DES ONDES, DES RATS, ET DES HUMAINS…

Illustré par :

André Vander Vorst, professeur émérite de l’université de Leuven, a travaillé pendant plus de 20 ans sur les ondes électromagnétiques. Ses résultats — mortalité accrue des rats exposés, modification de leur composition sanguine, perte de la mémoire — auraient dû au minimum imposer un moratoire sur le déploiement des systèmes fonctionnant avec de telles ondes. Même si la Belgique n’est pas le plus mauvais élève européen, l’idéologie d’un « monde connecté » n’en a pas pour autant été entachée, Bruxelles se voulant d’être une des premières villes 5G. Pourtant, selon le scientifique, l’humain ne devrait jamais jouer l’apprenti sorcier en matières d’ondes.

Une caractéristique originale de vos travaux est que vous avez fait des mesures sur animal. Comment procédiez-vous? 

Nous avons travaillé sur les rats, animaux paisibles qui conviennent bien au laboratoire, dont certains ont été exposés à un rayonnement micro-ondes(1), alors que le groupe témoin n’a rien subi. Ce faisant, on ne fait pas la mesure absolue de ce qui se passe sur les rats exposés, mais on compare ce qui se passe chez le rat exposé à ce qui se passe chez le rat non exposé. Rigoureusement, on devrait faire ce type d’expérience sur l’être humain, mais il n’y a plus moyen de composer un groupe témoin: on ne trouve plus d’êtres humains qui ne sont pas ou n’ont pas été exposés. Les implantations micro-ondes ont été tellement rapides et généralisées qu’on ne peut plus étudier rigoureusement les effets de celles-ci sur l’être humain. Cela veut donc dire que ceux, aujourd’hui, qui vous disent « Vous savez rien n’est prouvé », ou bien (ce sont des faux-je- tons) vous trompent, ou bien sont ignorants. 

Ça pourrait être une sous-réponse à la question : quels ont été les résultats les plus étonnants de votre carrière ? 

Effectivement, on se trouve quand même dans une situation où il n’est pas possible d’utiliser la méthode scientifique la moins discutable puisqu’on ne peut trouver de groupe témoin. 

Tout le monde est touché ? 

Exact. Certains tordus vous disent alors : « Mais on peut prendre un Lapon ». Dans ce cas, si vous le faites et que vous publiez cela, celui qui n’a pas envie de considérer vos résultats va dire « Mais enfin, vous prenez un groupe en Belgique que vous comparez à un groupe en Laponie… la composition sociologique est tellement différente que cela ne veut plus rien dire ». Et il n’a pas tort… 

Monsieur Vander Vorst, vous êtes professeur émérite à l’Université de Louvain, vous avez travaillé toute votre carrière sur les hyperfréquences et les micro-ondes et avez créé un laboratoire d’hyperfréquences. En quoi consistait en gros votre travail ? 

Depuis que le laboratoire a été créé, nous avons étudié de façon détaillée ce qui se passe sur des lignes de transmission à très haute fréquence. C’était en 1966. Le premier Sputnik, c’était 1957, le premier Telstar, 1962(2)… J’ai par la suite orienté pendant des années mes recherches vers des études surtout atmosphériques ou troposphériques, la basse atmosphère : dans quelle mesure la transmission évolue en fonction des circonstances atmosphériques. Ensuite, je me suis intéressé aux recherches sur les dispositifs qui traduisent des micro-ondes en optiques et inversement et j’ai commencé à m’intéresser aux aspects biologiques. À la fin des années 1960, un ami neurophysiologue à l’UCL — nous étions encore à Leuven à ce moment-là — m’a demandé si les hyperfréquences permettraient éventuellement de soigner des goitres qui affectaient des vaches suisses, mais également des humains. J’ai donc fait des mesures en dépit du bon sens, cela n’a donné aucun résultat, je n’y connaissais rien… Dix ans plus tard, nous avons breveté avec mon chef d’atelier un dispositif de stérilisation d’air pour faire les opérations chirurgicales de campagne avec un flux laminaire qui passait à travers une cavité micro-ondes, une grosse cavité, dans laquelle, à intervalles réguliers, le système imposait une puissance dissipée qui tuait les bactéries en les cuisant. Vers 1985, j’ai commencé à travailler avec un jeune ingénieur chinois et avons fait des études sur des lapins, notamment une méthode d’acupuncture micro-ondes. Nous avons mis au point une expérience afin de vérifier si on pouvait mesurer des effets non-thermiques en exposant la moelle épinière des lapins. Enfin, un peu avant l’année 2000, nous avons commencé une investigation sérieuse où nous avons exposé des rats. Je n’ai donc jamais fait de biophysique à temps plein, mais c’est une activité qui s’est développée chez moi depuis la fin des années 1960, et qui a crû. 

