-réaliser.

Pur
hasard, décision prise par des journalistes manquant paradoxalement
de temps pour s’informer ? Le 27 décembre, Datanews,
magazine propriété de Roularta, au même titre que Le
Vif, publie
« Groen
et Ecolo sont sélectivement aveugles aux preuves scientifiques ».
Francis Leboutte leur
envoie
quelques jours plus tard un mail et demande un droit de réponse,
concernant notamment « les
assertions de Monsieur Vanhuffel à propos de la pollution des ondes
électromagnétiques, de leurs impacts sanitaires et les limites
d’exposition ».
Le rédacteur en chef Kristof Van der Stadt lui répond : « Le
droit de réponse est réservé aux parties directement impliquées.
Cela dit, d’autre part nous sommes prêts à mettre en évidence les
vues de stop5g.be.
Ce que je propose, c’est que vous transformez le texte en opinion au
nom de stop5G.be, avec des références à des études pertinentes ?
Qu’en pensez-vous? ».
Passons le fait que ceux qui contestent ont des opinions, les autres
ce sont des faits, même s’ils sont sponsorisés par les
opérateurs. Après de multiples échanges et atermoiements, le
rédacteur en chef prévoit la publication de l’article le 21
février, mais le 28, nouveau retournement : « Il
me faut apporter ici une rectification. Nous avons entre-temps
entièrement passé en revue l’opinion et avons finalement décidé
de ne pas la publier sous cette forme, parce qu’après mûre
réflexion, elle ne répond pas aux normes qualitatives
(sic) que
nous préconisons. Mais par ailleurs, nous ne voulons certainement
pas non plus passer sous silence l’existence d’organisations
telles Stop5G, qui réfutent les normes d’ICNIRP, de l’Organisation
mondiale de la santé et de l’UE. Ce que nous nous proposons par
conséquent de faire, c’est de résumer votre point de vue
et
de l’ajouter à l’interview d’un expert en rayonnement que nous
publierons un de ces prochains jours. »

Les échanges se clôtureront le 2 mars par la réponse de Francis Leboutte au rédacteur en chef Kristof Van der Stadt : « En fait, j’ai été informé que, le jour même de votre réponse, vous avez déjà publié ce dont vous faites état ci-dessous dans la version flamande de Datanews où, en ce qui concerne l’avis du collectif stop5G.be et mon article vous en dites à peine plus, c’est-à-dire que mon article « ne répond pas aux normes qualitatives que nous préconisons ». D’autre part, je constate que l’expert que vous avez interviewé, Eric van Rongen, est le Président de l’ICNIRP, l’institution dont l’indépendance par rapport à l’industrie et la validité des avis sont largement contestées par le monde scientifique. Mais quelles sont ces normes qualitatives ? Je doute que vous les ayez appliquées à l’article de Monsieur Vanhuffel publié le 27 décembre et auquel j’avais réagi, le trouvant particulièrement peu objectif. D’autre part, sachez que mon article est le reflet de ce que pensent les membres fondateurs du collectif stop5G.be parmi lesquels il y a 2 ingénieurs civils ainsi qu’un docteur et une licenciée en sciences physiques ; que tous étudient la question de la pollution électromagnétique depuis plusieurs années et même plus de 10 ans pour deux d’entre eux. Il ne vous serait pas facile de trouver un tel concentré de compétence en la matière en Belgique ».

On
se demande en effet quelles sont leurs « normes qualitatives ».
Sans doute celles des «  managers
IT et les utilisateurs finaux dans les entreprises, les pouvoirs
publics, l’enseignement et les associations IT »,
et le « public
cible »
de Data
News :
les
« professionnels
IT, c’est-à-dire les CIO, General managers, Responsables RH et
Finances »7.
Ce qui nous fait dire qu’on perd notre temps avec ces médias, le
groupe Roularta faisant partie du problème et non de la solution. 

