Le juge Claise a lancé un mandat d’arrêt international contre le patron du fond souverain libyen

Dans un article daté du 7 janvier paru dans le Tijd, Rik Van Cauwelaert nous apprend que le juge d’instruction Michel Claise a émis un mandat d’arrêt international contre Ali Mahmoud, le président de la Libyan Investment Authority. Il s’agit du fonds souverain de la Libye. Ce pays ayant été géré de main de fer par le colonel Kadhafi pendant 42 ans, il avait tendance à considérer ce fonds comme sa cassette personnelle à l’étranger.

Selon le dernier rapport du cabinet Deloitte, les actifs de la LIA sont estimés à près de 68 milliards de dollars en 2019. Pour rappel, une partie importante de ce trésor (entre 14 et 15 milliards d’euros) était placée dans les banques belges et en particulier auprès de la banque d’Euroclear.

Il faut également se rappeler que l’ONU a gelé ces avoirs pour éviter qu’ils ne servent à financer les guerres civiles qui ont éclaté en Libye après la mort de Kadhafi le 20 octobre 2011. Or, le gouvernement belge a autorisé le transfert des intérêts de ces fonds (environ 2 milliards) en violation complète de la résolution de l’ONU, à une des factions libyennes. 

Lorsqu’on parle du gouvernement belge, il s’agit principalement de Didier Reynders qui était ministre des Affaires étrangères à cette époque mais qui avait placé des hommes de confiance aux postes clefs de son ancien ministère, les finances.

Comme Marc Monbaliu, l’ancien patron de la Trésorerie, qui doit toute sa carrière à Reynders, et qui a signé l’acte de transfert. Ce dernier avait déclaré au Vif : « Vous pensez bien que ce genre de décision aussi délicate n’est jamais prise par une personne dans le secret de son bureau. Cela fait l’objet de discussion et de validation par le pouvoir politique. »

Le motif du mandat d’arrêt international est la corruption. Or en droit belge, cela implique un corrupteur et un corrompu. Qu’un juge d’instruction belge lance un mandat d’arrêt contre un haut fonctionnaire d’un pays tiers, cela n’est pas une démarche courante. Que l’autre principal suspect soit commissaire européen à la Justice et à l’état de droit n’est pas courant non plus. En particulier lorsqu’il est responsable du nouveau parquet européen chargé de lutte contre… la corruption.

L’article du Tijd se pose également des questions sur la responsabilité de la banque d’Euroclear, mais également sur le silence assourdissant de certains protagonistes de l’époque, comme Georges Gilkinet. Ce dernier était particulièrement actif dans le dossier pour essayer de faire triompher la vérité. Soudainement, on ne l’a plus entendu et maintenant il est vice-Premier ministre et ministre de la Mobilité dans le gouvernement du Premier ministre Alexander De Croo, lui-même ancien ministre des Finances !

  1. Jeune Afrique, 14 septembre 2021, « Fonds souverain libyen, les milliards de Kadhafi bientôt dégelés ? ».
  2. TV5Monde, 31 octobre 2018, « Fonds libyens : la Belgique au cœur d’un scandale ? ».
  3. La Vif, 16-01-2019, « Fonds libyens, l’enregistrement qui dément Monbaliu. »

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