À partir des années 2000, vous super- visez notamment une thèse et vous vous intéressez aux effets des micro-ondes sur l’organisme et la santé des rats ? 

On avait déjà commencé à préparer cela dans les années 1998–99. Les mesures ont débuté en 2004, avec des années de préparation puisqu’il s’agissait de faire des mesures sur des rats 2 heures par jour pendant 21 mois. C’était long, nécessitant 6 heures de travail par jour. Le doctorant, un militaire rémunéré par l’armée, était assisté de deux préparateurs Pendant 21 mois, il s’agissait ainsi de vérifier si on percevait des effets à relativement long terme. 

Quels ont été les effets de l’exposition aux ondes sur les rats ? 

Nous avons travaillé avec des groupes de 31 rats exposés et un groupe de 31 rats non exposés. 3 groupes de 31 rats ont été exposés à diverses fréquences et divers modes de signal. Par exemple, l’un ressemblait à celui d’un téléphone portable, alors que l’autre était une onde simple. Nous avons constaté deux résultats principaux après 21 mois. Le premier, c’est que la composition du sang, statistiquement, a été modifiée chez les rats qui avaient été exposés par rapport à ceux qui ne l’avaient pas été, notamment en ce qui concerne les globules blancs. L’autre résultat, c’est que le taux de mortalité des rats exposés était à peu près deux fois plus élevé après l’exposition que le taux de mortalité des rats non-exposés. Il faut préciser que ces rats vivent à peu près 30 mois et qu’ils ont été exposés 21 mois à partir de l’âge de 4 mois. 30 mois pour un rat équivaut donc à 90 ans pour un être humain. Avoir exposé les rats durant 21 mois reviendrait donc à exposer des humains pendant 63 ans. Là on est loin du compte, parce que les portables n’ont été introduits dans nos pays que vers 1994, il faut encore attendre 38 ans… Une de nos préoccupations, en travaillant ainsi, était donc de voir dans quelle mesure on pouvait relever ou non des effets à long terme sur des rats, qui permettraient alors de nous donner des idées sur ce qui était susceptible de se produire chez l’être humain. Je dis « donner des idées », parce qu’on ne peut jamais trop rapidement transposer à une population humaine des résultats épidémiologiques obtenus sur une population animale. 

Quels ont été les autres effets sur les rats que vous avez constatés, notamment en termes de mémoire ? 

Au cours de l’étude, nous avons également testé la mémoire et vérifié une multitude d’études sur le sujet déjà parues. Nous n’avons pas fait œuvre originale, mais nous avons obtenu confirmation. On a pris les rats soumis 15 mois à un certain type d’exposition et ceux qui avaient été manipulés exactement de la même manière, mais sans qu’on enclenche l’interrupteur de la boite d’exposition. Les rats non exposés ont été ensuite mis dans une cage contenant deux objets identiques. Le rat tourne autour de l’un, tourne autour de l’autre, apprend à connaître les deux objets, puis il va jouer. Après cela, on les retire et, environ 15 minutes plus tard, on le remet dans la cage après avoir remplacé un objet par un autre. À ce moment-là, le rat non exposé ne va plus guère vers le premier objet, il le connaît et se rend au deuxième objet et le découvre. Les 31 rats non exposés ont eu le même comportement. Par la suite, on a réitéré l’expérience avec les rats exposés aux ondes et nous avons obtenu des résultats tout à fait différents : le rat qui a été exposé dans la cage face à deux objets identiques, tourne autour de l’un puis tourne autour de l’autre, il les découvre. Lorsqu’on le retire et que 15 minutes plus tard, ayant remplacé un objet par un autre, on remet le rat dans la cage, il va prendre autant de temps à reconnaître le premier objet qu’il connaissait déjà que le deuxième qu’il ne connaissait pas. Autrement dit, il a perdu la mémoire du premier. C’est très impressionnant à voir… 

Cela vous a étonné ? 