3.
Alors que les gens entendent parler de « ce
qui va arriver »,
les industriels créent conjointement les objets qui établiront une
sorte de lien de cause à effet. On parlait de 5G, mais pas des
objets qui en auront l’utilité, il faut donc créer ceux-ci. Les
smartphones, drones, consoles portables, caméras, robots…
« compatibles » avec la nouvelle technologie, deviennent
des « causes » qui demandent des « effets »,
et importent dans le corps social une véritable demande active.
D’une chose pour laquelle les gens n’avaient rien demandé, la
nouvelle technologie se mue en innovation générant de faux besoins,
qui avec le temps deviendront indispensables par l’effet d’un
choix politique, entraînant « de
tels bouleversements qu’essayer de s’en passer devient très
difficile8 »
(à l’instar par exemple de la voiture individuelle, de la carte de
banque ou, pas encore, mais ils s’y attellent, du smartphone).
Ainsi, ces faux besoins créés par le secteur publicitaire vont
escamoter l’origine de l’offre et de façon pernicieuse,
renverser son fondement profondément antidémocratique en quelque
chose qui répondrait à une demande collective. Dans ce subterfuge,
le mensonge est permanent. 

4.
Une fois le besoin créé, l’objet ne peut plus se penser de façon
systémique, c’est-à-dire être pris mentalement dans un contexte.
Que la 5G et tous les objets dont la nouvelle technologie accélérera
l’obsolescence (pour assurer la compatibilité) et augmentera la
production (infrastructure pour assurer la couverture triplée),
soient issus d’un esclavage moderne et d’un extractivisme
destructeur est secondaire dès lors que l’objet est peu ou prou
passé dans le domaine de l’addiction. On n’a jamais vu un
héroïnomane en manque philosopher sur la condition sociale des
cultivateurs de pavot.

5. Si contestation conséquente il y a néanmoins, les forces de l’ordre médiatiques et policières n’étant pas parvenues à contrôler l’information et les corps, il faudra ressortir les vieilles tromperies, comme le sentiment national (le spectre de la « Chine » et de « Huawei »… « L’Europe fixe des règles de sécurité stricte pour la 5G », Le Soir, 30/01/20), pour feindre qu’on protège le bien commun, alors que parler de « sécurité nationale », c’est déjà passer une étape et accepter tacitement la chose. Cette contestation ne pourra bien évidemment pas faire l’objet d’une médiatisation. Si elle transparaît toutefois dans les organes d’information du pouvoir, ce sera à des heures de faible écoute et, toujours, sous forme caricaturale, sans laisser le temps de l’argumentation, pour un spectateur déjà quotidiennement noyé sous la « nécessité technologique »9.

6. Ce fonctionnement médiatico-politico-industriel n’apparaît pas subitement, mais est en œuvre depuis longtemps. L’individu ne dispose ainsi souvent plus de la capacité de le saisir, alors qu’il est soumis à un matraquage médiatique depuis l’enfance, dans l’espace public et au sein même de la sphère privée, dont la diffusion pernicieuse dans les esprits, en l’absence de contre-discours propagé à grande échelle, génère passivité et désintérêt pour le politique, la consommation offrant une forme d’exutoire au désengagement de chacun dans l’organisation de sa vie. 

Table
ronde au Parlement européen

C’est
dans ce contexte que doivent se penser leurs « discussions ».
Le menu est déjà écrit, les plats aux fourneaux, et ils feignent
une participation collective à leur élaboration alors qu’ils nous
serviront les mets qu’ils ont préparés de leur seule initiative.
Les lobbies sont omniprésents, aguerris et dotés de techniques de
corruption efficaces. À ce niveau, le Parlement européen n’a plus
beaucoup à voir avec une instance qui prendrait des décisions dans
le sens du bien commun, mais un organe qui, privé de pouvoir
d’initiative, n’examine que les textes proposés par la
Commission, se contentant d’aménager superficiellement des
décisions technocratiques dont ils ne peuvent rien dire sur les
fondements et l’orientation sociétale qu’ils provoquent. Les
lobbies industriels ont leur place au Parlement européen, ils sont
là chez eux. 

