Ils ne veulent pas que vous puissiez penser…

Alors que la commune bruxelloise de Woluwé-saint-Lambert interdisait la conférence de Thierry Meyssan dans une de ses salles, il est indispensable de saisir cette occasion pour analyser ce qui constitue un flagrant délit de censure à l’aune du totalitarisme en marche dans nos contrées occidentales. 

C’est un enseignement magistral, qui ne peut se faire que pour celui qui accepte de ne pas céder aux sirènes hurlantes des médias du pouvoir, outils politiques organisant le Grand Récit, c’est-à-dire le mensonge, propageant les perpétuelles premières sommations pour celui qui aurait par hasard quelques velléités de remettre la vérité médiatique en question.

Je parle, évoquant la conférence de Thierry Meyssan ce 15 mai 2025, de ce premier enseignement qui forme les prémices d’un second : le réel ne fut nullement conforme à ce que les instances politiques nous prévoyaient en feignant vouloir nous en protéger, à savoir « troubles », « controverses » (sic) et « perturbations de l’ordre public ».

Rappelons les faits : invité par nos soins en Belgique pour partager avec un public attendu nombreux, son analyse de la géopolitique, nous avions trouvé une salle pour accueillir Thierry Meyssan et ceux venus l’écouter. La soirée devait se tenir à Woluwé-Saint-Lambert, une commune de la région de Bruxelles, dans une salle propriété de ladite commune et appelée La Rotonde. Alors que les places avaient déjà été mises en vente, qu’un nombre important de personnes avaient réservé, le bourgmestre prit le 2 mai un arrêté interdisant la conférence dans cette salle.

Que s’est-il passé ? Décision émanant de plus haut : Sûreté de l’État, ministère ? Appels de quelques militants « antifas » monomaniaques qui sont à la liberté d’expression ce que le débat est aux émissions de la RTBF ? Qu’importe au fond… et on peut penser que ce sont sans doute les deux.

Confirmation circulaire

Voilà en substance les raisons invoquées par le pouvoir communal pour justifier l’interdiction :

« Considérant que M. Thierry Meyssan est l’auteur de plusieurs livres dans lesquels il développe diverses théories qualifiées, notamment par la presse, de complotistes ou de conspirationnistes et partage son admiration pour des régimes tels que ceux de Kadhafi (Libye), de Bachar al-Assad (Syrie) ou de Poutine (Russie). Considérant qu’il est notamment l’auteur de « 11 septembre 2001 – L’effroyable imposture et le Pentagate »(…) Considérant que l’article de presse du journal Libération du 07/09/2021 (…) ainsi que l’article paru sur Streetpress 14/06/2022 (…) et l’article de presse du 17/04/2015 (…) Vu le rapport des service de police ;

Considérant que ledit rapport de police conclut qu’au vu des prises de position et des sympathies affichées par M. Thierry Meyssan, il y a un risque que ses discours dans un lieu accessible au public provoquent des troubles et des controverses, susceptibles de perturber l’ordre public ;

Vu l’ensemble de ces éléments ;

Est interdite la tenue le 15/05/2025 à La Rotonde, avenue Jean-François De Becker, 54 à Woluwsé-Saint-Lambert de la conférence « Géopolitique d’un monde en mutation » donnée par Thierry Meyssan ».

On est ici en présence d’une manœuvre courante d’exercice du pouvoir, où ce dernier appuie son avis sur une autre instance qu’il feint de faire croire indépendante alors que chacune d’elle (politique, médiatique, policière) participe d’un même système qui se renforce en invoquant l’expertise de l’autre. La commune de Woluwé-Saint-Lambert justifie en effet son interdiction du débat :

- en se référant à des articles de presse émanant des médias du pouvoir subsidiés par le politique, qualifiant Thierry Meyssan de complotiste ou conspirationniste ;

- en se référant à la Science, la vérité historique de nature religieuse, pour laquelle le Récit officiel est écrit dans le marbre et indiscutable. Quiconque en douterait est suspect ;

- d’un rapport des services de police, police elle-même sous l’autorité directe du bourgmestre.

Feindre la protection collective pour assurer la stabilité du pouvoir politique

Revenons-en donc au début : la censure organisée par le pouvoir politique s’appuyant sur les forces de l’ordre et la police médiatique, anticipe l’avenir et s’appuie spécieusement sur une mission de protection de l’ordre public pour justifier l’interdiction. Le premier enseignement à tirer pour celui qui ose outrepasser cette interdiction et assister à la conférence de Thierry Meyssan est fondamental, c’est celui du constat que le réel n’aura aucunement été celui qu’annonçait le pouvoir politique : il n’y eut aucune perturbation à l’ordre public et la soirée se déroula dans de parfaites conditions(1).

Le second enseignement, qui révèle au fond la véritable volonté du pouvoir politique, est le suivant : en interdisant la tenue d’une conférence, l’individu qui obéit à l’injonction se privera d’une source d’information qui aurait pu l’aider à intellectuellement se faire une représentation du réel et approcher la vérité. L’idée n’est pas de dire que Thierry Meyssan a raison ou pas, mais de rappeler que penser nécessite de la contradiction et du débat. Se révèle ainsi le véritable but du pouvoir qui, prenant comme prétexte la protection de l’ordre public, mais n’en a en réalité rien à faire, vise à interdire tout discours qui irait à l’encontre du Grand Récit, nous privant de « comprendre ce qu’il se passe ».

Cette interdiction de débattre, cette définition du seul Vrai par le pouvoir, est une forme de totalitarisme, prélude aux autodafés, emprisonnements pour délits de pensée, et à terme assassinats politiques.

Ainsi, le pouvoir politique, arguant nous protéger, au nom de la liberté(2) sème les graines de la discorde et de l’anomie(3) qui, si nous ne décidons pas collectivement de prendre notre destin en main, nous mènera inévitablement au chaos. 

Notes et références

  1. En outre, quand il y a des perturbations, elles sont souvent le fait de minorités antifas soutenues par le pouvoir, ou du moins tolérées (pensons aux casseurs qui lors des manifs « Covid » provoquèrent systématiquement l’intervention violente des forces de l’ordre – que je préfère appeler « force du désordre » – mettant fin à la manifestation).
  2. Le bourgmestre à l’origine de l’arrêté d’interdiction vient de créer un nouveau parti dénommé Lib.res (« libres et responsables »). Tout cela est, à nouveau, digne d’Orwell.
  3. Déf. Anomie: « Désorganisation, déstructuration d’un groupe, d’une société, causée par la disparition progressive de lois, de normes, de valeurs communes ».

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