Le bluff techno-viral de Pfizer

En 1988, Jacques Ellul publiait Le bluff technologique dans lequel il montrait que la domination de nos sociétés par le technologisme résulte d’un processus de conditionnement des consciences extrêmement complexe que l’on doit qualifier du terme de propagande. En 2020, la technocratie a encore grandement accru sa domination sur nos sociétés hyperdéveloppées et les multinationales du Big Pharma amplifient le procédé et mettent des promesses vagues au service de l’accroissement indécent des profits de quelques-uns.

On a tort de ne pas aller chercher les infos dans des lieux qu’on croirait éloignés de nos façons de voir les choses. Non seulement cela nous protège du biais cognitif qui nous fait voir la réalité de manière unilatérale et dans un sens qui confirme nos préjugés, mais on trouve des informations fort intéressantes. Ainsi, alors que quasi tous les médias se sont enthousiasmés à la nouvelle des avancées sur la recherche d’un vaccin anti-Covid-19 la mise au point par Pfizer et BioNTech, c’est sur le site d’un conseiller en placements boursiers que l’on trouve des analyses un peu plus argumentées que celles qui surfent sur l’angoisse de populations submergées de messages anxiogènes tenus par les mêmes médias.

L’investisseur sans costume(1) est certes un conseiller en placements financiers qui gagne sa vie grâce à ses recommandations aux boursicoteurs, mais il a des analyses décapantes, fort différentes de ses confrères du milieu.

Cris de victoire prématurés

Ainsi, depuis quelques jours, il publie des analyses qui tranchent d’avec la naïveté des commentateurs du communiqué de presse victorieux de Pfizer(2). Le patron de la multinationale, Albert Bourla, a fait vraiment fort en osant déclarer : « C’est un grand jour pour l’humanité, enfin la lumière au bout du tunnel, la plus grande découverte médicale depuis 100 ans… ».

En fait, qu’ont dit Pfizer &Co sous l’affirmation légère d’une efficacité à 90% ? Guy de la Fortelle, animateur « sans costume » du blog financier résume : « 39.000 personnes ont reçu 2 doses du vaccin ou un placebo. Sur ces 39.000 personnes, 94 auraient contracté le virus et parmi ces 94, plus de 90% feraient partie du groupe placebo. On imagine donc que 9 personnes vaccinées ont été infectées contre 85 qui avaient reçu le placebo. Cela signifie que d’un côté, 0,4% des placebos ont été infectés et de l’autre 0,05% des vaccinés l’ont été. Bien sûr les résultats ne sont pas présentés comme cela car de ce point de vue, la différence pourrait être due à la marge d’erreur. Comme ils le disent eux-mêmes à demi-mot, les résultats ne sont pas vraiment statistiquement valides : ils n’ont pas encore pu étudier suffisamment de cas d’infections. Mais nous ne pouvons pas savoir… : ils n’ont PAS publié leurs résultats. ».

Effectivement, à y regarder de près, cette annonce est totalement prématurée. On est bien dans la 3ème phase d’essais cliniques du candidat vaccin, mais le recul n’est évidemment pas assez long pour savoir si des effets secondaires ne vont pas se déclarer. On n’a guère insisté non plus sur le fait que le vaccin devrait être conservé à ‑70°C pour être efficace. On réalise immédiatement que ce vaccin très original(3) ne pourra être distribué dans les 90% de la planète incapables de se doter des gigantesques infrastructures frigorifiques et de l’intendance que cela suppose.

Mais l’investisseur sans costume va encore plus loin : « …un essai clinique pour un vaccin est un enfer, vous devez donner un médicament à une population saine et espérer qu’elle n’attrape pas la maladie que vous voulez combattre. C’est beaucoup plus compliqué que de prendre un malade, lui donner un médicament et voir s’il va mieux (ce qui n’est déjà pas simple). Vous travaillez avec des échantillons gigantesques pour réussir à isoler quelques dizaines de cas. Les risques d’erreurs et de biais statistiques sont énormes et en l’occurrence :

  • ils n’ont pas suivi les patients suffisamment longtemps selon les standards de la FDA américaine ;
  • ils n’ont pas isolé suffisamment de cas pour être statistiquement valides ; 
  • ils n’ont pas publié leurs chiffres qui n’ont donc pas pu être vérifiés par la communauté scientifique ;
  • ils ne savent même pas de leur propre aveu quel est l’effet réel du vaccin sur les cas sévères de Covid… qui sont ceux qui nous qui nous intéressent vraiment. »

Pourquoi cette sortie médiatique ?

Si un spécialiste en investissements qui se veulent rentables se préoccupe de médecine et de virologie, c’est que l’objectif réel de ce message qui se veut rassurant est d’abord et surtout de soutenir la relance tant espérée par le système productiviste. Un peu la relance de l’économie qui irait mieux si le virus disparaissait, mais beaucoup la relance des bourses. Et cela a marché puisque, comme le montre le graphique ci-dessous (source Boursorama), une bourse des actions comme le CAC 40 a bondi de 7,5% dans l’heure qui a suivi l’annonce de Pfizer, explosant la barre des 5.000 points pour aller directement à 5.300.

Le cours de Pfizer (ci-dessous) qui stagnait depuis un an, a lui aussi grimpé, mais est retombé assez rapidement (les investisseurs auraient-ils flairé l’arnaque ?).