Dans
ce monde clos et protégé de la réalité qu’est le Parlement
européen, le
député bulgare Ivo Hristov organise le
10 décembre
2019
une
table ronde, intitulée « 5G deployment in the EU -
opportunities and challenges ». Le titre n’exprime aucun
doute et illustre ce que nous disions précédemment : la chose
est
« là », il s’agit uniquement de ménager les
susceptibilités et de rassurer la populace. L’atmosphère feutrée
de la salle où la rencontre a lieu accentue cette illusion d’être
un « élu » : bien au chaud, tapis au sol, assis
dans de confortables fauteuils, entouré de personnes propres sur
elles, l’air sérieux, l’humour calculé et affecté marque d’une
reconnaissance mutuelle, signe de crédit et de certitude. On pose
donc des questions à des gens sérieux qui répondent sérieusement ;
ils sont mesurés et rassurent souvent explicitement sur l’égale
importance qu’ils accordent à leur combat (la 5G) et à la
sauvegarde de la nature. Depuis en effet que les écologistes de
parti ont capitulé devant le capital et ouvert la voie à la
croissance verte, la nature est un business. « Dans
le développement durable, il y a les trois P, un des P c’est
profit, à côté de planet et de people, donc je n’ai aucun
problème de parler de profit dans un cadre de développement
durable, aucun problème avec ça »,
nous disait un dirigeant de multinationale10.
La nature, on la cite pour mieux l’écarter. Cela
ne pose aucun problème. 

Mère
nature est donc convoquée religieusement car son absence serait plus
bruyante que sa simple évocation : ne rien dire pourrait en
effet s’avérer suspect, signe éventuel d’un non-dit, d’un
évitement qui risquerait d’instiller le doute chez certains. De
même, il est de bon ton d’inviter un opposant parmi les partisans.
Le 10 décembre, on faisait jouer ce rôle à Paul Lannoye, seul
réfractaire à la 5G, étayant son argumentaire sur des faits fondés
sur le bien commun. Porter une autre voix dans une telle assemblée,
c’est donc involontairement leur servir d’instrument qui offre la
preuve de leur ouverture. Les six autres ? Samuel Stolston,
modérateur, digital editor chez Euractiv, expert dans le
réseau 5G ; Jeremy Godfrey, directeur des régulateurs
européens pour les communications électroniques (Berec), dont la
fonction est notamment de promouvoir les services à haute-vitesse,
de supporter une économie digitale compétitive, ou encore
d’habiliter la 5G ; Marc Vancoppenolle, à la tête des
« government relations » chez Nokia Belgique, qui
consiste notamment à travailler avec les institutions et les
actionnaires pour créer un cadre politique favorable et un
environnement régulatoire favorisant les investissements haut-débit
et la digitalisation ; Lazlo Toth, directeur de politique
publique chez GSMA Europe, qui représente le bras européen de
l’industrie de la communication mobile mondiale ; Vladimir
Pulkov, à la tête du Intelligent Communications Infrastructures R&D
Laboratory, au Sofia Tech Park, en Bulgarie ; George Oikonomou,
Ingénieur dans l’équipe 5G à VMware. On croirait une blague. Ce
n’en est pas une. 

L’œuvre
théâtrale est parfaite, comme lorsque Samuel Stolton demande au
cadre de Nokia, Marc Vancoppenolle, d’expliquer comment la 5G va
permettre aux citoyens d’accéder plus facilement aux services
publics. Se soignant pour la plupart dans des cliniques privées qui
les mettent à l’abri de la réalité du secteur de la santé en
Belgique, en France et ailleurs, ils ne suspectent sans doute même
pas la catastrophe en cours dans les hôpitaux publics. 

Vladimir
Pulkov expliquera qu’il est ingénieur télécom et « ne
peut pas commenter les questions liées à la santé car il n’est
pas un expert à ce sujet », mais que « nous avons
des forces motrices qui nous obligent à implémenter la 5G. La 5G
est en fait une opportunité, une chance de réaliser toutes les
choses dont on a besoin dans le futur. Nous parlons de smart
cities, d’intelligence artificielle… Peut-on avoir de
l’intelligence artificielle sans big data ? Non.
Peut-on avoir de la big data sans communication sans fil ?
Non. Nous parlons de la réalité augmentée, où tout le monde va
maintenant ». Pour aider à ce qu’on reconnaisse que tout
cela n’est qu’un grand spectacle, j’adresse une question à
Valdimir Pulkov, fervent fidèle : 