Ah ça oui ! Enfin, cela a confirmé des résultats antérieurs qui montraient qu’une exposition de ce type-là peut effectivement altérer la mémoire, mais c’est assez surprenant de constater que cet animal a perdu la mémoire. Les 31 rats qui avaient été exposés ont tous montré le même comportement, puis on a fait l’expérience 5 fois avec chacun de ces rats, et ça a donné le même résultat. Donc ce n’est même plus un résultat statistique : après 15 mois, les uns reconnaissent l’objet déjà rencontré alors qu’aucun des autres ne le reconnaît. C’est impressionnant également parce qu’on emploie beaucoup les rats comme animaux de laboratoire, en raison du fait que 90 à 95% de son ADN est semblable au nôtre. C’est impressionnant de voir un animal, qui n’est pas si petit, avoir perdu la mémoire. Les ondes, on ne les voit pas, on ne les sent pas, mais elles ont eu un effet sur la mémoire des 31 rats exposés 15 mois. 

Ce sont les résultats scientifiques qui vous ont le plus étonné, ou bien il y a eu d’autres résultats auxquels vous ne vous attendiez pas ?

C’est tout à fait passionnant quand on découvre quelque chose de nouveau ou, au contraire, de confirmer et d’avoir les confirmations de collègues compétents qui ont déjà testé la même chose. Cela c’est un aspect scientifique, extrêmement agréable. Mais je m’y attendais parce que je suis impliqué dans ce domaine depuis environ 1997. Je sais par ailleurs que cela ne fait pas plaisir à tout le monde. La grosse surprise du genre politico-politique donc, disons, ce sont ces quelques personnes, parfois sous le couvert scientifique, qui critiquent votre travail. On découvre alors qu’on peut publier un article dans une revue de bonne qualité, se retrouver face à des personnes n’ayant jamais fait ce genre de travail mais qui vous critiquent verbalement, sans même écrire un article… Des membres du Conseil de santé des Pays-Bas ont écrit trois années après que la thèse de Dirk Adang a été publiée, une étude sur deux pages, alors que notre article en faisait onze… C’est leur droit de le faire, le procédé est correct. Ce à quoi je ne fais plus aucune attention, c’est d’avoir quelqu’un, médecin ou autre, qui, autour d’une table, sans jamais avoir fait cela, critique en disant que statistiquement ce n’est pas sérieux. Cela n’a pas de sens. Ces personnes sont connues pour systématiquement minimiser les effets mesurés et essayer de dévaloriser toute étude qui produit des résultats positifs. Il faut se méfier d’eux comme de la peste, parce qu’ils trompent le public. 

Leurs raisons sont-elles scientifiques quand ils remettent en question les résultats de vos études ? Et leurs motivations le sont-elles ? 

Ils le disent, mais à mon avis ce n’est pas vrai du tout. Ils ne sont en général pas compétents sur ce point ; il faudrait leur demander combien d’articles ils ont déjà publiés sur le sujet. J’en connais un qui est très critique. À ma connaissance, il a publié un article sur les effets des micro-ondes dont j’étais d’ailleurs co-auteur, alors cela ne lui permet pas vraiment de jouer à l’expert capable de critiquer. Cela fait partie de l’histoire et d’autres, comme Madame Cammaerts, peuvent dire la même chose. 

On touche aussi à de gros intérêts économiques… 

Il y a quand même beaucoup d’argent derrière… Je n’ai rien contre l’argent, mais il a pris une place considérable. Quand j’ai commencé ma carrière à l’Université de Louvain, si vous aviez une bonne idée, ne fût-ce qu’une fois par an, c’était très bien. On ne vous poussait pas, ni les pouvoirs publics, à être utile directement à la société, à participer à de grands groupes de recherche, à tenter de récolter le plus d’argent possible pour de l’équipement. J’ai connu cela, mais pas de la part de l’institution. Aujourd’hui, c’est quand même devenu difficile. Dans ce genre d’étude, il faut se rendre compte que le doctorant, au départ militaire, est devenu docteur ; sa carrière était engagée, il n’était pas dans la situation d’un jeune chercheur à l’Université pour essayer d’avoir une place plus ou moins définitive. On a commencé à travailler sur cela en 1998–1999, l’exposition s’est terminée en mars 2005, la thèse a été présentée en 2008 et l’article publié en 2009. Dix ans, c’est quand même un luxe pour un jeune chercheur, que l’Université ne peut pas se permettre. C’est un domaine difficile et lent, passionnant, mais qui n’est pas très « rentable » du point de vue de la carrière scientifique. 

Est-ce que les expériences que vous avez faites sur les rats peuvent être reproduites sur des êtres humains ? 

