Témoignage

Un goût amer

Nous avons reçu ce texte d’un militaire, dénonçant l’impossibilité dans nos sociétés d’exprimer ce que l’on ressent et d’être entendu, sans être catalogué par le pouvoir en place. Nous laissons place, dans notre rubrique ‘témoignage’, aux propos de citoyens, qui pourront créer ce débat indispensable. 

(…)La nation emprisonnée dans la gaine impériale implose lentement de l’intérieur, se ressaisit certes par moments, titube, hébétée par la découverte de la station debout, puis, au moment où on la croit ragaillardie, sur le point de franchir le Rubicon existentiel de sa liberté politique, s’affaisse à nouveau et subit les remontrances de ses contempteurs. (Marc Chevrier, La rançon de Brennus)

Cet extrait pourrait convenir à la situation actuelle. Peu importe sa provenance ou qu’il soit utilisé plus tard pour ‘canceller’ (nous y reviendrons) le propos qui va suivre. Au moins les choses auront été dites. Passer par Kairos n’est pas non plus innocent, outre le fait qu’il soit un des rares médias francophones encore ‘libres’, le moment paraît en effet opportun tant nos esprits semblent tendus vers une délivrance qui reste encore difficile à cerner.

Nous sommes tous des êtres sensibles doués de raison mais fonctionnant aussi par le biais de ces fabuleuses émotions qui traversent nos corps et nos esprits en permanence. La question est comment exprimer ces ressentis. Il n’est bien entendu pas question ici de sémantique ou de rhétorique mais bien du canal ou du moyen qui nous permettrait de faire part de notre étonnement, de nos doutes face à ce qui apparaît de plus en plus être une doxa gouvernementale. Et ceci sans risquer, espérons-le, un déchaînement de reproches.

Devons-nous déjà parler de délit d’opinion ? Car quand exprimer ce qu’on ressent au plus profond de soi n’est non seulement pas pris en compte mais est au mieux raillé ou au pire violemment combattu avec cette nouvelle arme qu’est la ‘cancelled culture’, alors le doute est permis. Arme que vous, politiciens, maniez sans vergogne, détruisant toute personne n’adhérant pas à votre vision. Et si cela se fait dans un grand show médiatique sans profondeur, c’est encore mieux. Edward Bernays vous aurait certainement applaudis !

Vous n’êtes plus des politiciens, vous êtes devenus des faiseurs d’opinion dont le seul objectif est la prochaine échéance électorale. Vous vous immiscez ainsi au plus profond de nos vies, soufflant sans cesse à nos oreilles vos idées , que dire, que penser, qui aimer, qui ne pas aimer, que faire, que ne pas faire. Ce que vous appelez progressisme, sans cesse mis en avant, ne parvient qu’à nous disloquer. Regardez autour de vous. Regardez ce lamentable tableau. Regardez ce que vous avez fait de nous ! Nous sommes divisés comme jamais !

Vous êtes prompts à embrasser toutes les causes tellement vous vous dites pétris de démocratie. Vous allez jusqu’à faire saluer au garde à vous le drapeau arc-en-ciel tant votre politique est ultra communautariste. Sans doute notre devise n’a pu résister à l’amnésie qui vous frappe . Notre drapeau national n’est-il pas suffisant ? A travers lui n’y a‑t-il pas moyen de fédérer la population ? Et ce n’est pas non plus en piétinant notre histoire ou en autorisant d’abattre ses représentations que vous aurez l’adhésion et le respect de l’ensemble de la population. Au lieu de cela vous déshonorez ceux qui ont participé au destin de cette nation en n’y voyant que le mal et en sortant les choses de leur contexte.

Et maintenant ? Vers qui pouvons-nous légalement nous tourner quand nous ne sommes plus en phase avec vos discours et vos politiques politiciennes ? Il n’y a malheureusement aucun groupe d’opposition digne de ce nom. Vos solutions ‘vivaldi’ n’arrangent que vous. Vos discours infantilisants n’arrangent que vous. Si les choses n’évoluent pas, il y aura d’autres Jurgen Conings.

Comment lui en vouloir ? Moi je n’y arrive pas.

Vous avez trahi une partie de la population. A partir du moment où des voix s’élèvent, vous déversez votre flot de qualificatifs simplistes coupant court à l’idée même d’un débat démocratique. Nous sommes tour à tour fascistes, racistes, islamophobes, misogynes, machistes, complotistes, rassuristes, extrémistes, etc. Chaque jour à travers les médias vous insultez une partie de la population, devenant à votre tour ce que vous donnez l’illusion de combattre.

Je suppose que vous serez jugés par l’histoire pour tout cela.
Faites que le réveil n’ait pas un goût amer.

(…) La métamorphose des cochons apparaissait maintenant flagrante. Dehors, le regard des animaux passait des cochons aux hommes, des hommes aux cochons, puis de nouveau des cochons aux hommes, mais déjà il n’était plus possible de les distinguer. (George Orwell, La ferme des animaux.)

Un militaire, citoyen parmi d’autres.

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