-
« Mr. Pulkov, quand vous parlez que les gens veulent
développer des smart cities, je crois qu’on est quand même
au Parlement européen, qui représente [est censé représenter]
le peuple européen… Moi je n’ai pas envie de smart cities,
il y a plein de gens que je connais qui n’ont pas envie de smart
cities ; Je constate quand même que vous êtes 6, qu’il y
en a 5 qui représentent l’industrie. Quels sont vos intérêts Mr.
Pulkov pour dire que les gens veulent des smart cities, qui
vous a payé, qui a payé les autres. C’est quand même effarant de
voir quelqu’un qui bosse pour Nokia [Marc Vancoppenolle]
venir nous expliquer ce que la 5G va nous apporter. J’aimerais que
vous vous expliquiez un peu là-dessus. Je vous vois plutôt comme un
apôtre du Progrès qui dit « la 5G viendra »…
Il ne manque plus qu’à mettre les mains en l’air ; mais je
pense qu’on est dans une période où l’urgence climatique,
sociale, demande d’autres réponses ».

Le
modérateur demandera à Vladimir Pulkov de répondre à la
question : 

-
« Non, je ne veux pas répondre sur ce point. Ok… J’ai
juste dit si… Je commente à nouveau : il y a des forces
motrices, si nous voulons des smart cities, nous devons le
faire ; vous ne voulez pas de smart cities, ok. Je suis
un ingénieur télécom, un chercheur dans le domaine des télécoms
et je pense, depuis plus de 30 années d’expérience,
qu’on a vu la 1G, 2G, 3G, 4G… Donc, mes attentes sont qu’il y
aura la 5G, parce qu’il y a des forces motrices pour cela. Comment
cela va-t-il être implémenté, dans quel sens, on doit le
considérer tous ensemble ». Amen. 

https://youtu.be/nZRkY4SGdTI

Parlement
européen : 5G, ciel et satellites 

Le
20 février, à l’initiative de la député européenne Michèle
Rivasi, a lieu une seconde table ronde « 5G, ciel et
satellites : pollution du spectre radio, comment partager les
fréquences de notre Espace commun mondial ». Les invités :
Giles Robert, directeur de l’observatoire Centre-Ardenne, le seul
et unique d’où on puisse encore voir correctement le ciel étoilé
en Belgique ; Éric Allaix, de l’organisation météorologique
mondiale ; Philippe Achilleas, professeur en droit public à
Paris (Paris-Sud, Panthéon-Sorbonne), spécialiste en droit relatif
à l’espace et droit des télécommunications. S’y ajoute
Branimir Stantachev, de la DG Connect de la Commission européenne. 

