Les nouveaux chiens de garde

Le reportage de gilles Balbastre et Yannick Kergoat qui a à ce jour fait plus de 200.000 entrées en salle, compile des données accablantes contre les journalistes-experts et les éditocrates français qui reproduisent la ligne idéologique de leur maître. Leur « liberté d’expression », la leur, semble plus être au service de grands groupes industriels et du pouvoir, fricotant avec les hommes et femmes politiques, flattant les « grands » et, du haut de leur superbe, snobant les « petits », distillant leur pensée unique sous les habits de la pluralité. 

Réaliser un film sur les dessous des médias et leurs journalistes révérencieux confère un double avantage : en premier et tout naturellement, il génère une pensée indépendante de la pensée formatée que ce journalisme « économique » distille dans les esprits à longueur de journée, en offrant une preuve de leur soumission à l’argent et leur soif de pouvoir ; mais par la réaction même de ces journalistes incriminés, il ajoute à l’enquête qui voulait prouver, la preuve de la réaction à l’enquête. On lira donc chez les « toutous dociles » critiques du film, sans étonnement : « une charge qui se révèle beaucoup trop manichéenne pour convaincre » (le Figaro) ; « une opération politique menée par un petit groupe venu de l’extrême gauche » (le nouvel observateur) », « à vouloir considérer que tous les patrons de presse sont à mettre dans le même panier, au nom du poste qu’ils occupent et du poste qu’ils dirigent, c’est un peu court » (l’express), etc. On n’attendait évidemment pas des canidés pointés du doigt, acculés, et de leurs affidés, qu’ils avouent ainsi et changent de camp. 

les réactions ne s’inscrivent donc que dans la continuité de celles qu’on voit dans le reportage, où les « gardiens du statu quo » campent toutes sortes de postures pour démonter les propos du film et prouver leur bonne foi. Mais leurs gesticulations ne prennent pas. On reconnaît les signes de la pensée qu’ils représentent, leurs collusions avec les gens de pouvoir et d’argent, leurs salaires honteux, leurs tentatives éhontées de convaincre. Seul vouloir être comme eux, ou déjà l’être, peut prémunir le sujet de la compréhension des faits qui accablent ces journalistes. 

Assez bien reçu en Belgique, il est à se demander si la situation serait identique si nous nous penchions sur les dessous des chiens de garde belges, situation tout à fait différente de leurs collègues français, certes, mais qui révèlerait très certainement de nombreux éléments éclairants. 

A.P.

Les nouveaux chiens de garde, un film de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat, JEM productions. Distribué en Belgique par Libération Films. http://www.lesnouveauxchiensdegarde.com

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