L’investisseur sans costume enfonce le clou: «Nous ne sommes pas dans le temps de la science, nous sommes exactement dans le temps de la politique, du marketing et des grosses affaires louches. Ils utilisent aujourd’hui une technique de manipulation éculée : annoncez un résultat époustouflant, avec beaucoup de gravité et d’emphase, mais surtout aucun détail, et une fois que tout le monde est béat d’admiration et de gratitude envers les sauveurs du virus, il sera trop tard pour aller chercher des poux à cet essai clinique. »

Quand on commence à se poser des questions sur les pratiques douteuses des multinationales des médicaments et des vaccins on découvre un réseau d’intérêts croisés plus qu’étonnant ? Kairos a publié plusieurs articles détaillant cette toile d’araignée de sociétés privées, de fondations pseudo caritatives et de pouvoirs publics qui échangent des sommes folles dans la perspective de développer et surtout de vendre des vaccins anti-Covid-19. Déjà dans le n°46 de septembre/octobre, nous publiions l’article « Vaccin anti-Covid-19 : la valse des milliards » (pp.16–17). Sur notre site nous avons actualisé ces données sur le texte « La course aux milliards du Covid-19 »(4). Nous avons aussi repéré la manœuvre de Pfizer dans l’article ce 10 novembre « Les recherches vaccinales avancent, les actionnaires encaissent »(5). Mais Guy de La Fortelle lève, lui encore, d’autres lièvres…

Des connivences étonnantes

On connaît la polémique qui a agité le landerneau français (et au-delà) entre les partisans de l’hydroxychloroquine, emmenés par le fantasque Raoult, et les tenants de la médecine officielle, que l’on sait très proche, voire dominée, par les multinationales du Big Pharma. Sans vouloir prendre position dans cette polémique scientifique, il faut constater que lorsque le débat battait son plein, la plus vénérable revue médicale mondiale, The Lancet, a publié une étude qui affirmait non seulement l’inefficacité, mais aussi la nocivité de l’hydroxychloroquine. C’est à partir de cette étude que la France a interdit l’usage de l’hydroxychloroquine… Quelque temps plus tard, l’étude a été retirée : The Lancet avait publié sans la vérifier, une étude fabriquée de toutes pièces contre la chloroquine. L’étude était fausse, mais l’interdiction française, elle, est restée.

Guy de La Fortelle révèle que « derrière RELX(6), le groupe qui détient The Lancet, il y a les géants de la gestion d’actifs américains dont BlackRock. Or, BlackRock détient 8% de Pfizer et 8,5% de RELX. » Selon l’Investisseur sans costume : « Le conflit d’intérêts pour un actionnaire qui détient une position dominante aussi bien dans les plus grands labos pharmaceutiques et le plus grand groupe d’édition scientifique est monstrueux. (…) …en plus, ce conflit d’intérêts se matérialise par une faute aussi grave pour une revue de cette envergure ». Il nous apprend enfin que « le patron de BlackRock, Larry Fink, fut l’un des premiers à être reçu par Emmanuel Macron après son élection et l’est régulièrement depuis comme le révèle Denis Robert dans un nouvel ouvrage sur BlackRock. Selon l’ancien ministre Michel Sapin, Larry Fink « formate l’opinion de ce petit monde manichéen » des décideurs économiques. C’est lui qui a les cordons de la bourse et qui dicte ce que doit faire la France pour être compétitive ». On comprend que, face à une telle puissance économique, les États et même l’Union européenne se couchent. L’UE a ainsi pré-commandé 300 millions de doses à Pfizer et la France 20 gigantesques frigos pour garder bien au frais les futurs (?) vaccins de la multinationale.

Encore une révélation pas piquée des vers de notre conseiller en investissements : dans les heures qui suivaient le communiqué tonitruant de Pfizer, son patron, celui qui annonçait que « c’est un grand jour pour l’humanité »… vendait 60% de ses actions de sa firme(7) (quand il espérait qu’elles seraient au plus haut).

On réalise en écoutant un spécialiste des investissements que ce qui peut apparaître à certains comme un vaste complot ne l’est pas ; ce sont simplement les stratégies très habiles, pas du tout cachées, mais très visibles quand on sait lire les cours de bourse et les rapports annuels des multinationales : c’est un système qui a un nom, le capitalisme mondialisé.

Notes et références

  1. https://www.investisseur-sans-costume.com
  2. https://www.pfizer.fr/pfizer-et-biontech-ont-administre-des-doses-de-vaccin-aux-premiers-participants
  3. Le vaccin de Pfizer consiste à injecter au patient une partie du matériel génétique du virus (ARN, acide ribonucléique) codant pour une protéine de surface de celui-ci. Ce matériel génétique s’intégrera dans les cellules humaines qui, détournées de leur fonction normale, synthétiseront la protéine virale qui induira la synthèse d’anticorps qui viendront provoquer la destruction du virus si celui-ci infecte le patient. On peut donc dire qu’une partie des cellules de l’humain vacciné (lesquelles ?) seront génétiquement modifiées.
  4. https://www.kairospresse.be/article/la-course-aux-milliards-du-covid-19
  5. https://www.kairospresse.be/article/les-recherches-vaccinales-progressent-les-actionnaires-encaissent/
  6. RELX Group est un groupe international d’édition issu de la fusion, en 1993, de la société britannique Reed International PLC et de la néerlandaise Elsevier. En 2009, le groupe était le second plus grand éditeur mondial et employait plus de 32.000 personnes réparties dans 200 pays.
  7. https://markets.businessinsider.com/news/stocks/pfizer-ceo-sold-stock-day-covid-19-vaccine-results-unveiled-2020–11-1029790705.

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