Le
discours de ce dernier, responsable du développement et de la mise
en œuvre au niveau des politiques européennes de diffusion sans fil
et la large bande, est rôdé, automatisé. Une machine. Depuis 2008
à la Commission européenne, il a débuté sa carrière
professionnelle en 1995 à la chaire Vodafone pour les systèmes de
communications mobiles de l’Université de Dresde en Allemagne. Il a
ensuite travaillé pour Philips, Qimonda (fabricant de
semi-conducteur, Munich) et Signalion (fournisseur de solutions pour
les fabricants et opérateurs d’infrastructures sans fil, Dresde). Le
12 et 13 février 2018, il est l’un des orateurs pour la conférence
européenne sur la 5G, dont la liste des sponsors laisse à elle
seule entendre de qui Branimir est l’envoyé spécial. Logiquement,
il passe donc du privé vers les instances politiques qui permettront
de continuer à servir ses anciens patrons. Dans le Parlement,
après trois interventions qui toutes, peu ou prou, soulignent
les risques que comporterait le déploiement de la 5G, je pose ma
question à Branimir Stantachev : — « Vous terminez
tout à l’heure en disant que les affaires sont la pierre angulaire
de la question de la 5G. Je crois que vous avez tout dit. Votre
discours est effrayant. Vous tenez le double discours typique de
l’industrie, c’est-à-dire « on fait attention à la
santé », mais en même temps « on s’en fout
complètement ». Il faut quand même rappeler qui est votre
patron, c’est Thierry Lebreton [Thierry Breton, actuel
commissaire européen au Marché Intérieur] qui vient d’une
grosse boîte de Telecom [entreprise de services numériques
Atos], qui a été placé par Macron. Je crois que la question
essentielle, et cette vidéo que je suis en train de faire passera,
c’est que la souveraineté populaire n’est plus du tout présente.
Vous venez d’avoir trois discours ici, qui vous parlent à la fois
d’un paysage commun universel qui va être détruit [le ciel
étoilé, intervention de Giles Robert], peut-être que ça ne
vous intéresse pas que nos enfants voient encore les étoiles ;
d’un risque majeur également en termes de préventions
météorologiques [intervention d’Eric Allaix] ; ainsi
que d’une utilisation rationnelle d’un bien commun qui n’existera
plus du tout [Philippe Achilleas], et vous continuez, les yeux
fermés, à nous proposer un modèle que la plupart des gens ne
veulent plus. En Suisse, il y a une énorme coalition de personnes
qui disent non à la 5G, en Belgique il y en a de plus en plus…
Alors je vous pose la question : quel est votre intérêt pour
le bien commun et le peuple, à qui on va imposer des choses qui sont
totalement… à une époque, alors qu’on vit la sixième crise
d’extinction des espèces, qu’on risque que l’espèce humaine
disparaisse dans peut-être moins de 50 ans, j’ai des enfants de 10
et 6 ans et je ne sais pas ce qu’ils vont devenir, et
vous nous foutez des trucs dont en fin de compte on n’a pas besoin,
qu’est-ce que vous dites à cela ? » 

Après
cette assez longue question, Branimir Stantachev me regarde et me
demande, en anglais, si je peuxlui reposer la question. Il
n’avait pas mis son casque. Il écoutait donc sans comprendre.

-
« Pourquoi Monsieur Stantachev ne met pas son casque ?
Pas possible ! Je vais donc recommencer la même chose ?
Donc je vous dis que vous tenez le double discours habituel de
l’industrie où à la fois vous nous dites que… [Branimir
Stantachev ne trouve pas la fréquence pour la langue de traduction].
Y’a un système qui bloque quand on pose des questions un peu
trop dérangeantes… ? Vous terminez tout à
l’heure votre allocution en disant que les affaires sont la pierre
angulaire de… (idem)… je crois que vous dites tout, je
rappelle qui est votre patron, Thierry Breton, qui vient d’une
grosse boîte de Télécom. Je crois qu’on pose la question
essentielle ici de la souveraineté populaire. Il y a trois personnes
qui viennent de parler et qui ont évoqué la destruction d’un
paysage commun universel, le fait que la prévention météorologique
qui permet de sauver des milliers de personnes risque d’être
totalement mise à mal et que le bien commun qu’est l’espace
risque… quand on envoie 42.000 satellites, on ne peut plus parler
d’utilisation rationnelle de l’espace. De plus en plus de gens se
prononcent contre la 5G. On vient de découvrir en Suisse que
beaucoup de gens sont malades, ont des troubles neurologiques, des
troubles du comportement, ne savent plus dormir… Il y a des
reportages qui sortent là-dessus. Vous continuez à nous imposer
quelque chose qu’au fait on ne veut pas. Je rappelle quand même
qu’on est dans une époque où on vit la 6ème
crise d’extinction des espèces – la dernière était celle du
Crétacé-Tertiaire, c’était les dinosaures qui ont disparu – on
sait maintenant qu’elle est causée par l’homme. Quand va-t-on
arrêter ce délire ? Je répète encore ce que j’ai dit, j’ai
des enfants de 10 ans et 6 ans, j’ai peur pour leur avenir.
Monsieur [une personne dans le public] disait tout à l’heure
qu’il y a d’autres solutions… La grande solution c’est
surtout celle de changer de paradigme. Je rajoute une chose, c’est
que j’ai été au forum de la 5G à Diamant [quartier de
Bruxelles], c’était introduit par une copine Commissaire de
Monsieur Breton [Miapetra Kumpula-Natri, voir plus bas], qui
remerciait dans la salle les lobbies, Nokia, Ericsson, etcetera, qui
avaient fait pression sur elle les dernières années… C’était
tout un monde qui était là, je n’ai vu aucun représentant du
peuple, peut-être quelques parlementaires… Quelle est votre
position par rapport à la souveraineté populaire ? On sait que
ce n’est que du business. Alors dites-le : « C’est
que du business, on s’en fout du peuple », mais c’est
que du business. Vous ne gagnez pas comme moi une somme
dérisoire, et vous n’êtes pas en train de lutter. Vous avez un
salaire énorme, comme tous les autres qui travaillent là-dedans.
Désolé, mais à la fin c’est tellement absurde… ».