Là on tombe sur une difficulté dont il faut parler… On a pris des rats, on a exposé un groupe et un autre groupe témoin aussi semblable que possible au groupe exposé. En fait, on ne fait pas les mesures d’une exposition micro-ondes dans ce cas-ci, on fait la mesure de ce qu’on observe de différent chez un groupe exposé par rapport à un groupe non exposé. C’est la différence, pas la valeur absolue. 

Comme je l’ai dit, il faut bien se rendre compte, quand on parle d’humain, qu’on a été tellement vite pour introduire le portable — au début de l’année 1994, puis l’engouement à partir de 1997–98 —, que nous sommes incapables de constituer un groupe témoin parmi les êtres humains, car tout le monde est désormais exposé aux micro- ondes. Il n’y a plus de groupe non exposé ! Or, l’étude scientifique la moins critiquable et discutable est celle qui consiste à comparer un groupe exposé à un groupe non exposé, mais cela il n’y a plus moyen de le faire… Il n’y a plus moyen de pratiquer le type d’expérimentation scientifique le moins discutable, ce qui explique qu’on travaille notamment sur des rats… 

C’est assez rare, dans le domaine scientifique, qu’il n’y ait plus du tout de groupe témoin, non ? 

Les ondes sont presque impossibles à éviter, parce qu’il s’agit d’ondes électromagnétiques, et qu’à ces fréquences-là, elles se répandent partout… 

Selon les résultats scientifiques que vous avez eus, quelles mesures politiques devraient être prises, si on tenait compte du principe de précaution ? 

Vous posez une question difficile… J’ai déjà été parler de cela avec des politiques au cours de ces années, mais plus aujourd’hui, car je suis fatigué… Je suis en train de parler d’effets à long terme, parce qu’il semble bien, heureusement, qu’on n’ait pas constaté d’épidémies graves à court terme sous l’effet de ce type d’exposition… La question est donc : y‑a-t-il des effets à long terme ? Comme je le disais, on a exposé nos rats pendant 21 mois, cela correspond à 63 ans pour un être humain, c’est quand même beaucoup comme période de temps… Alors, parler de ça à un politique, je l’ai fait de temps à autre, mais je n’ai pas insisté parce que, vous savez, quand il y a des élections dans deux mois ou dans deux ans, c’est un peu difficile de parler de 60 années d’exposition… On est pris aujourd’hui dans un engrenage plus contraignant que par le passé parce que le court terme rend impensable la préoccupation du long terme. Je trouve qu’il faut financer des études du type que nous avons faites pour obtenir des résultats plus importants, ainsi que la publicité des résultats obtenus. Je ne parle pas de faire des déclarations fracassantes à partir d’une attitude ou de l’autre, mais qu’on fasse au moins le tour de la question et qu’on informe correctement le public. Les politiques doivent aussi prendre uniquement comme experts des personnes qui sont connues comme ayant publié dans le domaine, il faut de la transparence. Au total, je crois qu’il n’y a qu’un seul acteur qui soit capable d’influencer les choses de façon significative : la population. Je pense que grâce à la population belge, on a adopté des normes ici qui sont plus contraignantes en Belgique qu’en France, Allemagne, Pays-Bas et Grande-Bretagne. On était à Bruxelles à 3 volts/mètre, maintenant on passe à 6 ; on est en Wallonie et en Flandre à quelque chose comme 7 volts, 7,5 volts/mètre maximum, alors que dans les pays environnants, la limite est celle de l’Organisation Mondiale de la Santé qui est de 41,2 volts/mètre, c’est quand même beaucoup. En Belgique, on est plus prudent, notamment parce qu’il a été possible de faire des recommandations au Conseil de la Santé qui étaient à mon avis raisonnables. Je parle expressément de prudence et pas de principe de précaution. Le principe de précaution est un concept défini par des recommandations de l’Union européenne, qui sont quand même parfois difficiles à interpréter. Moi je dis qu’il faut être prudent. 

