Kairos n°12

Janvier 2014

Nous aurions pu consacrer un tome entier à l’école. Il a fallu nous limiter. Nous n’avons par ailleurs pas voulu nous concentrer sur les quelques éléments positifs que nous aurions pu glaner sur le terrain scolaire, car vu l’état des lieux général, ils n’auraient servi que de cache-misère. Cela va mal dans l’enseignement en Belgique, nous avons voulu le montrer. Mais outre que de dire ce que l’école est, nous avons aussi voulu montrer ce qu’elle pourrait être, ce qu’elle est ailleurs, et a essayé d’être ici. Notre regard critique n’a rien de pessimiste en lui-même, cette disposition d’esprit étant plutôt du côté de ceux qui continuent à penser que « tout va bien » et que « quand on veut, on peut ». Ce numéro se clôture ainsi sur des propositions et des expériences différentes dont on pourra tirer exemple.

S’il faut retenir une chose, outre le fait qu’une société dotée d’une école tout à fait différente est possible et souhaitable, c’est l’inégalité profonde qui caractérise l’enseignement belge, et à laquelle les mesurettes gouvernementales ne changeront rien, si ce n’est de nous faire croire qu’elles pourront apporter un changement.

Comme Ivan Illich l’énonçait dans Une société sans école :  « Beaucoup continuent à croire, à tort, que l’école mérite la confiance publique, qu’elle remplit ce rôle, alors même qu’elle n’est plus que la détentrice d’un monopole et que, loin d’égaliser les chances, elle en assure la répartition ». Ivan Illich, « Une société sans école », Oeuvres complètes, vol.1, p.223.

«La cécité aux inégalités sociales condamne et autorise à expliquer toutes les inégalités, particulièrement en matière de réussite scolaire, comme inégalités naturelles, inégalités de dons. Pareille attitude est dans la logique d’un système qui, reposant sur le postulat de l’égalité formelle de tous les enseignés, condition de son fonctionnement, ne peut reconnaître d’autres inégalités que celles qui tiennent aux dons individuels ».

Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les héritiers, Les Éditions de Minuit, Paris, 1964, p.103

 

 

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