Il
finira par « répondre » : 

« Merci d’exprimer ces inquiétudes, bien sûr nous les prenons au sérieux, du côté de la Commission, en ne regardant pas uniquement le côté économique des choses, mais nous surveillons également l’impact social et bien sûr l’impact sur la santé humaine. Je crois qu’à cet égard la Commission a été cohérente dans le suivi et l’évaluation de l’impact des ondes électromagnétiques sur la santé publique. Nous avons un mécanisme en place à la Commission, basé sur un travail avec des experts de comités particuliers. Peut-être avez-vous entendu parler du comité Scheer [comité scientifique qui dépend de la DG santé] et de ce comité qui hérite d’un autre dans le passé avec un autre nom et a déjà produit, je crois cinq avis, sur l’impact des champs électromagnétiques sans aucune conclusion négative jusqu’à présent. En ce qui concerne l’impact de la 5 G, je pense que la 5 G est une technologie “next génération”, utilise basiquement les fréquences qui sont déjà harmonisées ? Pour les communications mobiles, ce ne sont pas de nouvelles fréquences, ce sont des fréquences déjà en usage et l’impact électromagnétique de cette utilisation sera comparable à ce qu’il était avant. Bien sûr nous avons d’autres fréquences qui pourraient être utilisées, ondes millimétriques… qui ont toutefois une propagation très différente et d’autres caractéristiques et là, nous avons réalisé des études qui montrent qu’il n’y aura qu’un impact marginal de ces fréquences dans l’augmentation générale de l’exposition aux champs magnétiques. Nous sommes également conscients que, par exemple, des organismes internationaux comme l’OMS ou le centre international de recherche sur le cancer ont aussi leurs vues sur l’impact des OEM : ils les catégorisent comme possiblement cancérogènes ce qui est la même catégorie que par exemple, manger des cornichons, manger des légumes conservés dans du vinaigre, et c’est une catégorie moins dangereuse que par exemple l’effet de boire du café très chaud ou même avoir un travail de nuit. Je crois que nous devrions être très prudents sur les bilans et ces bilans sur l’impact des OEM devraient être basés sur des preuves et des recherches très profondes et c’est ce que nous avons toujours fait (…). 

L’échange est impossible. Nous vivons dans d’autres mondes. Seulement, ses principes à lui deviennent réalité. 

Le
Forum de la 5G

Au
forum de la 5G, ce 29 janvier, pas besoin de s’encombrer de
« dissidents », inutile de feindre que l’on débat :
ici tout le monde est d’accord. On parle pour agir. On prépare le
terrain. On prophétise et on anticipe les écueils qui pourraient se
mettre en travers de la voie sacrée de la 5G. Plus de 200 personnes
des 5 continents, badges Huawei, Nokia, Facebook, Ericsson,
Qualcomm…, et de multiples opérateurs de télécommunications.
Ici, pas de traduction simultanée, tout le monde parle anglais. 

Le
modérateur de la première session est Amit Nagpal, de Aetha
Consulting, une organisation de consultance dans l’industrie des
télécoms, qui conseille de nombreux opérateurs dans le monde (KPN,
Orange, Türc Telecom…), mais a aussi parmi ses clients la
Commission européenne. La session pour introduire la grand-messe
s’intitule « Où en sommes-nous ? Les premières
expériences avec la 5G », résumé par ses mots dans le
dépliant reprenant les conférences de la journée : « La
5G est là. Partout dans le monde, le déploiement commercial a
débuté. Nous avons pu commencer à voir les premiers exemples de
réseau 5G à être mis en place, et les premières applications
mobiles deviennent disponibles (…) ». Le premier à
prendre la parole est Pearse O’Donohue, directeur à la Commission
européenne de Futur Networks, de la DG Connect, collègue de
Branimir Stantachev. 