Vous dites qu’il faut attendre un changement ou une conscientisation de la population mais, quand nous vous avions rencontré en 2013(3), vous disiez que le calcul, selon vous, était de laisser aller les choses suffisamment longtemps pour qu’un retour en arrière soit impossible. Les jeunes sont tellement accros que même si plus tard on leur impose un principe de prudence, plus personne n’en tiendra compte… 

Je peux vous reprendre sur deux points ? Le premier c’est que, me semble-t-il, en Belgique, la population est consciente. En plus, peut- être parce que le pays est plus petit, elle a eu une action évidente sur 

les politiques pour que des décisions normatives différentes soient prises. L’autre est que, si je pense que c’est seulement la population qui peut le faire, c’est parce qu’il y a beaucoup d’argent derrière tout cela… les opérateurs, les actionnaires, il ne faut pas oublier. Et les politiques doivent décider… Je pense qu’on a fait le calcul d’aller vite pour qu’il ne soit plus possible de revenir en arrière, ce qui a quand même raté puisque, notamment à Bruxelles, on est passé à 6 volts/ mètre, recommandation du Conseil de Santé de 2000, confirmée en 2005. 

En tant qu’individu conscient des effets des ondes électromagnétiques sur les rats, qu’on peut extrapoler aux êtres humains, qu’avez-vous changé dans votre vie par rapport au risque d’exposition ?

Cela s’est joué sur deux tableaux très différents. L’un, c’est l’aspect scientifique, comme je disais tout à l’heure, qui apporte la satisfaction de voir qu’on obtient des résultats intéressants… Si un chercheur ne trouve rien, ce qui peut être le cas, c’est moins amusant. L’autre, c’est mon avis personnel, que j’ai comme n’importe qui. Quand on s’exprime en science, c’est sur une base rigoureuse. Mon opinion personnelle, c’est que l’homme est susceptible de modifier l’environnement de façon extrêmement significative, il est susceptible de mettre à mal notre planète, et s’il n’y a pas de réflexes qui rappellent le bon sens, cela risque de se produire… À titre personnel, par exemple en ce qui concerne les ondes, je trouve à la limite que l’effet de l’homme dans l’environnement devrait être nul… Il faut trou- ver d’autres moyens. Moi je n’ai pas de wifi à la maison, j’ai un téléphone fixe, ça marche vraiment très bien, c’est très confortable d’être assis dans un fauteuil, de bien entendre et bien parler. Ajoutons qu’il faut être très prudent aussi avec la qualité de l’eau, de l’air, de l’environnement, dont les ondes en question… 

Vous arrivez donc à mettre une barrière entre ce que vous faites scientifiquement et, disons, ce qui se passe dans votre vie ou dans la vie des autres. Mais alors quel est le rapport entre une certaine forme de vérité que vous essayez de mettre au jour et les effets dans le réel. Comment vivez-vous le fait que les expériences que vous menez et les résultats que vous avez puissent ne pas se répercuter dans le réel ? 

C’est une question difficile parce qu’on peut la poser à propos de trente-six choses, évidemment, pas seulement pour les ondes. En fait, j’ai l’impression aussi de semer la bonne parole dans ma famille, chez mes amis. Les gens qui vous critiquent parfois ne lisent pas la littérature, et ils le disent d’ailleurs. Ils savent que bien après, il subsiste quelque chose. Cela étant, je suis quand même assez convaincu de la liberté de l’être humain, et donc si quelqu’un de ma famille ou un ami fait les choses autrement, moi je n’ai guère de souci à cet égard-là. Ce n’est pas vraiment mon problème, c’est le sien. Je trouve que l’urgent à faire, c’est peut-être au niveau de la liberté de l’individu qui doit pouvoir s’exercer, mais elle doit être correctement documentée, et là, les gens comme moi ou comme les politiques ont un rôle influent à jouer. Une de mes surprises a été de voir combien, parmi ceux qui sont hostiles à ce qu’on parle des risques éventuels, pratiquent en fait le mensonge par omission avec allégresse. On vous dit quelque chose qui est exact, mais on ne vous dit pas autre chose qui est tout aussi exact mais qui modifie tout à fait le type d’appréciation qu’on peut avoir par rapport à ce dont on parle. Le mensonge par omission est très fréquent… J’en ai des masses à disposition. 

Propos recueillis par Alexandre Penasse. 

Merci à Sébastien Gillard pour la retranscription, à Bernard Legros pour la relecture. 

Notes et références
  1. « Les micro-ondes sont des rayonnements électromagnétiques de longueur d’onde intermédiaire entre l’infrarouge et les ondes de radiodiffusion. Le terme de micro-onde provient du fait que ces ondes ont une longueur d’onde plus courte que celles de la bande VHF, utilisée par les radars pendant la Seconde Guerre mondiale » (Wikipedia).
  2. Satellites de télécommunication.
  3. « Le taux de mortalité des rats exposés est deux fois plus élevé », Kairos février-mars 2013.

Espace membre