Lui
succède à la chaire Miapetra Kumpula-Natri, parlementaire
européenne représentant la Finlande. Alors qu’elle prend la
parole pour prêcher, elle introduit son intervention de façon
surprenante et décomplexée, indiquant qui dirige vraiment le
Parlement et prend les décisions en matières de 5G : «Je
vois beaucoup d’acteurs importants de la 5G, que nous avons
vraiment besoin de renforcer en Europe. Et je suis heureuse de voir
de nombreux visages ici, qui ont fait pression sur moi (That was
lobbying me) durant la dernière législation au Parlement ».Aucune honte. Pas d’hérétique dans l’assistance
pense-t-elle, elle peut sans vergogne nommer ce qui est. 

Miapetra Kumpula-Natri a raison de remercier les industriels dans la salle ce 29 janvier. Reprise dans la liste des orateurs de l’ECTA, l’association européenne de l’industrie des télécoms, la parlementaire parlera beaucoup de la nécessité de créer le besoin qui amènera la demande de 5G, alors que celui-ci est quasi inexistant encore en Europe. Leur stratégie de guerre est donc maintenant au stade que nous avons décrit en préliminaire de ce texte : provoquer le lien de cause (la généralisation des objets nécessitant la 5G) à effet (la demande des infrastructures nécessaires pour répondre au fonctionnement de ces objets). 

https://youtu.be/ryJ17W0I5no

Travestissant
les mots sans complexe, elle parle de « souveraineté
technologique »,
oxymore s’il en est, la souveraineté étant justement ce que la
technologie éradique en se développant. Au Parlement,
Vladimir Pulkov et d’autres parlaient d’« écosystème
favorable à la 5G ».
Point d’importance que ces mots soient profondément antinomiques
et suscitent chez celui qui a encore la capacité de penser, un
sentiment de dissonance, eux sont tels des prêtres qui partent dans
des envolées lyriques où il n’y a plus que la croyance qui
importe. On dirait des politiciens : comme eux ils adoptent ce
langage qui « a
pour fonction de rendre le mensonge crédible et le meurtre
respectable, et de donner à ce qui n’est que du vent une apparence
de consistance11 ».
On a envie de leur demander d’arrêter leurs litanies, mais leurs
mots ne sont que les témoins de leurs actes en train se faire. Nous
ne pourrons les arrêter si nous restons sur le terrain symbolique,
ils partent gagnants : les médias qui ont ce monopole de la
représentation
du réel, leur appartiennent, et ils s’assureront que ceux-ci nous
répètent inlassablement ce que nous devons aimer et participera de
notre bonheur. 

Vient
ensuite Frédéric Pujol, responsable des activités Technologie et
Radio et spectre chez Idate DigiWorld. Qui est Idate DigiWord ?
C’est le cabinet qui a été sélectionné pour réaliser
l’Observatoire européen de la 5G pour la Commission européenne.
Il établit ainsi un rapport trimestriel sur le processus de
déploiement de la 5G et annonce sur la première page de son site
qu’il est sous le haut patronage du Président de la République
français Emmanuel Macron. Frédéric Pujol réalise diverses
missions pour la Commission européenne, des opérateurs de mobile
japonais et d’autres entreprises privées. Les liens se font, quand
on sait que Macron a appuyé la candidature de Thierry Breton comme
commissaire européen au marché intérieur… Thierry Breton,
serviteur zélé de l’industrie, passé du privé (Directeur
Général Adjoint puis Directeur Général chez Bull group,
CEO de Thomson, CEO de France Telecom, Président-directeur général
du groupe Atos jusqu’en 2019) au public (Ministre de l’Économie
et de la Finance français puis Commissaire européen). 

Le
messianisme technologique

Jouissant
pour la plupart des fruits que leur confère leur croyance, pouvoir
et argent, ces apôtres sont atteints d’une forme de folie qui les
empêche d’appréhender le monde et de saisir ce qui s’y passe,
défendant des projets qui leur assurent un mode de vie qui les met à
l’abri du besoin et de la pensée. Ils sont pétris de cette
certitude propre aux fidèles du Progrès, assurés qu’ils ne
peuvent se tromper et que notre seule et unique erreur serait celle
de rester à la traîne, en regard des Chinois, Sud-Coréens… Les
médias, dans cette propagation de foi, suivent et font exister dans
les représentations ce qui pourrait encore être refusé. Ils
entérinent quotidiennement le monde dans lequel nous sommes, n’y
voyant qu’à de rares occasions quelques défauts accessoires. 

Ce
sont de véritables discours religieux, des messes avec les prêcheurs
et les fidèles. Les prosélytes au micro proviennent de Nokia, du
Forum coréen pour la 5G, de l’Icnirp, de la Commission et du
Parlement européens, et ont leurs relais politiques et médiatiques.
Ceux qui parlent sont mus par quelque chose qui transcende la
détermination : ils croient et sont sûrs de ce qu’ils
croient. Leur diocèse industriel leur offrant par ailleurs des
conditions de vie qui laissent peu de place à un doute qui, s’il
devait les rendre plus libres, impliquerait un changement de vie
qu’ils ne veulent pas engager. Ils ne peuvent toutefois cyniquement
déclarer que la nature et la santé sont sans importance pour eux,
ils doivent donc dire ce qu’ils ne font pas, pendant qu’ils font
ce qu’ils ne disent pas. Il y a lieu de considérer le malaise
moderne aussi dans ce double bind, ces injonctions
paradoxales, messages pérennes et structurels, qui rassurent ceux
qui veulent que rien ne change, mais sont profondément
déstabilisants pour les autres, en permanence plongés dans un
double discours dont ils perçoivent La fausseté, la tête entre
deux écouteurs émettant des messages paradoxaux. 

Mais selon les pays, la propagande ne sera pas toujours suffisante et on lui préférera des méthodes plus musclées. HyeonWoo Lee, Vice-Président du 5G Forum Korea, est d’une franchise qui laisse entendre que la méthode est habituelle : « En Corée, le gouvernement est très agressif pour promouvoir la 5G ». 

Ici,
pas encore besoin de l’armée ou de la police pour imposer des
technologies qui trouvent leur source dans la soif de profit et de
domination12.
Le Coronavirus
fait œuvre de stratégie du choc, l’Institut
Belge des Services Postaux et des Télécommunications (IBPT)
annonçant en plein confinement que « concernant
l’introduction de la nouvelle technologie 5G, l’IBPT propose, en
l’attente d’un accord politique entre le gouvernement fédéral
et les entités fédérées, d’octroyer des droits d’utilisation
provisoires ».
Alors que les gens sont cloîtrés chez eux, l’IBPT organise, ce
n’est pas une farce, une consultation publique jusqu’au 21 avril
à ce sujet. L’IBPT, on en avait déjà parlé13,
c’est l’organisation dont l’ancien Président,
Luc Hindryckx, est passé à l’ECTA, et dont nombreux autres ont
rejoint, ou viennent, de l’industrie des télécom. 

On espère que les dubitatifs auront saisi que l’enjeu dépasse de loin la 5G. Ce n’est pas moins que l’avenir de l’humanité qui est en jeu. Les choix à venir seront décisifs, les refus aussi donc, dont la 5G fait naturellement partie. Le capitalisme du désastre persiste et signe, continue à piller le non-Occident, sous prétexte de « transition », assurant cet art du changement dans la continuité dont il est maître. Si une résistance massive à ce futur qu’on nous prépare n’a pas lieu, c’est tout notre rapport à l’autre et au monde qui risque de basculer dans une dimension dont on voit déjà poindre les prémices, au moment même où nous devrions revenir à quelques valeurs fondamentales, notamment nous considérer comme espèce faisant partie d’un grand tout, où la nature et l’autre ne sont plus à notre service mais en coexistence. Ce sera bien pour nous, mais aussi et surtout pour ceux dont notre mode de vie a justifié et justifie le massacre, séculaire et quotidien. 

Retrouver
du sens, c’est cela. Non ? 

Alexandre
Penasse

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